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Responsabilité de Pôle emploi pour suivi insuffisant des chômeurs

Un traité international ne peut être invoqué dans le cadre d’une action indemnitaire que s’il remplit les conditions pour être directement applicable dans l’ordre interne.

par Marie-Christine de Monteclerle 11 janvier 2019

Dans un arrêt du 28 décembre, le Conseil d’État indique dans quelles conditions les carences de Pôle emploi dans l’exercice de ses missions d’accompagnement des demandeurs d’emploi sont susceptibles d’engager sa responsabilité.

Il était saisi par M. A… d’un pourvoi contre un arrêt de la cour administrative d’appel de Paris confirmant le rejet de sa demande indemnitaire à l’encontre de Pôle emploi. Il en prononce l’annulation en estimant qu’une telle demande « relève des litiges relatifs aux prestations dont bénéficient les travailleurs privés d’emploi, au sens de l’article R. 811-1 du code de justice administrative ». Le tribunal administratif a donc statué en premier et dernier ressort et la cour administrative d’appel aurait dû se déclarer incompétente.

M. A… invoquait, pour démontrer la faute de Pôle emploi, les stipulations du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de la charte sociale européenne. Le Conseil d’État considère que « si tout traité ou accord en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi, ses stipulations ne peuvent toutefois être utilement invoquées à l’appui d’une demande tendant à la mise en cause de la responsabilité de l’administration que si ce traité ou cet accord remplit les conditions posées à son application dans l’ordre juridique interne par l’article 55 de la Constitution et crée des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir ». C’est donc à bon droit que le tribunal a écarté les moyens tirés de ces stipulations.

Sur le fond, le Conseil d’État estime « qu’il incombe à Pôle emploi, au titre de ses missions de placement et d’accompagnement des demandeurs d’emploi par lesquelles il contribue au service public de l’emploi, de mettre en œuvre un accompagnement personnalisé de chaque demandeur d’emploi pour l’aider à retrouver un emploi, précisé au moyen du projet personnalisé d’accès à l’emploi, en tenant compte de ses besoins, déterminés notamment en fonction de sa formation et de son expérience professionnelle, de l’autonomie dont il dispose dans sa recherche et de la durée qui s’est écoulée depuis son dernier emploi, ainsi que des demandes qu’il exprime. Les carences de Pôle emploi, dans l’exercice de ces missions, sont susceptibles de constituer des fautes de nature à engager sa responsabilité. Il appartient toutefois au juge saisi d’une demande d’indemnisation du préjudice qu’un demandeur d’emploi soutient avoir subi du fait de ces défaillances de tenir compte, le cas échéant, du comportement de l’intéressé et, en particulier, de la manière dont il a lui-même satisfait aux obligations qui lui incombent ».

En l’espèce, la haute juridiction constate que Pôle emploi a manqué à ses obligations de suivi de M. A…, et notamment de mise à jour du projet de personnalisé d’accès à l’emploi. Mais le chômeur, pour sa part, a omis de procéder à l’actualisation mensuelle de son inscription et n’a pas sollicité son conseiller. Par conséquent, le tribunal n’a pas commis d’erreur de qualification juridique en jugeant que le préjudice de perte de chance de retrouver un emploi n’était pas la conséquence directe du manquement de Pôle emploi.