- Administratif
- Toute la matière
- > Acte
- > Bien
- > Collectivité territoriale
- > Compétence
- > Contrat et marché
- > Droit économique
- > Droit fondamental et liberté publique
- > Environnement
- > Finance et fiscalité
- > Fonction publique
- > Police
- > Pouvoir public
- > Procédure contentieuse
- > Responsabilité
- > Service public
- > Urbanisme
- Affaires
- Civil
- Toute la matière
- > Arbitrage - Médiation - Conciliation
- > Bien - Propriété
- > Contrat et obligations
- > Droit et liberté fondamentaux
- > Droit international et communautaire
- > Famille - Personne
- > Loi et traité
- > Mariage - Divorce - Couple
- > Procédure civile
- > Profession juridique et judiciaire
- > Responsabilité
- > Succession - Libéralité
- > Sûretés
- > Voie d'exécution
- Européen
- Toute la matière
- > Bien - Propriété
- > Contrat et obligations - Responsabilité
- > Convention - Traité - Acte
- > Droit économique
- > Droit public
- > Environnement - Agriculture
- > Famille - Personne
- > Marché intérieur - Politique communautaire
- > Pénal
- > Principes - Généralités
- > Procédure
- > Propriété intellectuelle
- Immobilier
- IP/IT et Communication
- Pénal
- Toute la matière
- > Atteinte à l'autorité de l'état
- > Atteinte à la personne
- > Atteinte aux biens
- > Circulation et transport
- > Criminalité organisée et terrorisme
- > Droit pénal des affaires
- > Droit pénal général
- > Droit pénal international
- > Droit social
- > Enquête
- > Environnement et urbanisme
- > Etranger
- > Instruction
- > Jugement
- > Mineur
- > Peine et exécution des peines
- > Presse et communication
- > Propriété intellectuelle
- Social
- Toute la matière
- > Accident, maladie et maternité
- > Chômage et emploi
- > Contrat de travail
- > Contrôle et contentieux
- > Droit de la sécurité sociale
- > Hygiène - Sécurité - Conditions de travail
- > IRP et syndicat professionnel
- > Négociation collective
- > Protection sociale
- > Retraite
- > Rupture du contrat de travail
- > Temps de travail
- Avocat
Article

Revendication du fragment à l’Aigle de la cathédrale de Chartres
Revendication du fragment à l’Aigle de la cathédrale de Chartres
La protection du domaine public mobilier impose qu’il soit dérogé à la règle selon laquelle en fait de meubles, la possession vaut titre. L’ingérence que constituent l’inaliénabilité du bien et l’imprescriptibilité de l’action en revendication à l’égard du possesseur de bonne foi poursuit un but légitime relevant de l’intérêt général de telle sorte que la condamnation du possesseur à restituer le bien litigieux ne saurait être disproportionnée.
par Nicolas Le Rudulierle 1 mars 2019

La décision rapportée constitue l’épilogue, au moins au niveau national, d’une affaire qui trouve son origine à la fin du XVIIIe siècle, lorsqu’un fragment du jubé de la cathédrale de Chartres – dit fragment à l’Aigle – fut démantelé et utilisé pour refaire le pavement de l’édifice. Vraisemblablement excavée en 1848, cette œuvre fut acquise par des particuliers pour se retrouver finalement entre les mains d’un galeriste d’art. Face au refus d’accorder le certificat d’exportation sollicité, le galeriste entama une négociation avec les services de l’État dont le prix d’acquisition proposé fut jugé insatisfaisant. L’affaire aurait pu en rester là si ce n’est qu’après avoir proposé un million d’euros pour d’acheter l’œuvre, l’État décida finalement d’intenter une action en revendication.
Depuis le décret de l’Assemblée constituante du 2 novembre 1789, « les biens ecclésiastiques sont à la disposition de la nation ». Ces biens nationaux relevaient donc en 1848 de la propriété publique dès lors soumise aux dispositions du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P).
Aux termes de l’article L. 3111-1 du CG3P, les biens des personnes publiques qui relèvent du domaine public sont inaliénables et imprescriptibles. L’application de cette disposition permet de faire échec à la mutation des droits portant sur les biens présentant notamment un intérêt public du point de vue de l’histoire, de l’art ou encore de l’archéologie. Toutefois, aux termes du premier alinéa de l’article 2276 du code civil, « en fait de meubles, la possession vaut titre ». Si le texte n’est qu’une règle de preuve lorsque le bien a été reçu du véritable propriétaire, il emporte transfert du droit de propriété en présence d’une acquisition a non domino. Dès lors, le galeriste d’art reprochait à la cour d’appel d’avoir écarté cette acquisition de bonne foi au profit des règles d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité du domaine public.
