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Le Sénat vient de publier une longue évaluation des dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Le rapport revient sur la modification du « Verrou de Bercy » et ses conséquences pour la justice. Sans appeler à des bouleversements, il propose, par une vingtaine de préconisations, d’adapter certains dispositifs.
par Pierre Januel, journalistele 28 octobre 2022
Présidée par Claude Raynal (PS) et rapportée par Jean-François Husson (LR), la mission d’information du Sénat « relative à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales », fait le bilan de la loi fraude de 2018 et des modifications intervenues depuis. Elle formule vingt propositions, dont déjà deux ont été intégrées à la loi de finances 2023 (Dalloz actualité, 24 oct. 2022, obs. P. Januel).
Pour les sénateurs, les résultats du contrôle fiscal repartent à la hausse, après plusieurs années de baisse inquiétante. Entre 2018 et 2021, les montants recouvrés sont passés de 7,7 milliards à 10,7 milliards d’euros. Mais ce chiffre provient notamment d’une amélioration du recouvrement, dont le taux s’est accru en trois ans de 59,9 % à 75,3 %. Pour les sénateurs, il reste toutefois une « vraie marge d’amélioration ». Il y a eu aussi en 2021, une augmentation des droits et pénalités notifiés (à 13,2 milliards d’euros).
Le rapport regrette que l’administration fiscale ne procède pas à une évaluation de la fraude. Un manque que la Cour des comptes avait déjà noté concernant la fraude sociale (Dalloz actualité, 8 sept. 2020, obs. P. Januel). « Il ne s’agit bien entendu pas de proposer une évaluation "à l’euro près", ce qui serait irréaliste, mais des ordres de grandeur méthodologiquement plus fiables pour nourrir le débat public ». Une étude a été produite cet été portant la seule TVA (fraude estimée : entre 20 à 25 milliards d’euros). Mais « il n’y a pas d’autres travaux envisagés ou menés par l’Insee concernant les autres impositions à l’heure actuelle ».
Les enjeux de la modification du verrou de Bercy
Sans le supprimer totalement, la loi fraude, sous pression des parlementaires, avait profondément réformé le verrou de Bercy. La transmission est notamment devenue automatique si les droits fraudés sont supérieurs à 100 000 €, en cas d’actes graves ou de récidive. Le seuil est même abaissé pour les contribuables soumis à une obligation de déclaration à la HATVP, mais cela ne concerne qu’un à deux dossiers par an.
Le nombre de dossiers transmis à la justice a augmenté de près de 74 % entre 2018 et 2021, passant de 932 à 1 620. Cela correspond à la hausse qui était anticipée. Pour faire face à cet afflux de dossiers, la loi avait étendu à la fraude fiscale, les possibilités de « plaider-coupables » pour les personnes (CRPC) et les entreprises (CJIP). Il y a eu 111 CRPC en 2021, pour un montant moyen d’amendes de 68 350 € en 2021. Une seule procédure de CRPC n’aurait pas été homologuée (car elle impliquait un élu).
En 2021, sur 3 005 dossiers judiciaires venus d’une dénonciation obligatoire par le fisc, 46 % étaient en traitement, 42 % faisant l’objet de suites judiciaires et 12 % avaient été classés sans suite (souvent les dossiers les moins graves). Pour la mission d’information, l’équilibre trouvé par la loi est satisfaisant, même...
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