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Le régime d’assurance CatNat : un colosse aux pieds d’argile
Le régime d’assurance CatNat : un colosse aux pieds d’argile
L’ordonnance du 8 février 2023 apporte des modifications substantielles à l’assurance contre les catastrophes naturelles (CatNat) afin de renforcer la prise en charge des sinistres causés par le phénomène naturel de retrait-gonflement des sols argileux (RGA). Il n’est pas certain que cet apport suffise à réparer les brèches constatées dans l’édifice juridique, lequel pourrait très prochainement s’effondrer au regard de la multiplication à venir des épisodes de sécheresse à laquelle le dérèglement climatique nous condamne.
par Julien Delayen, Membre du CEPRISCA, Enseignant-chercheur, UPJVle 7 mars 2023
L’article 161 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (loi dite « 3DS ») avait habilité le gouvernement à adopter par voie d’ordonnance, d’ici au 21 février 2023, « toute mesure relevant du domaine de la loi afin d’améliorer la prise en charge des conséquences exceptionnellement graves sur le bâti et sur les conditions matérielles d’existence des assurés des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols ». Il s’agissait notamment d’adapter « aux spécificités de ce phénomène naturel les conditions de prise en compte au titre du régime des catastrophes naturelles et d’indemnisation prévues aux articles L. 125-1 à L. 125-6 du code des assurances » (régime d’assurance dit « CatNat » ; art. 161, 1°). Le gouvernement vient justement de rendre sa copie en adoptant l’ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 et le moins que l’on puisse dire est que ce texte ne pouvait pas mieux tomber. Au moment de la rédaction de ces lignes, la France est, en effet, en passe de battre le record de la plus longue période sans pluie significative depuis le début des relevés pluviométriques (le précédent record est de trente et un jours sur la période de mars à avril 2020). Elle est en passe également de battre le record de la plus faible quantité de précipitation tombée (2,4 mm de précipitation au lieu des 36 mm en moyenne sur la même période). Cela devrait logiquement conduire à un nouvel épisode d’ampleur de ce « phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols » qui constitue l’objet de l’ordonnance précitée.
Ce phénomène dit de retrait-gonflement des sols argileux (RGA) repose sur un mécanisme très simple à décrire (v. pour une infographie éclairante, Cour des comptes, Sols argileux et catastrophes naturelles, Rapport, févr. 2022, p. 16). Lors d’une période de sécheresse, les sols argileux se rétractent puis, lorsque la pluie fait son retour, la réhydratation des sols conduit au gonflement de ces derniers. Ce mouvement de terrain produit un risque important de fissuration voire d’effondrement des immeubles d’habitation, en particulier des maisons individuelles (ibid., « Les constructions les plus vulnérables sont les maisons individuelles dont la structure légère et peu rigide et les fondations, souvent superficielles par rapport à celles des immeubles collectifs, ne peuvent supporter les distorsions générées par le mouvement du terrain »). Certes, il s’agit là d’« un phénomène peu spectaculaire » mais il est « à l’origine de dégâts...
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Auteur(s) : Louis Perdrix; Céline Vivien