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Vers une stratégie européenne en matière de jeu vidéo

Le rapport sur le sport électronique et les jeux vidéo présenté par la députée européenne Laurence Farreng vient d’être adopté par le Parlement européen. Il s’agit là d’une excellente nouvelle, qui témoigne du fait que l’Union se saisit désormais de cet enjeu essentiel.

L’adoption par le Parlement européen du rapport de la commission de la culture et de la communication, porté par la députée européenne française Laurence Farreng et relatif au sport électronique et aux jeux vidéo, est aussi ambitieuse qu’opportune. Le jeu vidéo est porteur d’enjeux considérables : sans prétendre à l’exhaustivité, il suscite des questions relatives à la souveraineté européenne, à la protection de l’enfance, à la concurrence, à l’emploi et, naturellement, au droit applicable. Or, jusqu’à présent, son appréhension par l’Union européenne était uniquement sectorielle et il n’était pris en compte que de manière secondaire, à l’occasion de textes ne lui étant pas précisément dédiés, en dépit de quelques initiatives éparses (ainsi notamment du projet European video games society lancé en janvier 2022 par le Parlement européen). Pour la première fois donc, le Parlement a adopté un rapport qui porte directement sur cet objet complexe. Cette décision est d’autant plus intéressante que le rapport opte pour une vision positive – tout en étant réaliste – du jeu vidéo, lequel est souvent ramené (voire limité ?) aux dérives qu’il peut créer (par le prisme addictif, par référence aux comportements violents qu’il induirait supposément, etc.).

Le texte et la résolution qu’il porte ne sont certes pas des instruments contraignants. Il s’agit toutefois d’une première pierre à l’édifice que pourrait être, demain, le cadre juridique du jeu vidéo au sein de l’Union européenne. À cet égard, l’approche transversale retenue est également opportune et se structure autour de plusieurs grands axes : la culture, l’industrie, l’emploi, la jeunesse, l’e-sport et la propriété intellectuelle.

La culture

Heureusement indifférent au mérite, le droit d’auteur embrasse toutes les créations de formes originales et se saisit donc aisément du jeu vidéo (v. infra). Pour le reste, la reconnaissance de la place de la création vidéoludique au sein du secteur culturel (a fortiori parmi les arts) reste aujourd’hui encore contestée. Le lecteur féru d’histoire de l’art se rassurera sans doute en se disant que toutes les formes d’art impliquant de nouvelles techniques ont un temps subi cette volonté d’exclusion empreinte de mépris (il n’est qu’à songer aux débats anciens relatifs à la photographie…). Il faut cependant convenir du fait que le jeu vidéo cristallise tout particulièrement les critiques à ce sujet. S’il n’est pas question de se livrer ici à une démonstration de la légitimité de la place du jeu vidéo parmi les arts, il faut saluer la position du rapport, qui assume explicitement l’importance de cette création dans le domaine culturel. Est ainsi affirmé que les jeux vidéo « constituent aujourd’hui une véritable forme d’art total, qui fait appel à des techniques d’autres domaines tels que le cinéma, les arts graphiques, la musique et le théâtre, avec des technologies en constante évolution, au service d’une expérience de jeu » (exposé des motifs, p. 16).

À cet égard, le...

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