Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Le droit en débats

L’impact du covid-19 sur les contrats de droit privé

L’épidémie de coronavirus (ci-après « covid-19 ») conjuguée aux mesures normatives prises pour en limiter la propagation et, partant, leurs conséquences économiques, vont nécessairement se traduire par des difficultés, voire des impossibilités d’exécution de nombreux contrats de droit privé en cours, alors que les dispositions de l’article 1103 du code civil aux termes desquelles « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits » s’imposent, sauf dans des cas d’exemptions ou d’exception strictement encadrés.

Cette étude a pour objet d’exposer les mesures exceptionnelles et spéciales prises par le gouvernement permettant de déroger aux obligations nées de certains contrats (1).

Les aménagements ne concernent toutefois que certaines clauses, certaines entreprises limitativement définies ou certains types de contrats, de sorte que tous les acteurs économiques ne bénéficient pas de ces mesures spéciales, alors qu’il ne fait aucun doute qu’ils subiront les conséquences du covid-19.

Dès lors, faute de bénéficier de ces mesures spéciales, ces acteurs ont tout intérêt à s’interroger sur la possibilité d’invoquer le covid-19 et/ou les mesures normatives prises en conséquence, au titre des exemptions du droit commun des contrats permettant au débiteur d’une obligation de s’en exonérer ou de renégocier les termes du contrat (2).

1. Les mesures exceptionnelles et spéciales dérogatoires au contrat

La loi n° 2020-290 adoptée le 23 mars 2020, modifiée par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020, pour faire face à l’épidémie de covid-19 (ci-après ensemble dénommées la « loi d’urgence ») (i) déclare, dans son article 4, un état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter de son entrée en vigueur le 24 mars 2020, durée ensuite prorogée jusqu’au 10 juillet 2020 (ci-après la « période d’urgence sanitaire » et (ii) autorise le gouvernement dans son article 11, à prendre, par ordonnances à effet rétroactif au 12 mars 2020, des mesures afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie.

Spécifiquement, l’article 11, I, c), de la loi d’urgence prévoit la possibilité de modifier, dans le respect des droits réciproques, les obligations des personnes morales de droit privé exerçant une activité économique, à l’égard, notamment, de leurs clients et fournisseurs.

Parmi les ordonnances adoptées le 25 mars 2020 en application de la loi d’urgence, trois d’entre elles retiennent notre attention en ce qu’elles apportent des modifications aux contrats de droit privé en cours.

1.1 Les aménagements de portée générale

Les articles 4 et 5 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 telle que modifiée par les ordonnances n° 2020-247 du 15 avril 2020 et n° 2020-560 du 13 mai 2020 (ci-après ensemble dénommées l’« ordonnance 1 ») prévoient l’aménagement de certaines clauses contractuelles de droit privé relatives, d’une part, aux sanctions applicables au débiteur défaillant (i) et, d’autre part, aux modalités de résiliation ou de renouvellement des contrats (ii), et ce pendant une période courant du 12 mars 2020 au 23 juin 2020 inclus1 (ci-après, la « période de protection »).

(i) L’article 4 de l’ordonnance 1 paralyse les effets des astreintes, des clauses pénales, des clauses résolutoires, ainsi que des clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé qui arriverait à expiration pendant la période de protection.

Spécifiquement :

• si le débiteur n’a pas exécuté une obligation financière, la date à laquelle les astreintes et clauses produiront effet est reportée d’une durée calculée à compter du 23 juin 2020, égale à celle écoulée entre le 12 mars 2020, ou, si elle est plus tardive, la date à laquelle l’obligation est née, d’une part, et la date à laquelle elle aurait dû être exécutée, d’autre part. À titre d’exemple, dans le cadre des clauses résolutoires des baux commerciaux, qui, le plus souvent, prévoient que la résiliation est acquise si, passé un délai d’un mois à compter d’un commandement de payer, le débiteur n’a pas exécuté son obligation de paiement visée dans le commandement : si ce délai expire pendant la période de protection le 30 mars 2020 (soit 19 jours après le 12 mars 2020), le preneur aura jusqu’au (23 juin + 19  jours =) 12 juillet pour s’exécuter, sauf à ce qu’il s’agisse d’une TPE qui dispose d’aménagements spécifiques en matière de paiement des loyers comme exposé au 1.2.1 ci-dessous ;

• si les astreintes ou clauses sanctionnent l’inexécution d’une obligation autre que le paiement d’une somme d’argent dans un délai qui expire postérieurement au 23 juin 2020, la date à laquelle elles produiront effet est reporté d’une durée égale à celle écoulée entre le 12 mars 2020 ou, si elle est plus tardive, la date à laquelle l’obligation est née, d’une part, et le 24 juin 2020, d’autre part ;

• les astreintes et l’application des clauses pénales ayant commencé à courir avant le 12 mars 2020 sont suspendues pendant la période de protection, soit jusqu’au 23 juin 2020 inclus. Le compte reprend donc, à compter du 23 juin 2020, là où il a été suspendu le 12 mars 2020.

