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Refus de réparation d’un préjudice éventuel

Doit être censuré l’arrêt qui, pour condamner l’ex-concubine à verser des dommages et intérêts au titre de l’inexécution d’une convention organisant le remboursement d’un emprunt souscrit pour financer la maison, n’a pas caractérisé un préjudice.

par Ariane Gailliardle 5 avril 2017

Des concubins avaient fait édifier en 2004 une maison sur un terrain appartenant à la seule concubine. La construction de la maison avait été financée par divers emprunts, parmi lesquels un emprunt souscrit en 2012 pour l’achat de panneaux photovoltaïques. Après la séparation du couple, la propriétaire avait vendu la maison et s’était vue assigner par son ex-compagnon en remboursement des échéances des prêts souscrits pour l’édification de la maison et en paiement de sommes au titre de l’inexécution de la convention de 2012. La cour d’appel condamna la propriétaire au paiement de deux sommes, l’une sur le fondement de l’article 555 du code civil, l’autre au titre de l’inexécution de la convention de 2012, sur les fondements des anciens articles 1134 et 1147 du code civil. Deux fondements qui conduisaient la concubine, au soutien de son pourvoi, à avancer deux arguments bien distincts.

L’application de l’article 555 du code civil aux concubins

La cour d’appel avait appliqué l’article 555 du code civil afin d’indemniser le concubin. Ce fondement est utilisé lorsque le couple n’est ni marié ni pacsé ; il s’agit, en quelque sorte, du droit commun du couple réglementant les conséquences patrimoniales de leur vie commune en cas de construction ou de participation aux frais de la construction d’un ouvrage sur le terrain de l’autre concubin. L’application du droit commun des biens au secours des concubins est constante (Civ. 3e, 2 oct. 2002, n° 01-00.002, AJDI 2002. 803 ; RTD civ. 2003. 271, obs. J. Hauser ; Dr. fam. 2002, n° 141, note M. Farge), alors même que l’article 555 du code civil qualifie le constructeur de « tiers » : les concubins ne sont que des tiers, des célibataires auxquels le droit aménage un régime juridique particulier…

La demanderesse ne discutait pas le champ d’application de l’article mais plutôt les conditions de l’indemnisation. Elle soutenait d’abord qu’il fallait une participation exclusive à la construction de l’ouvrage sur le terrain d’autrui ; un tel moyen ne pouvait qu’être rejeté. Un financement partiel, et non exclusif, n’a pas d’incidence sur l’applicabilité de l’article 555 du code civil, mais sur le montant de l’indemnisation allouée, qui sera plus faible. La troisième chambre civile retient ainsi que « l’indemnisation de celui qui a concouru à la construction d’un ouvrage sur le terrain d’autrui, telle que visée par ce texte, n’est pas subordonnée au caractère exclusif de sa participation ». Ce que vient récompenser, en quelque sorte, l’article 555 est la « main-d’œuvre », expression employée par l’article, de celui qui a construit ou financé la construction sur un terrain auquel il n’avait pas droit. La Cour de cassation avait d’ailleurs déjà rappelé que « le droit à indemnisation du tiers évincé n’est pas attaché à la propriété d’un fonds mais à la personne » ayant construit ou planté (Civ. 3e, 13 mai 2015, n° 13-26.680, Dalloz actualité, 5 juin 2015, obs. N....

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