Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Interview

Que retenir du rapport annuel du Médiateur de l’assurance ? Entretien avec Arnaud Chneiweiss

Le Médiateur de l’assurance répond aux questions de Rodolphe Bigot et Amandine Cayol, responsables de la chronique Assurances, par suite de la récente publication de son rapport annuel.

le 21 septembre 2023

Dalloz actualité : Dans votre rapport, vous insistez sur la défiance envers les experts missionnés par les assureurs.

Arnaud Chneiweiss : Je crois qu’il y a là un vaste sujet de réforme dont la Profession et les Pouvoirs publics devraient s’emparer.

L’expert est en général le premier visage que voit l’assuré dans le cadre du règlement de son sinistre, et peut-être le seul, lorsque le reste des échanges avec l’assureur s’effectue par téléphone ou par courriels.

Bien qu’en pratique, ce ne soit pas toujours le cas – ce qui peut alimenter le reproche d’opacité –, les conclusions de l’expert doivent être transmises à l’assuré (conformément à un engagement déontologique pris par la Profession de l’assurance dans le cadre du Comité consultatif du secteur financier [CCSF] en 2005). Lorsqu’elles lui sont défavorables, il met souvent en cause l’impartialité de l’expert – par exemple si ce dernier estime que les fissures de l’habitation ne peuvent être rattachées de façon « déterminante » à un arrêté de catastrophe naturelle publié pour la commune et concernant une période précise, car d’autres causes existent, notamment un défaut de construction.

L’expert n’est pourtant pas un salarié de l’assureur. Il est indépendant, avec ses compétences – dans le bâtiment par exemple pour évaluer les origines d’un sinistre affectant une habitation – et sa déontologie. Cependant, le simple fait qu’il ait été directement missionné par l’assureur le rend suspect de partialité : n’est-il pas « tenu », dans une dépendance économique par rapport à l’assureur qui lui confie des missions ?

Dalloz actualité : Comment casser cette défiance ?

Arnaud Chneiweiss : Je propose de réfléchir à un mécanisme de désignation aléatoire de l’expert, à partir d’une liste d’experts référencés par toute la Profession de l’assurance. Par ailleurs, il faut renforcer les règles professionnelles et déontologiques entourant la profession d’expert, afin de réduire les doutes sur leur indépendance et leur compétence (une certification pourrait être mise en place). Le principe du contradictoire devrait également être consacré et la mission de l’expert explicitée : convocation des parties, réception de leurs arguments, réponses à ceux-ci…

Dalloz actualité : Et puis il y a la question des délais. Les assurés se plaignent souvent d’attendre longtemps la visite de l’expert.

Arnaud Chneiweiss : Fixons un délai raisonnable pour la désignation de l’expert lorsqu’elle est nécessaire, à compter de la déclaration de sinistre, par exemple quinze jours. Un délai raisonnable devrait également être fixé pour la conduite de l’expertise, par exemple trois mois à compter de la désignation.

Dalloz actualité : Et les experts d’assurés ?

Arnaud Chneiweiss : C’est un vrai souci. En général les contrats prévoient la possibilité d’une contre-expertise mais elle est aux frais de l’assuré. Et vers qui se tourner pour trouver un expert honnête et compétent ? Il n’y a pas de diplôme aujourd’hui pour annoncer être « expert d’assuré ». Nous...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

Arnaud Chneiweiss

Arnaud Chneiweiss est Médiateur de l’assurance