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Sort d’une ancienne promesse de vente : révocation et vileté du prix

Il est impossible pour le promettant de se rétracter de la promesse de vente unilatérale sauf stipulation contractuelle contraire. La vileté du prix s’apprécie à la date de la promesse unilatérale de vente et non, comme en matière de lésion, à la date de la levée de l’option.

par Sandra Auffray, Avocat, Carène Avocatsle 17 décembre 2024

Dans l’affaire ayant débouché sur l’arrêt sous étude, une promesse unilatérale de vente concernant des terrains agricoles avait été consentie le 1er novembre 1971 par une propriétaire au profit de son ancienne locataire. Selon ses termes, la promesse était tacitement prorogeable jusqu’à un an après la mise en service de la rocade dont la construction était prévue à proximité de la parcelle.

Les deux cocontractantes initiales sont décédées et la promesse a été transmise à leur hériter respectif.

Près de quarante ans après, le 1er juin 2011, l’héritier de la promettante adresse un courrier au bénéficiaire lui indiquant qu’il considère la promesse caduque et qu’il entend donc s’en libérer. Puis, cinq ans après, le 18 novembre 2016, le bénéficiaire lève finalement l’option de la promesse. La rocade est inaugurée quelques jours après cette levée d’option.

Faute de signature de l’acte de vente, le bénéficiaire assigne le promettant le 17 janvier 2018 en réalisation forcée de la vente.

Les juges du fond ont considéré que la révocation intervenue avant la levée d’option par le bénéficiaire faisait échec à la rencontre des volontés et que la vente ne pouvait être forcée.

Après quelques péripéties sur le pourvoi formé par l’acquéreur (une procédure de désaveu à la suite de la notification, sans mandat, d’un désistement fait par l’avocat aux conseils), la Cour de cassation est finalement saisie de deux questions importantes : d’une part, la révocation de la promesse unilatérale intervenue pendant le délai d’option est-elle valable ? D’autre part, à quelle date doit s’apprécier le caractère réel et sérieux du prix contenu dans la promesse unilatérale de vente ?

La sanction de la révocation de la promesse unilatérale

La question de la validité de la révocation de la promesse par le promettant pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter est posée. Les juges de première instance, confirmés en appel, considèrent que la révocation intervenue pendant la période de levée d’option est valable (Aix-en-Provence, 5 janv. 2021, n° 19/16719, Dalloz jurisprudence). Solution évidente par sa conformité à la jurisprudence Cruz qui était encore en vigueur au moment où la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a statué (Civ. 3e, 15 déc. 1993, n° 91-10.199, jurisprudence rendue sur le fondement de l’anc. art. 1142 c. civ., D. 1994. 507 , note F. Bénac-Schmidt ; ibid. 230, obs. O. Tournafond ; ibid. 1995. 87, obs. L. Aynès ; AJDI 1994. 384 ; ibid. 351, étude M. Azencot ; ibid. 1996. 568, étude D. Stapylton-Smith ; RTD civ. 1994. 584, obs. J. Mestre ).

Mais c’est sans compter sur le revirement opéré par la Cour de cassation qui est venue affirmer que le promettant signataire d’une promesse unilatérale de vente « s’oblige définitivement à vendre dès la conclusion de l’avant-contrat, sans possibilité de rétractation sauf stipulation contraire » (Civ. 3e, 23 juin 2021, n° 20-17.554, D. 2021. 1574 , note L. Molina ; ibid. 2251, chron. A.-L. Collomp, B. Djikpa, L. Jariel, A.-C. Schmitt et J.-F. Zedda ; ibid. 2022. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki ; AJDI 2022. 226 , obs. F. Cohet ; Rev. sociétés 2022. 141, étude G. Pillet ; Rev. prat. rec. 2022. 25, chron. O. Salati ; RTD civ. 2021. 630, obs. H. Barbier ; ibid. 934, obs. P. Théry ; dans le même sens, Civ. 3e, 20 oct. 2021, n° 20-18.514, Dalloz...

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