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La responsabilité pour insuffisance d’actif : faute de gestion nécessairement antérieure et montant maximal de la condamnation

L’action en responsabilité pour insuffisance d’actif requiert la démonstration d’une faute de gestion antérieure au jugement d’ouverture et la détermination du montant de cette insuffisance, préjudice réparable maximal.

« Il n’y a jamais d’autre difficulté dans le devoir, disait Alain, que de le faire ».

Les actions en sanctions, au premier rang desquelles, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif, constituent encore un moyen de moraliser la vie des affaires à l’endroit de certains, qui se soustraient intentionnellement à leur devoir. Il est assez légitime de s’interroger sur l’incidence des fautes des dirigeants sur la défaillance de l’entreprise débitrice, et de mettre en cause, le cas échéant leur responsabilité et ainsi concourir à la réparation du préjudice subi par les créanciers.

L’action en responsabilité du dirigeant pour insuffisance d’actif présentée comme une déclinaison de la responsabilité civile délictuelle de droit commun à laquelle elle emprunte ses principaux mécanismes, revêt pourtant une nature singulière. La Haute juridiction, à l’instar du Conseil constitutionnel (Cons. const. 26 sept. 2014, n° 2014-415 QPC, D. 2014. 1871 ; ibid. 2015. 124, obs. P. Brun et O. Gout ; Rev. sociétés 2014. 753, obs. P. Roussel Galle ), refuse, dans une considération étroite de la notion de « punition », de la considérer comme une sanction ayant le caractère d’une punition, même si par certains aspects elle recouvre un caractère sanctionnateur. Mais, la Cour de cassation a fini par lui reconnaître un caractère sui generis, en énonçant que « l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif diffère d’une action en responsabilité de droit commun en ce que le juge a la faculté, même après avoir retenu l’existence d’une faute de gestion commise par un dirigeant, de ne pas prononcer de condamnation ou de moduler le montant de la condamnation indépendamment du préjudice subi par les créanciers de la société en liquidation, ce qui garantit une prise en compte proportionnée des circonstances de chaque espèce » (Com. 12 juin 2019, n° 17-23.176). Rappelons toutefois, que depuis la loi Sapin II, la responsabilité du dirigeant ne pourra être engagée en cas de simple négligence, visant à épargner le malchanceux, le maladroit.

Partant, il incombera au demandeur de faire la démonstration d’une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif, ce qui suppose de rapporter la preuve du triptyque traditionnellement requis en matière de responsabilité de droit commun, à savoir la faute, le préjudice et le lien de causalité. La notion de faute de gestion est protéiforme et les juges du fond disposent, en principe, d’un pourvoi souverain pour l’apprécier. Ils se réfèreront à l’attitude qu’aurait eu un dirigeant raisonnable en pareille circonstance, et relèveront « des fautes intentionnelles d’une particulière gravité incompatibles avec l’exercice normale de la fonction sociale ». Mais ils exigeront aussi la...

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