(ii) L’article 5 de l’ordonnance dispose que, lorsqu’une convention ne peut être résiliée qu’en respectant un certain délai ou qu’elle est renouvelée automatiquement en l’absence de dénonciation dans un délai déterminé et que ces délais expirent pendant la période de protection, ils sont prolongés de deux mois après cette période, soit jusqu’au 23 août 2020 inclus.

Tous les contrats de droit privé sont concernés par ces dispositions, à l’exclusion (art. 1) :

• des obligations et garanties y afférentes mentionnées aux articles L. 211-36 et suivants du code monétaire et financier (notamment, les obligations financières résultant d’opérations sur instruments financiers par essence spéculatives ou celles conclues avec un établissement financier, une société financière, etc.) ;

• des contrats dont les délais ont déjà été aménagés par la loi d’urgence ou en application de cette dernière (en ce compris, notamment, les contrats de voyages ou séjours ou, pour les microentreprises, le paiement des loyers professionnels, factures de gaz électricité, etc., étudiés supra) ;

• des obligations des personnes assujetties aux obligations de lutte contre le blanchiment (notamment les banques, établissements de crédit, avocats, administrateurs et mandataires judiciaires, experts-comptables, commissaires aux comptes, notaire, etc.) ;

• des obligations relatives aux délais de réflexion (en matière de prêt par exemple), rétractation (en matière de vente à domicile ou à distance par exemple) ou de renonciation prévues par la loi.

Attention, si la sanction attachée à l’inexécution d’une obligation contractuelle peut être paralysée par ces dispositions, l’obligation en elle-même n’est pas remise en cause et devra être exécutée avant l’expiration du terme de la suspension fixé par l’ordonnance 1, sauf à démontrer que l’inexécution est la conséquence d’un cas de force majeure, ce qui fait l’objet des développements ci-après.

1.2 Les aménagements spécifiques

1.2.1 Les aménagements spécifiques afférents aux très petites entreprises (TPE) dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie de covid-19 ou aux entreprises en difficulté

Aux termes de l’ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020 (l’« ordonnance 2 »), précisée par le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 modifié par le décret n° 2020-433 du 16 avril 2020 :

(i) les entreprises (en ce compris les indépendants et professions libérales) qui sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité mentionné à l’article 1 de l’ordonnance n° 2020-317 du 25 février 2020, à savoir celles qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :

  • avoir moins de dix salariés ;
     
  • réaliser un chiffre d’affaires inférieur à un million d’euros ;
     
  • présenter un bénéfice imposable + rémunération du dirigeant inférieurs à 60 000 € ;
     
  • ne pas être dirigée par une personne disposant d’un contrat de travail à temps complet et bénéficiant d’indemnités journalières supérieures à 800 € au titre de la période du 1er au 31 mars 2020 et à 1 500 € au titre des périodes du 1er au 30 avril 2020 et du 1er au 31 mai 2020 ;
     
  • ne pas être contrôlées par une société commerciale ;
     
  • ne pas être en liquidation judiciaire au 1er mars 2020 ;
     
  • avoir subi (i) une interdiction d’accueil au public intervenue entre le 1er et le 31 mars 2020 et/ou entre le 1er et le 30 avril 2020 et/ou entre le 1er et le 31 mai 2020 ou (ii) une perte de chiffre d’affaires de plus de 50 % au mois de mars 2020 et/ou avril 2020 et/ou mai 2020 par rapport à la même période de l’année 2019 ;

(ii) celles qui poursuivent leur activité dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire munies d’une attestation de l’un des mandataires de justice désignés par le jugement qui a ouvert cette procédure ;

(1) peuvent demander le report ou l’échelonnement du paiement de leurs factures d’eau, de gaz et d’électricité exigibles et non encore acquittées entre le 12 mars 2020 et la fin de la période d’urgence sanitaire, soit le 10 juillet 20202 ; le paiement des échéances ainsi reportées est réparti, de manière égale, sur les échéances de paiement des factures postérieures à la fin de la période d’urgence sanitaire, sur une durée ne pouvant être inférieure à six mois3 ;

(2) ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et le 10 septembre 2020, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce4.

Attention :

• l’ordonnance 2 ne vise pas les redevances d’occupation (notamment celles dont sont redevables les occupants dans le cadre de convention d’occupation du domaine public) ;

• l’ordonnance 2 n’envisage pas de report ou de suspension des loyers mais ne vise que les effets (sanctions) attachés au non-paiement pendant le délai mentionné dans ladite ordonnance.

En d’autres termes, à compter du 10 septembre 2020, le bailleur pourra faire à nouveau valoir ses droits et, notamment, faire délivrer un commandement visant la clause résolutoire du bail du débiteur n’ayant pas procédé au paiement des loyers pendant cette période.

