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Une interrogation sur le sens du travail chez les professionnels du droit et de la justice

Une étude pluridisciplinaire et parfaitement renseignée a été menée auprès de professionnels du droit et de la justice tels que les avocats, les greffiers, les directeurs de services de greffe, et les magistrats judiciaires et administratifs sur les identités professionnelles, les pratiques et le sens des métiers du droit et de la justice. Dans une justice en souffrance, le sens du travail n’est pas perdu chez des professionnels aux métiers vocationnels et désireux de bien faire, il est à reconstruire.

par Maud Castelli Sécheresse, Juristele 2 décembre 2024

L’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ) résulte de la fusion du groupement d’intérêt public Mission de recherche droit et justice (MRDJ) et de l’Institut des hautes études sur la justice (IHEJ), association créée en 1990 à l’initiative de l’École nationale de la magistrature afin de disposer d’un groupe de réflexion non institutionnel permettant d’alimenter un débat sur les pratiques judiciaires. Il a été créé en vue d’assurer une interface interdisciplinaire active entre les chercheurs, les professionnels et les responsables institutionnels et de mieux prendre en compte les besoins et attentes des citoyens en matière de justice.

L’IERDJ vient de publier une étude intitulée « Le travail en juridiction : une analyse pluridisciplinaire », sous la direction de Valérie Sagant, magistrate judiciaire et directrice, et d’Anne-Sophie de Lamazelle, magistrate judiciaire et responsable d’études et de recherches, avec la collaboration de Mélanie Vay, docteure en sciences politiques, responsable d’études et de recherches. Cette étude est le fruit d’une réflexion elle-même interdisciplinaire menée auprès de praticiens du droit et de la justice, de chercheurs et d’universitaires.

Les travaux dont l’étude est issue ont débuté à l’automne 2021, à partir d’un mal-être au travail exprimé par les différents acteurs du monde de la justice judiciaire et administrative, relativement à des distorsions entre la réalité vécue quotidiennement et l’éthique professionnelle faite d’exigence de qualité et du désir de bien faire son travail. C’est à cette même époque qu’a été publiée, le 23 novembre 2021, la retentissante « tribune des 3000 » dans le quotidien Le Monde qui a marqué les esprits. Aux termes de cette tribune, les magistrats ont alerté sur la déliquescence de leurs conditions de travail, en soulignant « l’importante discordance entre [leur] volonté de rendre une justice de qualité et la réalité de [leur] quotidien », en refusant « une justice qui n’écoute pas […], chronomètre et comptabilise tout » (Le Monde, 23 nov. 2021). C’est également au cours de cette période qu’ont débuté les états généraux de la justice qui ont donné lieu, après avoir recueilli plus d’un million de contributions individuelles ou collectives, au dépôt d’un rapport remis au président de la République, le 8 juillet 2022.

L’analyse qui est proposée est distincte de celles habituellement menées par les ministères et institutions publiques en ce qu’elle repose sur les données propres à la sociologie du travail centrées sur la vie et l’organisation au travail, ainsi que de la perception et des ressentis de ceux qui y concourent. La justice n’est en effet pas réductible à son fonctionnement procédural ou institutionnel, encore moins à l’appréciation de la responsabilité individuelle de ses...

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