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Un premier vent de défiance souffle sur le Digital Services Act : Zalando conteste sa qualification de très grande plateforme par la Commission européenne

L’entreprise allemande Zalando, inscrite par la Commission européenne sur la liste des très grandes plateformes en ligne, intente un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne contre la Commission afin de contester cette désignation. Une première tentative de résistance au Digital Services Act qui interroge sur la notion de bénéficiaires actifs du service et sur la prise en compte des modèles de plateforme hybrides.

La mise en œuvre du Digital Services Act

Une adoption récente

La Commission européenne, poursuivant son dessein de réalisation d’un marché unique numérique, a adopté un paquet législatif composé de deux règlements : le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA) (v. Les règlements européens DMA-DSA : un nouveau fair-play numérique européen, Dalloz IP/IT 2023. 262 ). Le premier texte, publié le 12 octobre 2022 (v. à ce propos, R. Moutot, La lutte contre les pratiques déloyales des GAFAM : Le DMA est publié au Journal officiel de l’Union européenne  !, Dalloz actualité, 16 nov. 2022), traite de la concurrence en ligne avec pour objectif la régulation du comportement des gatekeeper, qui agissent comme des contrôleurs d’accès, en leur imposant des obligations comportementales ex ante. Le second texte, celui qui nous intéresse, vise à mettre en place un cadre européen harmonisé pour les services en ligne portant sur la modération des contenus illicites et la transparence du service. Sa version définitive a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 27 octobre 2022.

La qualification de très grande plateforme en ligne (et de très grand moteur de recherche en ligne)

Le DSA s’appuie sur les catégories de services intermédiaires définis par la directive sur le commerce électronique du 8 juin 2000 auxquelles il ajoute les plateformes en ligne et les moteurs de recherche en ligne.

La plateforme en ligne est «  un service d’hébergement qui, à la demande d’un destinataire du service, stocke et diffuse au public des informations, à moins que cette activité ne soit une caractéristique mineure et purement accessoire d’un autre service ou une fonctionnalité mineure du service principal qui, pour des raisons objectives et techniques, ne peut être utilisée sans cet autre service, et pour autant que l’intégration de cette caractéristique ou de cette fonctionnalité à l’autre service ne soit pas un moyen de contourner l’applicabilité du présent règlement  » (Règl. DSA, art. 3).

Au sein de ces plateformes en ligne, certaines, dites «  très grandes plateformes en ligne  » sont identifiées comme telles du fait qu’elles «  ont un nombre mensuel moyen de destinataires actifs du service dans l’Union égal ou supérieur à 45 millions  », représentant 10 % de la population de l’Union (Règl. DSA, art. 33, §§ 1 et 2). En raison de cet important seuil d’utilisateurs, le texte considère qu’elles présentent un « risque systémique (…) [et] peuvent produire des effets disproportionnés dans l’Union » (consid. 76). La désignation de ces très grandes plateformes en ligne n’est pas automatique et procède d’une décision de la Commission (Règl. DSA, art. 33, §§ 1 et 4).

Pour rappel, le texte définit le moteur de recherche comme « un service intermédiaire qui permet aux utilisateurs de formuler des requêtes afin d’effectuer des recherches sur, en principe, tous les sites internet ou tous les sites internet dans une langue donnée, sur la base d’une requête lancée sur n’importe quel sujet sous la forme d’un mot-clé, d’une demande vocale, d’une expression ou d’une autre entrée, et qui renvoie des résultats dans quelque format que ce soit dans lesquels il est possible de trouver des informations en rapport avec le contenu demandé » (Règl. DSA, art. 3, pt j). De la même manière que pour les plateformes, seront considérés comme de très grands moteurs de recherche ceux qui ont un nombre mensuel moyen de destinataires actifs dans l’Union égal ou supérieur à 45 millions (Règl. DSA, art. 33) et seront désignés par la Commission.

Un système pyramidal d’obligations

La finalité du DSA, qui conserve presque à l’identique les principes de responsabilité hérités de la directive sur le commerce électronique, est la mise en place de nouvelles obligations de transparence à la charge des services intermédiaires. Ces obligations portent sur la modération des contenus, la publicité, le système de recommandation… et ont la particularité d’être cumulatives !

Le socle de ce système est composé d’obligations imposées à tous les fournisseurs de services intermédiaires (art. 11 à 15). Viennent ensuite des règles supplémentaires, applicables aux hébergeurs (incluant les plateformes en ligne) (art. 16 à 18). En s’élevant d’un niveau, on retrouve des dispositions applicables uniquement aux plateformes en ligne (art. 19 à 28) et aux plateformes en ligne permettant de conclure aux consommateurs des contrats à distance avec des professionnels (art. 29 à 32). Le haut de la pyramide...

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