1.2.2 Les aménagements spécifiques afférents aux contrats de voyages ou de séjours

L’ordonnance n° 2020-315 du 25 mars 2020 (l’« ordonnance 3 ») aménage les règles relatives à l’annulation, par les clients, de leurs contrats de voyages ou séjour (transport + hébergement et/ou autres prestations visées à l’article L. 211-2 du code de tourisme).

Aux termes de l’article 1 de l’ordonnance 3, les règles sur la résolution des contrats de l’article L. 211-14 du code de tourisme sont aménagées pour les résolutions notifiées entre le 1er mars et le 15 septembre 2020 inclus, le voyagiste pouvant soit rembourser le client, comme le droit applicable le prévoit, soit émettre un avoir du montant des sommes versées au jour de l’annulation, en application de la dérogation introduite par l’ordonnance 3.

Le voyagiste doit ensuite, dans les trois mois de la demande d’annulation, proposer une prestation équivalente à celle annulée et pour le même prix, valable pendant dix-huit mois.

À défaut de la conclusion du contrat relatif à la nouvelle prestation à l’issue de ce délai de dix-huit mois, le voyagiste procède au remboursement de l’intégralité des paiements effectués au titre du contrat résolu ou d’un montant égal au solde de l’avoir qui n’a pas été utilisé.

Attention : sont exclus du bénéfice de cette mesure dérogatoire, notamment :

  • les vols secs (achetés sans autre prestation) ;
     
  • les voyages en train, bus ou ferries ;
     
  • les « services touristiques » réservés à l’étranger (dans cette hypothèse, la réglementation locale s’appliquera) ;
     
  • les séjours annulés avant le 1er mars 2020 ;
     
  • les séjours programmés au-delà de la date d’application des présentes mesures.

Ces mesures spéciales étant limitées à certaines stipulations contractuelles, aux entreprises les plus fragiles ou à certains types de contrats alors que tous les acteurs vont subir les conséquences économiques de la crise sanitaire, il importe d’examiner si le covid-19 et/ou les mesures normatives prises en conséquence peuvent être invoqués par une partie comme motif d’exemption dans le cadre des exceptions de droit commun des contrats.

2. Le covid-19 envisagé comme motif d’exemption de droit commun

Nonobstant la force obligatoire du contrat stipulée à l’article 1103 du code civil, la défaillance dans l’exécution de ses obligations peut être justifiée ou entraîner la renégociation des termes du contrat dans certains cas prévus par la loi.

Ainsi, la défaillance de son cocontractant peut être invoquée par une partie sur le fondement de l’exception d’inexécution (2.1). Également, l’impossibilité d’exécution peut, sous certaines conditions, être justifiée par les obstacles insurmontables rencontrés par le débiteur de l’obligation, lequel pourra alors invoquer la force majeure pour s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité contractuelle (2.2). Enfin, le changement de circonstances ayant prévalu lors de la conclusion du contrat peut, dans certains cas, permettre une renégociation des termes de celui-ci en application de la théorie de l’imprévision (2.3).

Nous examinerons si le covid-19 et les mesures prises pour en limiter la propagation peuvent être envisagés comme constituant un de ces motifs d’exemption contractuelle classique par les parties au contrat.

2.1 L’exception d’inexécution

L’arrêté n° 0064 du 14 mars 2020 pris en application de la loi d’urgence auquel s’est substitué le décret n° 2020-293 du 24 mars 2020 dans sa version en vigueur le 25 avril 2020 (le « décret ») interdit, jusqu’au 11 mai 2020, l’accueil du public dans un grand nombre d’établissements, ce qui concerne, notamment, la majorité des magasins de vente, restaurants, centres commerciaux et salles de spectacles, de sorte que les preneurs ne sont plus en mesure d’exploiter leur fonds de commerce dans le local commercial donné à bail.

Dans ce contexte, en dehors des dispositions spécifiques prises en faveur des TPE ci-avant exposées, se pose, notamment, la question de l’exonération du preneur au titre de son obligation de payer les loyers durant la période d’interdiction sur le fondement de l’exception d’inexécution, prévue aux articles 1219 et 1220 du code civil.

Aux termes de l’article 1219, « une partie peut refuser d’exécuter son obligation alors même que celle-ci est exigible, si l’autre partie n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ».

Il importe peu que la cause de l’inexécution, partielle ou totale5, soit imputable au débiteur, dès lors que cette inexécution est établie et pour autant qu’elle soit suffisamment grave pour justifier l’inexécution, le créancier est fondé à se prévaloir de l’exception d’inexécution.

Cette disposition n’exigeant pas l’intervention a priori du juge, l’appréciation du caractère suffisamment grave de l’inexécution qui fonde l’exception invoquée incombe au seul créancier qui l’exercera donc à ses risques et périls. Il s’ensuit que le créancier doit particulièrement veiller à ce que sa riposte soit proportionnée à l’inexécution invoquée6. Par exemple, dans l’hypothèse d’une inexécution partielle, le créancier ne saurait suspendre en totalité sa propre obligation sauf à devoir indemniser le débiteur.

Au contraire de la mise en œuvre des autres sanctions attachées à l’inexécution contractuelle, l’article 1219 du code civil ne prévoit aucune condition d’exercice de l’exception d’inexécution. Le créancier n’a dès lors pas d’obligation de mettre en demeure le débiteur de s’exécuter préalablement à la suspension de sa propre obligation, ni même de lui notifier l’exercice de ce droit.

Tel n’est en revanche pas le cas dans l’hypothèse de l’exercice de l’exception d’inexécution par anticipation prévue par l’article 1220 du code civil qui dispose qu’« une partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais ».

Le mécanisme de l’exception d’inexécution et spécifiquement le dispositif de suspension par anticipation de son obligation présente un intérêt particulier dans le contexte actuel en ce qu’il apparaît applicable aux loyers des locaux commerciaux directement impactés par les mesures d’interdiction imposées par le décret.

En effet, l’article 1719 du code civil applicable aux baux commerciaux prévoit que, par la nature du contrat et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, les obligations essentielles du bailleur sont (i) de délivrer une chose louée conforme à la destination stipulée au bail commercial (c’est-à-dire l’activité qui y est exercée) et (ii) d’assurer au preneur une jouissance paisible de la chose pendant la durée du bail.

La jurisprudence précise que les clauses du contrat de bail ne peuvent décharger le bailleur de son obligation de délivrance d’un local en état de servir à l’usage contractuellement prévu, ce qui suppose que le bailleur réalise les travaux nécessaires à cet usage ou en supporte le coût7. Ainsi, les causes de l’absence de délivrance conforme importeraient peu : le bailleur resterait garant de l’usage contractuel des locaux loués, et ce pendant toute la durée du contrat. L’absence de délivrance conforme à l’usage convenu suffirait à justifier l’exception d’inexécution par le preneur et serait donc indépendante de toute inexécution à proprement parler. Cette dernière serait alors plus du domaine de la responsabilité contractuelle plus que de l’exception d’inexécution.

Cette garantie ressort d’ailleurs de l’esprit de la loi et notamment des dispositions applicables aux baux, spécifiquement :

• de l’article 1721 du code civil, aux termes duquel il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts cachés de la chose louée qui en empêchent l’usage, quand bien même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail ;

• de l’article 1722 qui prévoit qu’en cas de destruction totale du bien loué par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit et en cas de destruction partielle, le preneur peut, suivant les circonstances, demander une résiliation ou une diminution du prix.

Une jurisprudence ancienne précise que l’article 1722 est applicable quand le trouble de jouissance résulte du fait de la puissance publique, car la limitation de jouissance du locataire n’est ni inhérente à l’immeuble ni imputable au bailleur8.

Le législateur a ainsi entendu faire peser sur le bailleur le risque final, et ce même lorsque l’inexécution de l’obligation du bailleur provient d’un cas fortuit ou du fait de la puissance publique.

Par analogie, on pourrait donc considérer que, dans le cas particulier des mesures d’interdiction d’accueillir du public imposées par le décret, le preneur serait fondé à solliciter du bailleur une exonération totale ou partielle des loyers en considération de la part de son activité directement impactée par lesdites interdictions pendant leur durée.

C’est en ce sens que de nombreux auteurs ont récemment relevé que l’interdiction de recevoir du public entraînerait une impossibilité d’exploiter conforme à la destination pour nombre de commerces, autorisant le preneur à suspendre son obligation de paiement des loyers pendant la période concernée.

Mais, faute de position jurisprudentielle et, plus généralement, de précédent, il n’est pas déraisonnable de soutenir que l’affirmation ne procède que de l’esprit du texte et d’un raisonnement par analogie et qu’une contradiction peut être envisagée.

Il faut en effet préciser que l’article 1719 dispose que les obligations du bailleur relativement aux locaux conformes à l’usage contractuel est notamment « d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; d’en faire jouir le preneur pendant la durée du bail » impliquant donc des obligations positives.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 9 octobre 1974, a jugé que l’obligation du bailleur d’assurer au preneur la jouissance paisible de la chose louée pendant la durée du bail ne cesse qu’en cas de force majeure9.

On peut alors envisager le cas d’un bailleur qui justifie avoir exécuté ses obligations positives permettant au preneur de jouir paisiblement des locaux pendant la durée écoulée du bail (consistant dans la réalisation des travaux qui lui incombent, le paiement des charges de la copropriété permettant son entretien, le paiement des impôts et taxes sans que le preneur ne soit inquiété, etc.). Si le covid-19 et, en particulier, les mesures prises pour en limiter la propagation, réunit les caractères de la force majeure ou du fait du prince (ce qui fait l’objet de nos développements supra), on peut légitimement se demander si le bailleur ne pourrait pas être regardé comme ayant exécuté ses obligations positives, voire comme étant déchargé de son obligation d’assurer la jouissance paisible, de sorte que le preneur ne pourrait lui opposer un trouble de jouissance pour justifier une suspension des loyers.

Par ailleurs, si on examine la question sous l’angle de la responsabilité contractuelle du bailleur, dès lors que celui-ci a exécuté ses obligations positives, il pourrait être soutenu que l’interdiction « du fait du prince » qui conduirait à une perte de jouissance n’est pas imputable au bailleur et que l’inexécution en découlant n’engage pas sa responsabilité contractuelle. Aussi le preneur ne pourrait-il pas en tirer argument pour suspendre sa propre obligation.

La question n’est donc vraisemblablement pas aussi tranchée qu’il y paraît et promet des débats judiciaires intenses, qui, en outre, dépendront au premier chef des stipulations contractuelles mais également de celui, du bailleur ou du preneur, qui se trouve être la partie économiquement la plus forte.

En tout état de cause, l’exception d’inexécution ne permet qu’une suspension de l’exigibilité de la créance pendant une durée transitoire devant, en principe, se solder, soit par l’exécution volontaire ou judiciaire de la contre-prestation, soit par la résolution judiciaire du contrat, soit par la réduction du prix ainsi qu’en dispose l’article 1217 du code civil.

Bien que le propos ait été volontairement cantonné aux relations contractuelles entre bailleur et preneur, le recours au mécanisme de l’exception d’inexécution dans le contexte de la crise sanitaire actuelle ne se limite évidemment pas au sort des loyers commerciaux et pourrait utilement être invoqué dans d’autres situations générées par les mesures d’interdiction et de confinement telles, la suspension de l’obligation de paiement du client non livré ou la suspension des échéances d’un abonnement relatif à une prestation suspendue.

Mais l’exception d’inexécution ne pouvant être invoquée que pour autant que le contrat prévoit l’exécution simultanée de prestations réciproques, il est nécessaire de s’interroger sur les autres exemptions de droit commun permettant au débiteur de s’exonérer de son obligation, ou de la limiter.

2.2 La force majeure

2.2.1 La force obligatoire du contrat ne peut céder que devant les obstacles insurmontables s’opposant à son exécution lesquels sont alors considérés comme des cas de force majeure. Cette dernière peut être invoquée par le débiteur pour obtenir, la suspension, la résolution, la résiliation ou la réduction du contrat, selon les circonstances d’espèce, dans les conditions ci-après exposées.

En premier lieu, il faut vérifier si la définition et les conditions d’application de la force majeure ont été contractuellement aménagées par les parties dans le contrat.

En effet, les parties peuvent choisir d’étendre ou de restreindre voire d’écarter la notion de force majeure et son application dans des situations prédéterminées, de sorte que, lorsque ces conditions contractuelles sont remplies, les cocontractants sont tenus d’en respecter les termes conformément aux dispositions de l’article 1103 ci-avant rappelées.

Ensuite, aux termes de l’article 1218 du code civil : « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ».

Ainsi, sous réserve d’éventuels aménagements contractuels, un obstacle à l’exécution d’un contrat constitue un cas de force majeure pour autant qu’il réunisse, pour le débiteur qui l’invoque, trois critères cumulatifs : l’événement doit être :

  • extérieur au débiteur, de sorte qu’il échappe à son contrôle et qu’il ne saurait lui être imputable ;
     
  • imprévisible, à savoir qu’il ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat ;
     
  • irrésistible, c’est-à-dire que ses effets ne peuvent être évités par la mise en œuvre de mesures appropriées.

Il incombera au cocontractant qui l’invoque de motiver tout particulièrement son impossibilité à mettre en œuvre des mesures appropriées permettant l’exécution de ses obligations (condition d’irrésistibilité), ainsi que le lien de causalité entre la cause de force majeure et l’inexécution invoquée.

En effet, l’impossibilité d’exécution requise par le texte s’entend d’une véritable impossibilité, c’est-à-dire d’un obstacle insurmontable, et non de simples difficultés, seraient-elles très grandes. Il faut que l’événement soit tel que « ses effets ne puissent être évités par des mesures appropriées ».

Aussi, la doctrine retient-elle que, dès lors qu’il peut exécuter le contrat, le débiteur y est tenu, même si cette exécution doit être pour lui très onéreuse10.

Également, la jurisprudence retient que, sauf obstacle insurmontable, le contrat doit être exécuté même s’il ne présente plus d’intérêt pour une partie du fait des circonstances exceptionnelles11.

Surtout, la Cour de cassation exclut le concept de force majeure financière, notamment dans une décision du 16 septembre 2014 : « le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure »12.

Ensuite, le débiteur défaillant doit également en tirer des conséquences proportionnées, l’effet attaché à l’impossibilité constatée devant être « l’exacte mesure » de l’impossibilité. Aussi, la qualification de force majeure a-t-elle pour effet de permettre (art. 1218, al. 2) :

• en cas d’impossibilité temporaire, la suspension des obligations contractuelles pendant la période d’impossibilité d’exécution ;

• en cas d’impossibilité définitive, soit :

  • la résolution du contrat (effet rétroactif de toutes les dispositions du contrat),
  • la résiliation du contrat si l’impossibilité survient en cours d’un contrat à exécution successive (seuls les effets pour l’avenir du contrat sont concernés),

• la résolution/résiliation en cas de force majeure ayant la particularité de jouer de plein droit (c’est-à-dire sans qu’il soit nécessaire de demander l’autorisation au juge) ;

• la réduction du contrat en cas d’impossibilité partielle d’exécution.

Ces principes, étant rappelés, dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques, on peut légitimement se demander si l’épidémie de covid-19 peut être regardée comme un cas de force majeure.

2.2.2 L’étude de la jurisprudence historique spécifique aux épidémies démontre que leur seule existence ne suffit pas à constituer un cas de force majeure, au motif que l’épidémie en cause ne présente généralement pas les caractères d’imprévisibilité et surtout d’irrésistibilité requis :

• une épidémie de dengue touchant une zone géographique déterminée n’était ni imprévisible dans son apparition en raison de sa récurrence ni irrésistible dans ses effets en ce qu’il était possible de s’en prémunir par la mise en œuvre de protections individuelles13 ;

• une épidémie de peste dans une région voisine de celle où devait faire escale un bateau de croisière ne constituait pas un cas de force majeure justifiant l’annulation et le remboursement de la croisière en ce que, notamment, il était possible de se protéger de ses effets par la prise d’un traitement antibiotique préventif14 ;

• l’épidémie H1&N1 invoquée par une entreprise acheteuse d’essuie-mains en tissus pour résilier son contrat avec le fabriquant a été considérée comme ne constituant pas une cause de force majeure, au motif que le fournisseur avait proposé de les remplacer par des produits jetables conformes aux nouvelles normes sanitaires prises en conséquence de l’épidémie (résistibilité), par ailleurs largement annoncée et prévue (prévisibilité)15.

En revanche, une épidémie de brucellose a été retenue comme présentant les critères de la force majeure, la cour relevant que cette maladie était d’une « virulence inattendue » et de « contagion redoutable » associée à « période d’incubation indécelable et imprévisible » pour caractériser les critères d’imprévisibilité et d’irrésistibilité, outre l’extériorité inhérente à une épidémie16.

Le 12 mars 2020, la cour d’appel de Colmar a reconnu à l’épidémie du covid-19 les caractéristiques de la force majeure, considérant que l’intéressé porteur du virus (extériorité et imprévisibilité) n’avait pu comparaître à l’audience au motif que, dans le délai imposé pour statuer, il n’était pas possible de s’assurer de l’absence de risque de contagion et de mettre en œuvre des mesures appropriées permettant de surmonter le non-respect des dispositions légales applicables aux circonstances d’espèce (irrésistibilité)17.

Depuis cet arrêt, plusieurs décisions concernant la tenue d’audiences hors la présence des mis en cause ont été rendues dans le même sens et sur le même fondement18. D’un autre côté, une des ordonnances prises en application de la loi d’urgence a adapté pour la période de confinement les modalités de tenue des audiences, de sorte que l’irrésistibilité pourrait ne plus être retenue à l’avenir.

2.2.3 Dans le cas spécifique du covid-19, l’Organisation mondiale de la santé a déclaré le covid-19 « urgence de santé publique de portée internationale » le 30 janvier 2020. Il s’ensuit que les critères d’extériorité et d’imprévisibilité n’apparaissent pas devoir poser question pour les contrats conclus avant cette date puisqu’il s’agit d’une épidémie :

• soudaine, hautement contagieuse et potentiellement mortelle, causée par un virus dont la forme était jusqu’à ce jour inconnue ;

• associée à une obligation de confinement qui rend encore plus difficile l’exécution des contrats ;

• et dont il n’existe aucun moyen de se prémunir en l’absence de traitement préventif et/ou curatif.

Mais, au regard des critères jurisprudentiels et spécifiquement le caractère d’irrésistibilité rappelé plus haut et des mesures d’adaptation du droit qui ont été prises en application de la loi d’urgence, il n’est pas certain que l’épidémie de covid-19 stricto sensu puisse être considérée comme un cas de force majeure exonérant, par exemple, un preneur de son obligation de paiement du loyer, ne serait-ce que parce qu’il a pu bénéficier des reports de charges et aides d’État mises en œuvre. Et d’autant moins que cette obligation consiste en un paiement d’une somme d’argent à propos de laquelle on a vu que la jurisprudence refusait que la force majeure soit un motif d’exemption.

Cela étant, certaines décisions ont retenu que les critères de force majeure étaient réunis non pas du fait à l’origine de l’impossibilité mais des conséquences des mesures normatives prises par l’administration en présence dudit fait. En ce sens, dans un arrêt du 30 juin 2000, la cour d’appel de Rennes a considéré que l’apparition de vices justifiant la fermeture administrative d’un hôtel pour défaut de sécurité et, partant, l’impossibilité d’exploitation par la société crédit-preneuse était constitutive d’un cas de force majeure justifiant la suspension de ses obligations financières au titre du contrat de crédit-bail19.

Si on prend l’exemple des commerces qui se sont vu interdire de recevoir du public alors que cette réception est consubstantielle à leur activité, ce n’est pas l’épidémie elle-même qui constitue un cas de force majeure, mais les règles applicables à son activité. Dès lors qu’il est empêché d’exploiter l’activité contractuellement prévue au bail et ne dégage en conséquence aucun chiffre d’affaires, il se trouve, pour des raisons qui lui sont extérieures, imprévisibles et irrésistibles, dépourvu de toute ressource pour payer son loyer.

Également, l’impossibilité de produire des biens et, partant, de les livrer à son client dans les délais impartis pourrait être regardée comme justifiée par les mesures de confinement prescrites pour limiter la propagation du covid-19 réunissant en l’espèce les critères de la force majeure.

Dans certains cas, le covid-19 ou les mesures prises pour en limiter la propagation paraissent pouvoir être invoquée comme constituant un cas de force majeure sous réserve que le débiteur justifie (i) qu’il a été véritablement empêché d’exécuter son obligation, (ii) qu’il ne pouvait mettre en œuvre aucune mesure alternative pour la réaliser, ne serait-ce que partiellement et (iii) que la conséquence qui s’en est suivie est proportionnée à la mesure de l’impossibilité.

2.3 L’imprévision

L’imprévision désigne les situations dans lesquelles l’exécution d’un contrat subit un profond déséquilibre à la suite d’un changement imprévisible des circonstances existantes lors de sa conclusion, de sorte que son exécution est rendue beaucoup plus onéreuse pour une des parties.

À la différence de la force majeure, il ne s’agit pas de l’impossibilité d’exécuter une obligation mais de l’augmentation du coût de l’exécution pour le débiteur de l’obligation.

Consacrée par la loi aux termes de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 à l’article 1195 du code civil, l’imprévision ne s’applique qu’aux contrats signés après le 1er octobre 2016, date de son entrée en vigueur. Elle n’est applicable à des contrats conclus antérieurement que si elle est expressément envisagée.

Désormais, sauf à être expressément exclue du champ contractuel et sauf dans certaines matières20, l’imprévision est applicable à tous les contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.

Les dispositions de l’article 1195 du code civil ne revêtant pas un caractère d’ordre public, les parties peuvent convenir d’écarter totalement ou partiellement les effets de l’imprévision pour choisir d’en supporter les conséquences (clauses dites de « non-révision » ou anti-hardship) ou d’en déterminer par avance le champ d’application, voire d’en prévoir leurs conséquences (clause dite « d’imprévision »).

Il faut donc, en premier lieu, vérifier si les parties ont prévu, ou non, une clause d’acceptation ou d’encadrement de l’imprévision.

Comme pour la force majeure, l’imprévision ne peut être invoquée que si la perturbation affectant le contrat provient d’un changement de circonstances postérieur à sa conclusion, lequel était imprévisible au moment de sa conclusion.

Sous ces réserves, invoquer l’imprévision impose au cocontractant qui s’estime victime du changement de circonstances de démontrer que l’exécution du contrat est devenue « excessivement onéreuse » du fait de ces circonstances et non pas seulement difficiles.

Cette formulation est source d’incertitude en ce qu’elle renvoie à une analyse subjective du caractère « excessivement onéreux » de la part des parties comme, le cas échéant, du juge.

La renégociation du contrat doit, dans un premier temps, faire l’objet d’une demande au co-contractant, la tentative d’accord amiable étant un préalable nécessaire à toute intervention du juge. Le texte n’impose aucune obligation de renégociation à l’autre partie en dehors de l’exigence de bonne foi de l’article 1104 nouveau du code civil.

Ce n’est que dans l’hypothèse d’une « absence d’accord dans un délai raisonnable » qu’une partie pourra saisir unilatéralement le juge en vue de procéder à la révision du contrat ou y mettre fin, avec l’incertitude évoquée plus haut.

Attention : sauf accord conventionnel, les parties sont tenues de continuer à exécuter leurs obligations durant toutes les phases prévues à l’article 1195 du code civil, faute de quoi elles engageraient leur responsabilité contractuelle.

