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Le statut des juristes assistants

Un décret n° 2017-1618 du 28 novembre 2017 définit le statut des juristes assistants, qui ont été institués par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21e siècle.

par François Mélinle 15 décembre 2017

La question des méthodes de travail du juge est posée depuis plusieurs années. Une ligne directrice s’est dégagée dans ce débat et vise à promouvoir l’organisation d’une équipe de travail autour du juge, que ce soit dans le cadre de la justice administrative (D. de La Burgade, L’aide à la décision. L’assistance aux magistrats administratifs, Dr. adm. avr. 2014. Étude 7) ou à propos du juge judiciaire.

Concernant ce dernier, les différents rapports élaborés en vue de moderniser l’institution judiciaire ont fait des propositions visant toutes, sous des formes différentes, à permettre au juge de bénéficier de l’appui d’assistants, au-delà de la présence des assistants de justice, désormais bien connus depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 95-125 du 8 février 1995. C’est ainsi que le rapport, déposé en novembre 2013, visant à Refonder le ministère public s’est prononcé (p. 24), sous la direction de Monsieur J.-L. Nadal, en faveur de la création d’un assistant du ministère public et que le rapport sur Le juge du 21e siècle, dirigé par Monsieur P. Delmas-Goyon et déposé en décembre 2013, a préconisé (p. 92) l’organisation d’un travail en équipe. Le rapport sur Les juridictions du 21e siècle, rédigé sous la direction de Monsieur D. Marshall et remis en décembre 2013, a quant à lui préconisé (p. 16 et 77) la mise en place d’attachés de justice qui pourraient être de jeunes avocats ou universitaires recrutés pour quelques années.

Dans la ligne de ces rapports, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21e siècle a intégré au code de l’organisation judiciaire un nouvel article L. 123-4, qui institue des juristes assistants auprès des juridictions : « Peuvent être nommées en qualité de juristes assistants auprès des magistrats des tribunaux d’instance, des tribunaux de grande instance et de première instance, des cours d’appel ainsi qu’à la Cour de cassation les personnes titulaires d’un diplôme de doctorat en droit ou sanctionnant une formation juridique au moins égale à cinq années d’études supérieures après le baccalauréat avec deux années d’expérience professionnelle dans le domaine juridique et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions.

Ces juristes assistants sont nommés, à temps partiel ou complet, pour une durée maximale de trois années, renouvelable une fois. Ils sont tenus au secret professionnel et peuvent accéder aux dossiers de procédure pour l’exercice des tâches qui leur sont confiées ».

La création des juristes assistants a été bien perçue (L. Raschel, Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 : quelle modernisation du service public de la justice ?, Gaz. Pal. 31 janv. 2017, n° 5, p. 68 ; N. Fricero, Rapprocher la justice des citoyens, améliorer l’organisation et le fonctionnement du service public de la justice : comment dessiner la justice de l’avenir, Procédures n° 2, févr. 2017, étude 2 ; B. Gardey de Soos et J. Dupré, Renouveler et moderniser la pratique quotidienne des magistrats, JCP 2017. 392 ; B. Gardey de Soos, Les nouveaux défis du magistrat 2.0 ou la création d’outils d’aide à la rédaction pour le juge civil, JCP 2017. 806). Dès lors que le recrutement de juristes assistants sera bien mené, il devrait en effet permettre d’accroître la productivité des juridictions, en permettant au juge de confier aux juristes assistants la préparation de dossiers ou de projets de décision.

À la suite de l’entrée en vigueur de la loi du 18 novembre 2016, des juristes assistants ont été recrutés par certaines juridictions.

Leur statut vient d’être défini, par le décret n° 2017-1618 du 28 novembre 2017 relatif aux juristes assistants et aux personnes habilitées à accéder au bureau d’ordre national automatisé des procédures judiciaires.

Les éléments essentiels de ce statut sont les suivants.

Les juristes assistants recrutés contribuent par leur expertise, en matière civile et en matière pénale, à l’analyse juridique des dossiers techniques ou comportant des éléments de complexité qui leur sont soumis par les magistrats sous la direction desquels ils sont placés. Ils ne participent ni à la procédure ni aux audiences. Ils ne peuvent pas assister aux délibérés. Ils sont recrutés en qualité d’agent contractuel de l’État relevant de la catégorie A (COJ, art. R 123-30).

Pour être nommé juriste assistant, il convient de remplir certaines conditions. Il faut notamment être français et jouir de ses droits civiques. Par ailleurs, les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ne doivent pas être incompatibles avec l’exercice des fonctions (COJ, art. R. 123-31).

Le recrutement intervient par contrat précisant notamment sa date d’effet et sa durée, la nature des fonctions exercées, les conditions de rémunération, la ou les juridictions d’affectation ainsi que les modalités d’organisation du temps de travail. Le contrat débute par une période d’essai (COJ, art. R. 123-34). Préalablement à la prise d’activité, les juristes assistants prêtent serment (COJ, art. R. 123-39).

Il peut être mis fin au contrat pour faute grave ou pour un motif autre que disciplinaire (COJ, art. R. 123-35).

Enfin, il est à noter que le décret du 28 novembre 2017 modifie l’article R. 15-33-66-8 du code de procédure pénale, qui concerne l’accès au bureau d’ordre national automatisé des procédures judiciaires. Cet article fournit la liste des personnes pouvant accéder aux informations et données à caractère personnel enregistrées dans le traitement dans le cadre des procédures pénales. Compte tenu du caractère sensible de ces informations, la CNIL a été amenée à délibérer sur le projet de décret relatif aux juristes assistants (Délib. n° 2017-236, 5 oct. 2017, JO 30 nov.). Désormais, les juristes assistants qui assistent les magistrats du ministère public et les magistrats du siège qui exercent des fonctions pénales peuvent accéder à ces informations, pour le seul accomplissement des missions qui leur sont confiées.