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Visioconférence et mise à disposition de la procédure d’instruction

Le mis en examen ne peut se faire grief de l’absence de mise à la disposition de son conseil du dossier de la procédure dans les locaux de détention, lors de la tenue d’un débat contradictoire avec utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle, qu’à la condition que son avocat ait averti en temps utile le juge des libertés et de la détention de son choix de se trouver auprès de la personne détenue.

par Lucile Priou-Alibertle 22 janvier 2018

En l’espèce, une personne mise en examen du chef, notamment, d’infractions à la législation sur les stupéfiants a été avisée de la tenue d’un débat contradictoire, par visioconférence, devant le juge des libertés et de la détention (JLD) aux fins de prolongation de sa détention provisoire. Lors du débat, le conseil du détenu, se trouvant auprès de celui-ci en détention, demandait à ce que soit constaté que la copie de l’intégralité de la procédure n’avait pas été mise à sa disposition dans les locaux de la détention et, partant, compte tenu de l’impossibilité de procéder au renvoi des débats, que la prolongation de la détention de son client ne soit pas ordonnée.

Le JLD avait écarté cette argumentation et ordonné la prolongation de la détention provisoire. Auteur de l’appel, le mis en examen soutenait, devant la chambre de l’instruction, qu’en raison de l’irrespect des dispositions de l’article 706-71 du code de procédure pénale, le débat contradictoire était entaché de nullité. Pour rejeter ce moyen, la chambre de l’instruction précisait, notamment, que le conseil du détenu n’avait pas préalablement averti le JLD qu’il se trouverait auprès de son client à la maison d’arrêt et que la procédure ayant été mise à sa disposition quatre jours ouvrables avant le débat contradictoire, il n’avait pas été porté obstacle à l’exercice des droits de la défense.

Le pourvoi interrogeait donc la sanction processuelle attachée à l’irrespect des dispositions de l’article 706-71, lequel précise, en son alinéa 6, que, « si la personne est assistée par un avocat, celui-ci peut se trouver auprès du magistrat, de la juridiction ou de la commission compétents ou auprès de l’intéressé. Dans le premier cas, il doit pouvoir s’entretenir avec ce dernier, de façon confidentielle, en utilisant le moyen de télécommunication audiovisuelle. Dans le second cas, une copie de l’intégralité du dossier doit être mise à sa disposition dans les locaux de détention sauf si une copie de ce dossier a déjà été remise à l’avocat ».

 La Cour de cassation y répond clairement en indiquant qu’il se déduit de l’article 706-71 du code de procédure pénale que le mis en examen ne saurait se faire un grief de ce qu’une copie intégrale du dossier n’a pas été mise à la disposition de son avocat dans les locaux de détention, lorsque ce dernier, informé de la tenue du débat contradictoire avec utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle, n’a pas averti en temps utile le JLD de son choix de se trouver auprès de la personne détenue à la maison d’arrêt. 

La Cour de cassation adopte, à notre sens, une lecture restrictive de l’article précité au détriment du respect des droits de la défense. Rappelons que le droit d’accès au dossier d’instruction par l’avocat de la défense est consacré par l’article 114 du code de procédure pénale. Il est parfaitement acquis que la procédure mise à la disposition de l’avocat doit, à peine de nullité, être complète et porter sur toutes les pièces de la procédure en l’état où il se trouve au moment où a lieu la communication (Crim. 3 août 1935, DP 1937. I. 94, note Leloir). La Cour de cassation veille au respect de ces dispositions en sanctionnant leur manquement d’une nullité relative soumise, donc, à la justification de ce qu’il en est résulté une atteinte aux droits de la défense (Crim. 11 mai 2010, n° 10-81.313, Dalloz actualité, 23 juin 2010, obs. C. Girault ; AJ pénal 2010. 448, obs. L. Ascensi ; 7 févr. 2004, n° 03-87.170, Bull. crim. n° 42 ; D. 2004. 1067 ).

Le mis en examen ne peut se faire grief de l’absence de mise à la disposition de son conseil du dossier de la procédure dans les locaux de détention, lors de la tenue d’un débat contradictoire avec utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle, qu’à la condition que son avocat ait averti en temps utile le juge des libertés et de la détention de son choix de se trouver auprès de la personne détenue.