Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Séquestration : nécessaire qualification des actes matériels de privation de liberté

Les juges du fond qui par arrêt condamnent des prévenus du chef de détention suivie de libération volontaire avant le septième jour, mais ne précisant pas les actes matériels de privation de liberté d’aller et venir s’exposent à la cassation pour absence de justification de la décision.

par Victoria Morgantele 30 mars 2018

Par arrêt du 28 février 2018, la chambre criminelle souligne la nécessité pour les juges du fond, de justifier leur décision et plus précisément lors de la qualification des faits matériels d’une infraction.

En l’espèce, le directeur d’une entreprise constatait par vidéosurveillance un flagrant délit de vol de viande appartenant à sa société, par un salarié. Souhaitant mener l’enquête, le directeur de l’entreprise ainsi que le directeur des ressources humaines, interpellèrent plusieurs salariés, les conduisirent dans des locaux séparés pour empêcher une concertation, les interrogèrent, les confrontèrent, et appréhendèrent leurs téléphones portables personnels aux fins d’exploitation. Le salarié soupçonné de vol a ainsi été retenu pendant trois heures, dans le noir, sans téléphone et sur injonction de ne pas bouger, s’exposant dans le cas contraire à un licenciement. Le salarié déposait plainte pour séquestration et violences volontaires contre le personnel de direction le 4 octobre 2013 en exposant que ces faits avaient provoqué chez lui un choc émotionnel important. Par jugement du 19 novembre 2015 les prévenus étaient condamnés, ils interjetaient appel. L’arrêt, confirmatif, du 9 mars 2017 condamnait les prévenus pour détention suivie de libération volontaire avant le septième jour en soulignant que la pression morale et psychologique exercée par des supérieurs hiérarchiques qui menaçaient de le licencier, était telle que le salarié était privé de sa liberté d’aller et venir. Motivation qui ne semble pas être suffisante aux yeux de la Cour de cassation qui souligne que les actes matériels entravant la liberté d’aller et venir, dirigés contre le salarié ne sont pas justifiés dans la décision au fond, et ce d’autant plus que l’employeur peut procéder à une enquête interne.

Cette décision nous renvoie naturellement vers la célèbre affaire du dirigeant séquestré par ses salariés (Crim. 23 déc. 1986, n° 85-96.630). La chambre criminelle considérait que le délit de séquestration arbitraire était constitué dès lors que les salariés avaient retenu contre son grès l’employeur dans les locaux de l’entreprise, même sans l’usage de violence, afin de le contraindre à accorder des avantages qu’ils réclamaient.

Si la séquestration des dirigeants d’une entreprise par les salariés est...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :