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Recevabilité de l’action en rapport envers un paiement par chèque CARPA

Un paiement par chèque CARPA est soumis à l’action en rapport dès lors qu’il a été effectué en période suspecte au moyen de fonds déposés sur un sous-compte ouvert au nom du débiteur à la CARPA et que son bénéficiaire avait connaissance de l’état de cessation des paiements de ce dernier.

La rareté des décisions en matière d’action en rapport confère un intérêt particulier à l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 24 mai 2023 (Com. 24 mai 2023, n° 21-21.424 P, D. 2023. 1005 ).

Dans l’affaire soumise à l’examen de la Haute Cour, une société avait confié à une autre la construction d’une centrale photovoltaïque. Un différend étant survenu, la société donneuse d’ordre a pratiqué diverses saisies-attributions afin d’appréhender l’indemnité lui étant due par l’assureur de la société prestataire. Des fonds ont ainsi été déposés à son profit sur le compte de son avocat ouvert à la Caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA), et ce dernier, après avoir fait signer à sa cliente une autorisation de paiement, reçut un chèque, émis par la Caisse, de 199 034 euros en règlement de ses honoraires. La société donneuse d’ordre ayant été ultérieurement placée en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire, l’administrateur judiciaire, puis le liquidateur judiciaire, ont demandé l’annulation du paiement reçu par son avocat sur le fondement de l’action en rapport prévu à l’article L. 632-3 du code de commerce. L’avocat s’opposa à cette action au motif qu’un paiement par chèque ne peut être attaqué par la voie d’une action en rapport que s’il a été fait par le débiteur en état de cessation des paiements avant l’ouverture de la procédure collective, ce qui suppose, en cas de chèque émis par un tiers, que le débiteur lui ait préalablement versé la contrepartie nécessaire à ce paiement. Approuvant la décision d’appel, la Cour de cassation, dans son arrêt du 24 mai 2023, rejeta le pourvoi du conseil.

Selon elle, le paiement litigieux a été effectué par un chèque émis au moyen de fonds déposés sur un sous-compte ouvert à la CARPA au nom de la société donneuse d’ordre et après autorisation de celle-ci. Ces fonds, propriété de la société, ont bien constitué la contrepartie ayant permis l’émission par la CARPA du chèque en règlement des honoraires de l’avocat, alors que ce dernier connaissait l’état de cessation des paiements de sa cliente. Un tel paiement peut, par conséquent, être soumis à l’action en rapport.

Applicabilité de l’action en rapport à l’égard d’un chèque CARPA

En énonçant que « les dispositions des articles L. 632-1 et L. 632-2 du code de commerce ne portent pas atteinte à la validité du paiement d’une lettre de change, d’un billet à ordre ou d’un chèque », l’alinéa 1er de l’article L. 632-3 du code de commerce représente une dérogation au domaine des nullités de la période suspecte.

Toutefois, l’alinéa second du même texte pose une exception applicable, notamment en cas de paiement par chèque : la démonstration de la connaissance de l’état de cessation des paiements du créancier bénéficiaire d’un chèque peut permettre l’annulation du paiement effectué par le débiteur au moyen d’une action en rapport exercée par le mandataire ou l’administrateur judiciaire. Une question a alors été de savoir si cette action est susceptible de s’appliquer au paiement par chèque effectué par un tiers et non directement par le débiteur.

Pendant longtemps, la jurisprudence s’y opposa en matière de chèque de banque (Com. 23 juin 1992, n° 90-15.620 ; 14 mars 2000, n° 97-15.136 P, D. 2000. 186 , obs. A. Lienhard ; RTD com. 2000. 418, obs. M. Cabrillac ) au motif que « l’action en rapport ne peut être exercée dans la mesure où le chèque n’a pas été émis par le débiteur » (Com. 14...

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