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Article

La soustraction de mineur par ascendant au carrefour des droits pénal et international privé
La soustraction de mineur par ascendant au carrefour des droits pénal et international privé
Constitue une soustraction aggravée de mineur le fait pour une mère titulaire de l’autorité parentale en vertu d’une décision des autorités turques d’avoir déplacé son enfant à l’étranger, alors que la juridiction française avait interdit le retour de ce dernier qui résidait habituellement chez son père, en France, après un premier déplacement illicite.
par Méryl Recotillet, Maître de conférences, Université catholique de Lyonle 14 juin 2022
Aux termes de l’article 227-7 du code pénal, situé dans une section relative aux atteintes à l’exercice de l’autorité parentale, le fait, par tout ascendant, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. La soustraction qui matérialise cette infraction peut se réaliser tant sur le territoire national que sur celui d’un État étranger. Dans ce second cas, elle revêt une dimension internationale, mêlant parfois au droit pénal des éléments de droit international privé (A. Boiché, « Chapitre 731 : Déplacements illicites d’enfant », in P.-J. Claux et al., Droit et pratique du divorce 2022-2023, 5e éd., Dalloz, 2021) ainsi que c’était le cas dans l’arrêt rendu par la chambre criminelle le 1er juin 2022.
Faits et procédure
En l’espèce, un homme de nationalité française et turque et une femme de nationalité turque se sont mariés en Turquie, où est né leur enfant en 2009. L’époux a quitté la Turquie pour la France en 2012 et emmené son fils avec lui. Par arrêt du 25 juin 2013, la cour d’appel de Bordeaux, saisie par l’épouse et mère de l’enfant en vertu de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, a reconnu le caractère illicite du déplacement de l’enfant, mais rejeté sa demande de retour immédiat, en application de l’article 13 de ladite convention. Le 13 janvier 2014, le tribunal de la famille d’Istanbul a rendu une décision assimilable à une ordonnance de non-conciliation, qui a fixé provisoirement chez sa mère le domicile de l’enfant. Saisi entre-temps par le père, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bordeaux s’est dessaisi au profit du juge truc en accueillant une exception de litispendance. Le 9 octobre 2015, le tribunal d’Istanbul a prononcé le divorce des époux et accordé la garde de l’enfant à sa mère. Le père a relevé appel de ce jugement. Le 9 mars 2016, la disparition de l’enfant a été signalée. La mère, qui l’avait emmené avec elle, a été interpellée en Allemagne et remise aux autorités françaises après délivrance d’un mandat d’arrêt européen (rappr. F. Mélin, Enlèvement international d’enfant : à propos du retour immédiat de l’enfant, Dalloz actualité, 7 sept. 2021, obs. ss Civ. 1re, 8 juill. 2021, n° 21-13.556). Par jugement du 26 juin 2019, elle a été condamnée du chef de soustraction de mineur par ascendant, aggravée par la circonstance que le mineur a été retenu indûment hors du territoire de la République. La prévenue, le ministère public, le père de l’enfant et l’association agissant en qualité d’administrateur ad hoc de l’enfant ont relevé appel de cette décision. En cause d’appel, les juges ont confirmé la...