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Reporting extra-financier et CSRD : quand la RSE (re)mobilise la lutte contre la corruption

Le 16 octobre 2024, l’Agence française anticorruption (AFA) a mis en ligne un document intitulé « Mettre en œuvre les indicateurs anticorruption de la directive CSRD » (Corporate Sustainability Reporting Directive), illustration supplémentaire de l’imbrication croissante entre lutte contre la corruption et responsabilité sociétale des entreprises (RSE). 

La lutte contre la corruption, composante de la RSE

Si leurs dispositifs légaux ont été bâtis séparément et bien que leurs objectifs soient différents – l’anticorruption a pour but d’éviter ou réprimer la survenance d’infractions pénales, la RSE vise à améliorer les impacts de l’entreprise, par des actions volontaires de cette dernière –, la RSE et la lutte contre la corruption se rapprochent de plus en plus.

D’une part, car l’anticorruption est intimement liée à la question transversale de la gouvernance, pilier de la RSE (critères ESG) : l’anticorruption permet d’éviter des pratiques (et survenance de risques) contraires à la RSE. En ce sens, l’anticorruption est au service de la RSE, et a minima, une politique RSE en France inclue le dispositif Sapin 2 comme élément de conformité. C’est ce qui ressort d’ailleurs du portail RSE développé par le ministère de l’Économie et des finances, lequel considère que la RSE comporte un volet anticorruption constitué du dispositif de la loi du 9 décembre 2016, dite « Sapin 2 ».

D’autre part, et de manière plus concrète, la lutte contre la corruption et la RSE ont des points communs. Tout d’abord sur les approches : la réglementation de la RSE, de plus en plus contrainte et encadrée par des textes (du soft law au hard law), ressemble de plus en plus à la conformité, tandis que la compliance s’élargit à de nouveaux domaines que la lutte contre la corruption et le blanchiment. Ensuite, sur les méthodes mises en place : cartographies des risques, codes de conduite et plans de prévention, évaluation des tiers et lignes d’alerte.

Cette complémentarité est d’ailleurs largement reprise et explicitée dans une infographie de l’OCDE publiée le 9 octobre 2024, explicitant en quoi la conduite responsable des entreprises (la RSE) améliore les politiques de compliance des entreprises.

Cette imbrication presque naturelle se retrouve donc assez logiquement dans plusieurs textes majeurs réglementant la RSE :

  • la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance comportait dans sa version initiale (proposition de loi puis discussions au Parlement) de nombreuses références à l’anticorruption (mais l’avancée en parallèle des travaux sur la future loi Sapin 2 a abouti à leur suppression en fin de travaux parlementaires) ;
  • les principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sur la conduite responsable des entreprises, initialement adoptés en 2011, consacrent un chapitre relatif à la lutte contre la corruption, largement renforcé par la mise à jour de ces principes en 2023 ;
  • le pacte mondial des Nations unies comporte un 10e principe intitulé « Agir contre la corruption sous toutes ses formes, y compris l’extorsion de fonds et les pots-de-vin » ; à ce titre, il incite les entreprises à introduire en leur sein des politiques anticorruption, à en rendre compte dans leur communication annuelle ;
  • les deux « grandes » directives de l’Union européenne en matière de RSE, adoptées ces deux dernières années (Dir. dite « CSRD » sur le reporting extra-financier, et dir. dite « CS3D » sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité) font des références explicites à l’anticorruption, comme composante des obligations des entreprises.

L’application de la CSRD (notamment l’aspect anticorruption) à des acteurs non-assujettis à la loi Sapin...

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