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Réforme de la justice des mineurs : la Chancellerie lance une consultation de trois mois
Réforme de la justice des mineurs : la Chancellerie lance une consultation de trois mois
La ministre de la Justice a officialisé le 25 février dernier le début des « consultations » préalables à la future réforme de la justice des mineurs. Cette phase doit durer trois mois.
par Thomas Coustetle 27 février 2019
« J’ai fait le choix de prendre à bras le corps la question de l’ordonnance de 1945 car il est nécessaire de la rendre lisible et de l’adapter aux exigences d’aujourd’hui », a déclaré Nicole Belloubet le 25 février lors d’un déplacement dans un centre éducatif fermé à Savigny-sur-Orge (91600). Éducateurs, magistrats, avocats spécialisés ou professionnels du secteur associatif étaient venus participer à une table ronde organisée pour l’occasion.
Au-delà d’un toilettage de l’ordonnance de 1945, dont les multiples ajouts législatifs ont compliqué l’application, la garde des Sceaux souhaite faire évoluer le texte. La ministre souhaite « simplifier la procédure pénale pour les mineurs délinquants, accélérer leur jugement et renforcer leur prise en charge ».
« Rien n’est figé à ce stade de la réflexion »
« Rien n’est figé à ce stade de la réflexion », a-t-elle assuré. Cinq grands thèmes sont néanmoins sur la table. Les sanctions, la césure, la prise en compte des victimes, l’âge de la responsabilité pénale et la question des moyens. Nicole Belloubet souhaite notamment réduire le délai moyen de jugement des mineurs – dix-sept mois actuellement –, mais aussi repenser leur prise en charge, dont 78,9 % sont incarcérés en détention provisoire. La ministre a aussi rappelé que « la primauté serait donnée à l’éducatif », et que la réforme s’inscrirait pleinement « dans les principes fondamentaux énoncés par le Conseil constitutionnel ».
Rappelons qu’en 2011, le Conseil constitutionnel interdit qu’un même juge instruise et prononce la peine, ce qui était jusqu’ici une spécificité de la justice des mineurs à visée pédagogique (Cons. const. 8 juill. 2011, n° 2011-147 QPC, D. 2012. 1638, obs. V. Bernaud et N. Jacquinot ; AJ fam. 2011. 435, obs. V. A.-R. ; ibid. 391, point de vue L. Gebler ; AJ pénal 2011. 596, obs. J.-B. Perrier ; RSC 2011. 728, chron. C. Lazerges ; ibid. 2012. 227, obs. B. de Lamy ; RTD civ. 2011. 756, obs. J. Hauser ). Certains ont alors formé des binômes de magistrats (l’un instruit, l’autre juge), d’autres instruisent et jugent (mais font signer l’ordonnance de renvoi par un autre juge) et d’autres font siéger un juge non spécialisé au tribunal pour enfants (v. Dalloz actualité, 8 févr. 2019, art. P. Januel isset(node/194588) ? node/194588 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>194588).
L’une des pistes envisagées est la mise en place d’une césure. C’est-à-dire une nouvelle procédure sans distinction entre phase d’instruction et phase de jugement : une première audience se prononcerait sur la culpabilité du mineur et l’indemnisation de la victime et une seconde, six mois après au maximum statuerait sur la sanction en tenant compte de l’évolution du mineur. Le délai actuel est de deux ans en moyenne.
Cette piste est privilégiée dans le rapport de Céline Untermaier (PS) et Jean Terlier (LREM) (v. Dalloz actualité, 8 févr. 2019, art. préc). Lucile Rouet, juge des enfants en disponibilité, n’y est pas opposée mais reste sceptique. Cette professionnelle estime que la mesure permettrait de mettre fin à la dichotomie existante entre d’un côté, le juge qui tranche et de l’autre celui qui enquête. Mais le délai de six mois posé dans le rapport n’est pas « réaliste », compte tenu du « manque de moyens ».
« À Bobigny ou à Saint-Ouen, le délai d’exécution des décisions est de six à huit mois »
« Le prisme de la rapidité ne peut résoudre à lui seul les problèmes posés par les situations souvent complexes dont ont à connaître les juges », affirme-t-elle. « Prenez un mineur déferré pour des faits sexuels qu’il conteste. Le délai de six mois est bien trop court, surtout en cas de déferrement, pour mettre en place le travail de reconnaissance des faits nécessaires, voire celui de la preuve des préjudices que devra faire la victime ».
Partant, le déferrement ne doit pas devenir la voie classique, « à l’image de ce qu’est devenu la comparution immédiate », met-elle en garde. « Ce délai contraint le juge. Il devrait être aidé par plus de souplesse et non pas avec un calendrier imposé ».
Selon cette professionnelle, l’idée de lisser certaines sanctions, comme revoir l’admonestation, mérite d’être étudiée, mais pas pour aller vers toujours plus de répression. « Il ne faut pas perdre de vue que l’ordonnance de 1945 pose comme principe qu’un mineur délinquant est un mineur en danger. Les mesures éducatives sont donc primordiales dans la réponse judiciaire. Le risque est de privilégier le prononcé de peines en cabinet, c’est-à-dire sans présence du parquet, alors même qu’il faudrait mettre l’accent sur les mesures éducatives, souvent laissées sans exécution faute de moyens », déplore-t-elle.
À Bobigny ou à Saint-Ouen, par exemple, le délai d’exécution des décisions est de six à huit mois après l’ordonnance du juge des enfants. Pendant, ce temps, rien ne se passe. Or sur ce point, le ministère répond que la question de l’exécution relève du secrétariat de la protection de l’enfance. On a donc le sentiment que ce volet sera laissé de côté par la réforme à venir ».
La Chancellerie a pour ambition de présenter un projet de code pénal de l’enfance délinquante à l’automne.
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