Cette obligation limite ainsi l’intérêt d’invoquer l’imprévision, notamment pour des débiteurs impactés en l’occurrence par la crise sanitaire, outre le fait qu’elle ne permet que la révision du contrat et non pas l’exonération des obligations y afférentes.

L’imprévision paraît néanmoins un fondement utile pour adapter le contrat aux difficultés rencontrées par une partie du fait du covid-19 ou des mesures normatives prises en conséquence.

Ainsi, un preneur pourrait utilement se prévaloir de l’imprévision pour renégocier les termes de son bail commercial (conclu après le 1er octobre 2016 faute de stipulations contractuelles spécifiques) pour obtenir une baisse, voire une exonération, du loyer pendant cette période dans l’hypothèse de la fermeture totale ou partielle de son commerce du fait de l’interdiction de recevoir du public (ce fondement devant être privilégié dans l’hypothèse où les loyers auraient été payés sans recours préventif au mécanisme de l’exception d’inexécution) ou, surtout, de la baisse de son chiffre d’affaires consécutive aux mesures de confinement limitant les déplacements.

Également à titre d’exemple, une entreprise de BTP bénéficiant, à ce titre, de mesures dérogatoires aux fins de poursuite des chantiers pendant la période de confinement, devra mettre en place des mesures d’hygiène et de sécurité spécifiques destinées à protéger ses salariés ainsi que des procédures particulières lui permettant de se faire livrer les matériaux nécessaires à l’exécution de son obligation, lesquelles viendront nécessairement impacter l’économie financière du contrat. Dans une telle hypothèse, l’imprévision peut être invoquée pour tenter de pallier les conséquences financières du covid-19 et des mesures normatives y afférentes.

* * *

Le covid-19, conjugué aux mesures normatives exceptionnelles prises pour en limiter la propagation, génère une crise économique inédite, dont les conséquences, sur le plan juridique et spécifiquement sur l’application des exemptions du droit commun des contrats, devront être appréciées de manière singulière, au cas par cas, sans qu’aucun précédent similaire permette d’anticiper assurément les décisions qui seront retenues par les juridictions.

Bien que l’on puisse considérer que les fondements juridiques ci-avant exposés trouveront application dans un certain nombre de situations contractuelles, la négociation amiable devra à l’évidence être privilégiée dans toute la mesure du possible, ce d’autant que la crise impactera la majorité des acteurs économiques et mettra donc en présence des parties souvent également fragilisées.

 

 

Notes

1. Ord. n° 2020-560, 13 mai 2020, art. 1er.

2. Ord. 2, art. 2.

3. Ord. 2, art. 3.

4. Ord. 2, art. 4.

5. Not., Civ. 1re, 18 juill. 1995, n° 93-16.338, RTD civ. 1996. 395, obs. J. Mestre .

6. Not. Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance du 10 février 2016 ; chap. IV, sou- sect. 1 : l’exception d’inexécution.

7. Civ. 3e, 31 oct. 2012, n° 11-12.970, RTD com. 2013. 64, obs. F. Kendérian .

8. Civ. 3e, 15 janv. 1941, DA 1941. 66 ; v. égal., TGI Paris, 22 juin 1970, JCP 72. IV. 23.

9. Civ. 3e, 9 oct. 1974, n° 73-11.721.

10. A. Bénabent, Droit des obligations, LGDJ, coll. « Précis Domat ».

11. Com. 23 janv. 1968, JCP 1968. III. 15422.

12. En ce sens, v. not. Com. 16 sept. 2014, n° 13-20.306, Dalloz actualité, 2 oct. 2014, obs. X. Delpech ; D. 2014. 2217 , note J. François ; Rev. sociétés 2015. 23, note C. Juillet ; RTD civ. 2014. 890, obs. H. Barbier .

13. Nancy, 1re ch. civ., 22 nov 2010, n° 09/00003.

14. Paris, 25e sect. B, 25 sept. 1998, n° 1998-024244.

15. Besançon, 2e ch. comm., 8 janv. 2014, n° 12/02291.

16. Agen, 21 janv. 1993, Jurisdata n° 1993-040559.

17. Colmar, 6e ch., 12 mars 2020, n° 20-01098.

18. Colmar, 16 mars 2020 n° 20/01142, AJ contrat 2020. 235 ; Rennes, 19 mars 2020, n° 20/01229 ; Aix-en-Provence, 19 mars 2020, n° 20/00344 ; Rouen, 17 mars 2020, n° 20/01227.

19. Rennes, ch 1, sect. B, 30 juin 2000.

20. Attention : l’article 1195 du code civil est exclu dans certaines matières. Ainsi, en application des dispositions de l’article L. 211-40-1 du code monétaire et financier, les obligations portant sur les opérations sur les titres ainsi que celles reposant sur la spéculation financière sont expressément exclues.