Préalablement à l’examen du présent pourvoi, la Cour de cassation avait transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant justement sur l’articulation de ces différentes dispositions. Il était argué de l’atteinte aux articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen en ce que l’accueil de l’action en revendication rendue possible par les dispositions du CG3P porterait atteinte à la garantie des droits acquis. Sauf que, précisément, le Conseil constitutionnel souligne que l’objet de l’inaliénabilité est de faire échec à l’acquisition d’un droit et qu’en conséquence, l’action n’a pas pour objet de priver l’actuel possesseur d’une prérogative qui n’a jamais pu être la sienne mais de confirmer le véritable propriétaire dans ses droits (Cons. const. 26 oct. 2018, n° 2018-749 QPC, AJDA 2018. 2103, obs. E. Maupin ; D. 2018. 2094
; JCP A janv. 2019, n° 2, obs. P.S. Hansen ; Rev. CMP 2019. Comm. 21, obs. P. Soler Couteaux ; v. également RFDA 2018. 1057, obs. J.-F. Giacuzzo
).
Reprenant ce raisonnement, la Cour de cassation ajoute que la mise en échec du mécanisme de l’article 2276 du code civil par l’article L. 3111-1 du CG3P résulte de « dispositions législatives [qui] présentent l’accessibilité, la clarté et la prévisibilité requise par la Convention [européenne des droits de l’homme] ». Ainsi, pour le juge du droit, il n’y a pas d’atteinte à la sécurité juridique et aux droits acquis puisque la dérogation critiquée se fonde sur une technique juridique parfaitement intelligible et au demeurant acquise de longue date. Il en résulte pour la première chambre civile que « l’espérance légitime » (notion renvoyant directement à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme) de conserver le bien peut en l’espèce être écartée.
L’ingérence à laquelle conduit le principe d’inaliénabilité poursuit un but légitime de préservation de l’intégrité du domaine public relevant de l’intérêt général qui pour la haute juridiction de l’ordre judiciaire ne saurait être disproportionné.
Le pourvoi doit donc être rejeté dès lors, d’une part, qu’aucun droit de propriété n’est remis en cause puisqu’aucun n’a pu être constitué et, d’autre part, que cette opposition à la prescription acquisitive est ici justifiée par l’intérêt général.
Sur le même thème
-
Une évaluation environnementale ne peut pas être conditionnée à la taille d’un projet d’aménagement urbain
-
Certification des futurs rapports de durabilité : la profession d’avocat souhaite « être entendue »
-
Le bâtonnement à l’épreuve de la Cour européenne des droits de l’homme
-
Les blocages parlementaires limitent le nombre de nouvelles lois
-
Prohibition du renouvellement automatique des concessions d’occupation du domaine public maritime
-
Une convention de PUP est un contrat administratif dont la validité peut être contestée via un recours « Tarn-et-Garonne »
-
Censure de l’usage de l’écriture dite « inclusive » à l’université
-
Crise de l’immobilier : lettre ouverte au président de la République
-
Panorama rapide de l’actualité « Santé » des semaines des 1er, 8 et 15 mai 2023
-
Prédication porte-à-porte et protection des données personnelles : après la CJUE, la CEDH tranche le débat
Commentaires
La protection du domaine public doit être l'objet de la vigilance des pouvoirs publics. On l'aimerait tous... Ce n'est hélas pas ce que les professionnels s’attellent toujours à démontrer.
D’après historien de l’art Didier Rykner, auteur du Jubé de Chartres : des hypothèses sont-elles des preuves ? paru dans La Tribune de l’art, les preuves apportées par l’expert judiciaire afin de déterminer si le fragment de l’aigle devait être restitué à l’Etat ne sont pas solides. Comme le rappelle MArc-Arthur Kohn, Rykner, dans son article préfère même parler d’hypothèses. Toute le dossier est suspendu à une question : le fragment a-t-il été sorti de la cathédrale avant ou après que l’entrée en vigueur (1789 ou 1805 selon les interprétations) d’une loi sur l’inaliénabilité des œuvres ? D’après l’auteur, les preuves exploitées par l’expert sont celles qui servent les revendications de l’Etat français, tandis que certaines autres auraient été délaissée malgré leur intérêt pour la résolution de l’affaire.
Merci à Nicolas le Rudulier pour la qualité de son article.
D’après l’historien de l’art Didier Rykner, auteur du Jubé de Chartres : des hypothèses sont-elles des preuves ? paru dans La Tribune de l’art, les preuves apportées par l’expert judiciaire afin de déterminer si le fragment de l’aigle devait être restitué à l’Etat ne sont pas solides. Comme le rappelle MArc-Arthur Kohn, Rykner, dans son article préfère même parler d’hypothèses. Toute le dossier est suspendu à une question : le fragment a-t-il été sorti de la cathédrale avant ou après que l’entrée en vigueur (1789 ou 1805 selon les interprétations) d’une loi sur l’inaliénabilité des œuvres ? D’après l’auteur, les preuves exploitées par l’expert sont celles qui servent les revendications de l’Etat français, tandis que certaines autres auraient été délaissée malgré leur intérêt pour la résolution de l’affaire.