Nantes, juin 2025, direction les quartiers nord, connus des services de police pour ses tours HLM, ses trafics de stupéfiants et ses expulsions. Cette fois, c’est dans les beaux quartiers d’Orvault, commune dont dépend le commissariat de secteur, que se rendent la commandante de police Cécile Pichon et son adjoint, le major Cédric Moreau. « Ce n’est pas des missions qu’on aime faire », lance-t-elle dans la voiture qui les emmène au domicile d’un retraité, ancien architecte, qui se fait expulser de son logement avec son épouse après avoir « perdu pied » et s’être enlisé dans les dettes. Le véhicule se fraye un chemin au milieu d’une enfilade de voitures dans une allée ombragée et encadrée de propriétés cossues. Au numéro indiqué pour l’intervention, des acquéreurs potentiels et des artisans venus faire des devis se pressent dans la maison ouverte par un huissier. Le juge a ordonné la vente aux enchères de la maison et de son immense terrain. L’annonce est parue pour des visites au début de l’après-midi et une présence policière a été sollicitée ainsi que l’assistance d’un serrurier pour accompagner l’huissier. L’occupant n’a pas opposé de résistance. Il circule, hagard, dans sa maison meublée, remplie de bibelots et de photos, au milieu des visiteurs. « Il a eu plusieurs occasions de réagir mais il n’a jamais répondu à nos sollicitations et courriers », regrette Erwan Hamard, l’huissier mandaté par l’avocat du créancier. « Sa dette n’est pas conséquente d’un point de vue immobilier mais ses biens ne suffisaient pas à la couvrir. Le logement était sa seule plateforme de solvabilité », explique-t-il.
Dans son secteur, la commandante a davantage l’habitude des expulsions de logements sociaux que du parc privé. Au moins une fois par semaine entre mars et novembre, après et avant la trêve hivernale, période durant laquelle il est interdit d’expulser. « Ce sont beaucoup de non-paiements de loyers et aussi des troubles à l’ordre public », explique-t-elle. Notamment quand des points de deal ont été identifiés et perturbent la vie de la copropriété. « Pour les expulsions locatives, il y a toujours moi ou mon adjoint sur place avec un chef de poste et un ou plusieurs effectifs supplémentaires sur les opérations compliquées, par exemple s’il faut sortir une famille de six, sept personnes », commente la commandante Pichon. Ce matin, ses équipes ont expulsé des Roms d’un bidonville à cause de points de deal et de coups de feu, plus fréquents « depuis novembre 2024 ». « Le problème c’est qu’on ne fait que déplacer le problème », constate-t-elle, pointant une présence historique, importante et plutôt sédentaire des Roms dans la ville. La cheffe de secteur gère la sécurité sur trois communes avec de gros besoins – c’est plus que la plupart des commissariats de secteur nantais. Elle dispose d’une large marge de manœuvre pour les contrôles d’identité dans les quartiers difficiles grâce à des...