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Le Sénat maintient sa résistance et rejette l’instauration du délit de non-retrait de contenus haineux

Sans surprise, le Sénat a de nouveau rejeté, le 26 février, lors du vote en deuxième lecture, l’instauration du délit de non-retrait du contenu haineux dans les vingt-quatre heures, objet de l’article 1er, I, de la proposition de loi Avia.

par Amélie Blocmanle 2 mars 2020

Comme il fut souligné lors des débats, « le Sénat n’est pas le seul à alerter sur les inévitables effets pervers de cette disposition. De très nombreux acteurs de la société civile en demandent la suppression : la Commission consultative des droits de l’homme, le Conseil national du numérique, l’ordre des avocats, le rapporteur spécial de l’ONU, et même l’Inter-LGBT… tous nous ont fait part de leurs inquiétudes ». La mesure pourrait « déléguer aux géants américains du numérique la police de la liberté d’expression » souligne la commission des lois dans un communiqué. Le Sénat garde l’objectif d’un retrait en vingt-quatre heures, mais préfère imposer une « obligation de moyens mise à la charge des réseaux sociaux et sanctionnée par le régulateur français : le CSA ».

Les amendements votés en commission au Sénat proposaient par ailleurs de compléter la proposition de loi en créant une obligation de retirer à titre provisoire des contenus signalés, jusqu’à la décision du tribunal judiciaire statuant en référé. Cette disposition n’a pas été adoptée en séance, pas plus que l’intégration des moteurs de recherche dans le champ de la proposition de loi.

Jugé « ni juridiquement utile ni opérant », l’amendement présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain, visant à insérer avant l’article 1er, un article additionnel destiné à exclure explicitement la presse, « au sens de la loi de 1881 », du champ de la proposition de loi, n’a pas plus été adopté.

Un autre amendement voulait rétablir la version préalablement adoptée par le Sénat en première lecture, visant à tarir le financement des sites à caractère haineux par la limitation de la publicité susceptible d’y être diffusée. Les annonceurs devaient tenir à jour les emplacements de diffusion de leurs annonces qui leur sont communiquées par les vendeurs d’espace publicitaire, et ce sous peine de sanction administrative d’un montant minimal de 3 000 €, infligée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). L’Assemblée nationale avait, lors de la dernière lecture, limité l’obligation de transparence aux sites faisant l’objet d’une décision de blocage judiciaire ou administratif. Cette version de l’Assemblée nationale a été finalement maintenue.

Le texte doit encore revenir pour une dernière lecture à l’Assemblée, engorgée par l’examen de la réforme des retraites. L’ordre du jour n’est pas encore communiqué.