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Subsidiarité de la garantie de l’AGS en redressement et en liquidation judiciaires : ubi lex distinguit

Pour la Cour de cassation, une cour d’appel fait une exacte application des articles L. 3253-19 et L. 3253-20 du code du travail en retenant que l’obligation de justification préalable par le mandataire judiciaire de l’insuffisance des fonds disponibles de la procédure collective et la possibilité de sa contestation immédiate par l’AGS ne sont prévues qu’en cas de sauvegarde. Il en est de même lorsque les juges du fond en déduisent qu’en redressement et en liquidation judiciaires, aucun contrôle a priori n’est ouvert à l’AGS, de sorte que, sur la présentation d’un relevé de créances salariales établi par le mandataire judiciaire sous sa responsabilité, et afin de répondre à l’objectif d’une prise en charge rapide de ces créances, l’institution de garantie est tenue de verser les avances demandées.

L’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 7 juillet 2023 était très attendu par les acteurs des procédures collectives tant la question posée à la haute juridiction est débattue devant les juges du fond et en doctrine (T. com. Paris, 27 oct. 2021, n° 2021043985, LEDEN n° 10, nov. 2021, 200i8, obs. F.-X. Lucas ; T. com. Bobigny, 6 mai 2021, n° 2021L01171 et n° 2021L01170, RPC n° 5, sept. 2021. Comm. 136, obs. D. Jacotot ; ACP n° 13, juill. 2021. Alerte 164, obs. L. Fin-Langer ; Paris, 13 oct. 2022, n° 21/08986, JCP E, n° 4, 26 janv. 2023. 1025, obs. L. Sautonie-Laguionie ; P. Morvan, La garantie AGS est-elle subsidiaire ?, Dr. soc. 2022. 799  ; K. Burguet et F. Morel, L’intervention de l’AGS en garantie des créances des salaires est subsidiaire et doit le rester, FRS 18/22, n° 7 ; Toulouse, 9 sept. 2022, n° 22/01754, Dalloz actualité, 22 sept. 2022, obs. C. Gailhbaud) : l’application du principe de subsidiarité de la garantie de l’association de garantie des salaires (AGS), énoncé à l’article L. 3253-20 du code du travail, lui permet-elle d’exiger, du mandataire judiciaire, la justification préalable de l’insuffisance de fonds disponibles et l’autorise-t-elle à contester sa garantie en refusant de procéder à l’avance sollicitée ? Sont ici en cause les modalités d’application du principe de subsidiarité de l’intervention de l’AGS en redressement et en liquidation judiciaires.

En l’espèce, une société placée en redressement judiciaire a fait l’objet d’un plan de cession de ses actifs avec consignation du prix de cession entre les mains du mandataire judicaire. À la suite de la conversion de la procédure collective en liquidation judiciaire, le liquidateur a saisi l’AGS d’une demande d’avance pour assurer le paiement de salaires dus au cours de la période d’observation. Invoquant l’absence de justification de l’insuffisance de fonds disponibles, l’AGS a refusé de procéder à l’intégralité de l’avance sollicitée. Le liquidateur judiciaire a saisi le tribunal de la procédure collective en demande du versement de la somme correspondant au montant du solde ressortant du relevé de créances salariales.

La Cour d’appel de Poitiers, saisie du litige en appel, a condamné l’AGS au versement d’une somme équivalente au solde du relevé de créances salariales (Poitiers, 14 juin 2022, n° 21/01968, LEDEN, n° 7, juil. 2022, 200y3, note G. Ollu ; Droit de réponse de l’AGS, LEDEN n° 8, sept. 2022, 200y9), en relevant qu’aux termes de l’article L. 3253-20 du code du travail, l’obligation du mandataire judiciaire de justifier préalablement de l’insuffisance de fonds disponibles et la possibilité de sa contestation immédiate par l’AGS n’étaient prévues qu’en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde. La cour d’appel en a déduit qu’en redressement et en liquidation judiciaires, aucun contrôle a priori de l’insuffisance de fonds disponibles de l’entreprise n’est ouvert à l’AGS, tenue, dès présentation des relevés par le mandataire et dans l’objectif d’assurer une prise en charge...

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