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Secret médical et assurances : point de secret partagé entre médecin-conseil et expert judiciaire

Le Conseil d’État rappelle que les informations couvertes par le secret médical ne peuvent être échangées qu’entre médecins participant à la même prise en charge médicale. Un médecin-conseil d’assurance ne peut dès lors, sans encourir de sanction disciplinaire, remettre à l’expert judiciaire un document médical malgré l’opposition de l’intéressé.

« Le secret médical n’est pas le secret des membres du club » : tel semble être le message adressé par le Conseil d’État, après la chambre criminelle de la Cour de cassation, dans son arrêt du 15 novembre 2022.

En l’espèce, une personne est victime d’un accident de la circulation. Une expertise amiable est diligentée par son assureur et communiquée à l’assureur de l’autre conducteur, qui la remet à son médecin-conseil. La tentative de règlement amiable n’ayant pas abouti, la victime saisit le juge des référés. Celui-ci ordonne une expertise judiciaire, précisant que l’expert a notamment pour mission de se faire délivrer tout document utile mais aussi que « la communication de toute pièce médicale à un tiers [est] subordonnée à l’accord de la personne concernée ». Le médecin-conseil de la compagnie d’assurance adverse remet spontanément à l’expert le rapport d’expertise amiable, malgré l’opposition de la victime.

Cette dernière porte plainte devant la chambre disciplinaire de première instance de Rhône-Alpes de l’Ordre des médecins contre le médecin-conseil, pour violation du secret médical. Celui-ci se voit infliger un blâme. Il interjette appel devant la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins, qui annule cette décision et rejette la plainte. Selon cette Juridiction, le secret médical n’est pas enfreint dès lors que l’obligation de respecter le secret médical s’appliquait aux deux médecins et que l’échange de telles données couvertes par le secret médical concourait à la bonne administration de la justice.

Le Conseil d’État, par un arrêt du 15 novembre 2022 (n° 441387, AJDA 2022. 2209 ), casse et annule la décision de la chambre disciplinaire nationale et renvoie l’affaire devant cette dernière.

La seule qualité de médecin ne suffit pas à autoriser l’échange de données

Pour décider ainsi, la Haute Cour se fonde sur les dispositions des articles L. 1110-4 et R. 4127-4 du code de la santé publique instaurant le secret médical, plus particulièrement celles ayant trait au « secret partagé ». Il en résulte tout d’abord que le secret médical couvre l’ensemble des informations venues à la connaissance du médecin concernant une personne, peu importe que celle-ci les lui ait directement confiées ou non. Il en résulte ensuite que deux médecins ne peuvent échanger des informations couvertes par le secret médical que...

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