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Le refus d’aménagement de peine n’appelle pas de motivation spéciale

Si l’octroi d’une conversion de peine doit être justifié par référence à l’existence des critères de réinsertion du condamné ou de prévention de sa récidive, son refus n’est pas soumis à une obligation spéciale de motivation faisant référence à ces critères particuliers.

par Margaux Dominatile 21 mai 2021

Depuis la loi de programmation n° 2019-222 du 23 mars 2019, le droit de la peine, et plus spécifiquement encore le droit des aménagements de peine, a connu de profondes réformations. Force est de constater que cette réforme a soulevé une multitude d’interrogations, la doctrine s’étant attachée évidemment à y répondre, mais aussi à mettre en lumière les carences que présentait la loi nouvelle (v. J. Pradel, Des dispositions de la loi du 23 mars 2019 sur le renforcement de l’efficacité et du sens de la peine : texte fondateur ou texte d’ajustement ?, D. 2019. 1002  ; P. Poncela, Errements et sauts sans le vide, RSC 2020. 137  ; J.-B. Perrier, La réforme du droit de la peine : tout changer pour que rien ne change, RSC 2019. 449  ; v. égal. B. Lavielle, Le juge correctionnel au bout de ses peines ?, AJ pénal 2020. 150 ).

Quoi que l’on en dise, une des grandes lignes tracées par le législateur du 23 mars 2019 (et qui avait été largement relevée par la doctrine) concernait le renforcement du caractère subsidiaire de l’emprisonnement, qui se traduisait notamment au stade du prononcé par la modification des articles 132-19 et 132-25 du code pénal (v. L. Griffon-Yarza, Les nouvelles modalités du prononcé des peines d’emprisonnement ferme : un carcan législatif doublé d’un nouvel oxymoron juridique, AJ pénal 2019. 375 ). Il était alors question, d’une part, d’intégrer l’exigence de motivation spéciale dans le code de procédure pénale (C. pr. pén., art. 464-2), et de créer de nouveaux paliers pour contraindre ou permettre à la juridiction de jugement d’aménager ab initio les peines d’emprisonnement ferme en fonction de leur quantum. Bref, les juridictions de jugement se sont vu octroyer de plus amples prérogatives afin d’aménager les peines d’emprisonnement sans sursis dès le stade du prononcé, mais sont désormais contraintes de motiver strictement leurs décisions lorsqu’elles n’accordent pas une telle mesure (v. J. Goldszlagier, La révolution des peines n’aura pas lieu, AJ pénal 2018. 234 ). À la suite de cette réforme, la Cour de cassation était par ailleurs intervenue en faveur de la non-rétroactivité du nouveau seuil d’aménagement ab initio des peines d’emprisonnement (Crim. 20 oct. 2020, n° 19-84.754, Dalloz actualité, 19 nov. 2020, obs. J. Gallois ; D. 2020. 2379 , note S. Pellé ; ibid. 2367, obs. G. Roujou de Boubée, C. Ginestet, M.-H. Gozzi, S. Mirabail et E. Tricoire ; AJ pénal 2020. 514, note M. H-Evans ; JCP 2020, n° 6, 150, note M. Giacopelli ; Dr. pénal 2020, n° 219, obs. E. Bonis ; v. contra X. Pin, Application de la loi pénale dans le temps : l’aménagement des peines ab initio relève du régime des lois de forme… ou de l’art de la contorsion, Lexbase, éd. pénal, n° 33, 17 déc. 2020). Elle avait également profité de cette occasion pour apporter de plus amples précisions sur le contenu de la motivation attendue par les juridictions de jugement qui refusaient d’accorder un aménagement de peine (v. E. Bonis et V. Peltier, Un an de droit de la peine [Janvier 2020-Janvier 2021], Dr. pénal 2021, n° 3, chron. 3 ; Crim. 9 avr. 2019, n° 18-83.874, Dalloz actualité, 17 avr. 2019, obs. D. Goetz ;  D. 2019. 762 ; ibid. 1626, obs. J. Pradel ; AJ pénal 2019. 403, obs. M. H-Evans ; 10 avr. 2019, n° 18-83.709, Dalloz actualité, 2 mai 2019, obs. S. Fucini ; D. 2019. 764 ; ibid. 2320, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé, C. Ginestet, M.-H. Gozzi, S. Mirabail et E. Tricoire ; AJ pénal 2019. 443, obs. L. Grégoire  ; Dr. pénal 2019. Comm. 119, obs. E. Bonis).

Tant s’en faut, les juridictions de l’application des peines n’ont pas été oubliées par cette réforme. D’abord au travers de la modification de l’article 723-15 du code de procédure pénale, fer de lance de l’action du juge de l’application des peines avant la mise à exécution, qui a notamment vu son seuil d’applicabilité réduit aux peines inférieures ou égales à un an d’emprisonnement, sans distinction entre les récidivistes et les primodélinquants. Ensuite, par la quasi-automatisation de la procédure de libération sous contrainte (v. J. Frinchaboy, Le sens et l’efficacité des peines dans la...

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