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Tribunal compétent en matière de contrefaçon de marques de l’Union européenne

Dans le cadre d’une action en contrefaçon d’une marque de l’Union européenne (UE), un distributeur exclusif et son fournisseur domiciliés dans deux États différents peuvent être attraits devant la juridiction nationale compétente du domicile du gérant du fournisseur. Le défaut de lien organisationnel entre le défendeur d’ancrage et les codéfendeurs n’impacte pas cette compétence.

La société américaine Advance Magazine Publishers Inc., groupe d’édition de magazines, est titulaire de plusieurs marques de l’Union européenne comportant l’élément verbal « Vogue ». De son côté, Beverage City Polska produit, promeut et distribue une boisson énergisante portant le nom « Diamant Vogue ». Cette dernière société ainsi que son dirigeant (FE) sont basés en Pologne. Beverage City Polska a conclu un accord de distribution exclusive avec Beverage City & Lifestyle, une entreprise allemande dont le dirigeant (MJ) réside également en Allemagne. Bien que les noms de ces sociétés se ressemblent, elles ne sont pas affiliées au même groupe, leur seule relation étant le contrat de distribution exclusive qui les lie.

Advance Magazine Publishers a intenté une action en justice contre Beverage City Polska, Beverage City & Lifestyle et leurs dirigeants, alléguant que l’utilisation du nom « Diamant Vogue » dans la commercialisation de leurs produits constituait une contrefaçon de ses marques, qu’elle prétend être de renommée.

Advance Magazine Publishers a saisi le Landgericht Düsseldorf (Tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne), tribunal compétent pour les marques de l’Union européenne en raison de la résidence du gérant de Beverage City & Lifestyle, pour demander la cessation des agissements des sociétés sur l’ensemble du territoire de l’Union et l’indemnisation des préjudices subis.

Statuant sur sa propre compétence, le Landgericht Düsseldorf a fait droit à l’action introduite par Advance Magazine Publishers, en fondant sa compétence internationale sur l’article 8, point 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (dit Bruxelles I bis) concernant la société de droit polonais et son gérant, en reprenant les principes établis dans l’arrêt Nintendo (CJUE 27 sept. 2017, Nintendo Co. Ltd c/ BigBen Interactive GmbH et BigBen Interactive SA, aff. jtes C-24/16 et C-25/16 ; D. 2017. 1977 ; ibid. 2018. 966, obs. S. Clavel et F. Jault-Seseke ; ibid. 1566, obs. J.-C. Galloux et P. Kamina ; ibid. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; Dalloz IP/IT 2018. 190, obs. A.-E. Kahn ; Rev. crit. DIP 2018. 835, note T. Azzi ; ibid. 2020. 695, étude T. Azzi ; Propr. ind. 2018. Chron. 2, nos 74 et 80, obs. A. Folliard-Monguiral ; Procédures 2017. Comm. 266, obs. C. Nourissat).

La société polonaise ainsi que son gérant ont interjeté appel de la décision de première instance devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur) en faisant valoir l’absence de compétence des juridictions allemandes pour connaître de l’action engagée à leur égard, étant donné que les agissements litigieux et la livraison de marchandises étaient exclusivement effectués en Pologne.

L’Oberlandesgericht Düsseldorf relève que, contrairement à l’affaire Nintendo précitée, la relation commerciale ne concernait pas le défendeur d’ancrage (MJ dans la présente, qui n’est que le gérant de la société Beverage City& Lifestyle), mais la société allemande et la société polonaise.

Le Tribunal régional de Düsseldorf sursoit à statuer et saisit la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle, afin de préciser si les demandes introduites sont assez...

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