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La violation d’une clause d’intuitu personae et d’agrément prive l’agent commercial de son indemnité de fin de contrat

Les agents commerciaux s’abstenant d’informer leur mandant d’un changement de direction ou d’actionnariat manquent à leur obligation de loyauté. Ce manquement constitue une faute grave justifiant la résiliation sans qu’aucune indemnité de fin de contrat ne leur soit versée.

1. Le contrat d’agent commercial est régi par les articles L. 134-1 et suivants du code de commerce, issus de la transposition de la directive 86/653/CEE du 18 décembre 1986. Le dispositif instauré est protecteur des agents commerciaux. L’un des traits saillants de cette protection réside dans l’indemnité de fin de contrat, en principe octroyée à tout agent commercial.

La justification de cette indemnité est économique : pendant tout le contrat, l’agent commercial, en sa qualité de mandataire, travaille et développe une clientèle qui n’est pas la sienne ; celle-ci appartient au mandant. Ainsi, lorsque ce mandat, qualifié d’intérêt commun (C. com., art. L. 134-4, al. 1er), prend fin, l’agent commercial se trouve, en quelque sorte, lésé. Il s’est investi mais le fruit de cet investissement ne profitera plus qu’au mandant. Cette privation est d’autant plus forte que les agents commerciaux sont fréquemment soumis à des clauses de non-concurrence post-contractuelles. Voilà pourquoi une indemnité d’ordre public de fin de contrat a été instaurée au bénéfice de l’agent. L’objectif est, comme le dit la loi, de réparer le préjudice subi (C. com., art. L. 134-12, al. 1er).

L’articulation retenue est claire : l’indemnité est, en principe, due à l’agent commercial ; les situations dans lesquelles l’agent se voit privé de l’indemnité relèvent de l’exception. Les cas de perte de l’indemnité sont limitativement énumérés (C. com., art. L. 134-13). La faute grave de l’agent commercial est l’une des hypothèses le privant de son indemnité (pour une situation originale récente où la faute grave de l’agent n’est pas considérée car le mandant avait lui-même, antérieurement, commis des manquements, Com. 1er juin 2022, n° 20-11.981). Les deux arrêts sous commentaires apportent, à ce sujet, d’intéressants enseignements et précisions qu’il convient d’analyser.

2. Les deux affaires étaient similaires. Dans la première, l’affaire Repmo (pourvoi n° 20-13.228), une clause d’intuitu personae stipulait que le contrat était conclu en considération de l’associé majoritaire et principal animateur de la société ayant la qualité d’agent commercial. Cette clause était doublée d’un agrément selon lequel tout changement (de direction ou d’actionnariat) devait être préalablement accepté par le mandant. Ce mandant ayant été informé tardivement du changement de direction, le contrat fut résilié au motif que l’agent avait commis une faute grave. Dans la seconde, l’affaire Cofim (pourvoi n° 20-11.952), une clause d’intuitu personae doublée d’un agrément avait également été stipulée. Aucune information n’ayant, cette fois-ci, été donnée au mandant quant à la démission du gérant de la société agent commercial, le contrat fut résilié au motif qu’une faute grave avait été commise.

Le bien-fondé de la résiliation est retenu dans les deux affaires. La motivation étant similaire, seule celle de l’arrêt Cofim, plus synthétique, est ici reprise : l’agent a « manqué à son obligation de loyauté, essentielle au mandat d’intérêt commun » et « commis une faute grave justifiant la rupture des relations commerciales et dispensant [le mandant] de lui verser l’indemnité réparatrice prévue par l’article L. 134-12 du code de commerce ainsi que l’indemnité de préavis » (arrêt Cofim, § 4 ; arrêt...

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