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Recours d’un usager contre l’avenant à une concession d’autoroute et ses actes d’approbation

À l’occasion de la hausse du tarif de péage dans le cadre de la réalisation du « contournement ouest de Montpellier », le Conseil d’État rappelle les voies de recours ouvertes au tiers à un contrat, en excès de pouvoir et en plein contentieux.

par Nathalie Mariappa, juristele 7 février 2023

L’État a conclu une convention, le 10 janvier 1992, avec la société Autoroutes du Sud de la France (ASF), filiale de VINCI Autoroutes, en vue de concéder la construction, l’entretien et l’exploitation d’autoroutes. Le Premier ministre, par un décret du 28 janvier 2022, a approuvé le dix-huitième avenant à cette convention, ayant pour objet la réalisation d’un tronçon permettant le contournement par l’ouest de Montpellier et reliant les autoroutes A 750 et A 709.

Cette opération est financée par une majoration annuelle des tarifs hors taxe de péage applicable aux véhicules de la classe I de 0,264 % pour les exercices 2023 à 2026, alors même que le cahier des charges annexé au contrat de concession indique que le contournement ouest de Montpellier est libre de péage.

Un tiers a formé, d’une part, un recours en annulation du décret du 28 janvier 2022 et de la clause modifiée du cahier des charges qui tient compte de la hausse tarifaire et, d’autre part, un recours en contestation de la validité de l’avenant.

À cette occasion, le Conseil d’État rappelle les différentes voies de recours offertes au tiers à un contrat : le recours pour excès de pouvoir contre les clauses règlementaires d’un contrat, le recours de pleine juridiction en contestation de la validité d’un contrat ou de ses clauses non règlementaires, et le recours pour excès de pouvoir contre les actes d’approbation d’un contrat. Marc Pichon de Vendeuil, dans ses conclusions sur cet arrêt, précise d’emblée que « ces trois recours ne sont ni fongibles ni substituables : cela découle tant de leur objet et de leur régime contentieux que du principe plus général selon lequel il ne doit pas y avoir de recours parallèles ».

L’usager du réseau autoroutier a un intérêt à agir pour solliciter l’annulation d’une clause réglementaire augmentant le tarif de péage

Pour écarter la fin de non-recevoir opposée en défense, le Conseil d’État indique très clairement que la clause tarifaire de l’avenant litigieux, divisible des autres clauses, a un caractère réglementaire, de sorte qu’elle puisse être contestée par la voie d’un recours pour excès de pouvoir (CE, ass., 10 juill. 1996, n° 138536, Cayzeele, Lebon ; AJDA 1996. 807 ; ibid. 732, chron. D. Chauvaux et T.-X. Girardot ; RFDA 1997. 89, note P. Delvolvé ). Par ailleurs, ces conclusions sont d’autant plus recevables que le tiers justifie d’un intérêt direct et certain tiré de sa qualité d’usager du réseau autoroutier qui a été concédé à la société ASF.

En ce qui concerne les tarifs de péage, l’article L. 122-4 du code de la voirie routière, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que « L’usage des autoroutes est en principe gratuit. / Toutefois, il peut être institué par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Autorité de régulation des transports, un péage pour l’usage d’une autoroute en vue d’assurer la couverture totale ou partielle des dépenses de toute nature liées à la construction, à l’exploitation, à l’entretien, à l’aménagement ou à l’extension de l’infrastructure (…) ».

Le même article précise que « des ouvrages ou des aménagements non prévus au cahier des charges de la concession peuvent être intégrés à l’assiette de celle-ci, sous condition stricte de leur nécessité ou de leur utilité, impliquant l’amélioration du service autoroutier sur le périmètre concédé, une meilleure articulation avec les réseaux situés au droit de la concession afin de sécuriser et fluidifier les flux de trafic depuis et vers les réseaux adjacents à la concession et une connexion renforcée avec les ouvrages permettant de desservir les territoires, ainsi que de leur caractère accessoire par rapport au réseau concédé ». Le financement de ces ouvrages ou de ces aménagements ne peut se faire que via l’augmentation « raisonnable et strictement limitée à ce qui est nécessaire » des tarifs de péage.

La Haute juridiction relève que la hausse tarifaire concerne l’ensemble du réseau autoroutier, tandis qu’elle sert uniquement à financer les travaux du contournement ouest de Montpellier, dépourvu de péage. Par conséquent, cette hausse « méconnaît la règle de proportionnalité entre le montant du tarif et la valeur du service rendu » (v. sur ce point, CE 28 nov. 2018, n° 413839, Dalloz...

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