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La gratuité de l’acquisition s’oppose à la théorie de l’apparence

Seul peut bénéficier de la prescription acquisitive abrégée celui qui a acquis un immeuble de bonne foi et par juste titre, lequel suppose un transfert de propriété consenti par un tiers qui n’est pas le véritable propriétaire.

par Nicolas Le Rudulierle 28 octobre 2015

La théorie de l’apparence et le mécanisme de l’usucapion tendent tous les deux à consacrer en droit une situation de fait. À cet égard, ces deux principes participent à la défense de l’intérêt général visant à assurer la sécurité juridique des transactions. Au-delà de cette contribution commune, les deux techniques divergent quant à leurs fondements et, par conséquent, quant à leurs conditions de mise en œuvre.

En matière immobilière, la prescription acquisitive ne peut au mieux intervenir qu’après l’écoulement d’un délai de dix années. Il s’agit à la fois de gratifier en protégeant du statut de propriétaire celui qui, de bonne foi, a utilisé la chose et d’offrir un délai raisonnable au verus dominus pour qu’il puisse faire utilement reconnaître son droit. À l’inverse, l’application de la théorie de l’apparence dépouille immédiatement le véritable propriétaire de son droit. Ce caractère instantané du transfert explique que la règle error communis facit jus repose sur des conditions particulièrement strictes sur lesquelles revient la présente décision.

Comme en écho à l’arrêt fondateur de 1897 (Civ. 26 janv. 1897, DP 1900. I. 33, note Sarrut), c’est la découverte tardive d’un testament qui est ici à l’origine de l’affaire. Au décès de M. R…, sa fille, Mme R…, recueille diverses parcelles de terre. Dépourvue de postérité, elle les lègue à des membres de la famille à qui les consorts L… opposent une action en délivrance de leurs legs en se fondant sur la découverte d’un testament olographe de M. R… les instituant légataires universels.

Pour combattre l’arrêt de cour d’appel ayant fait droit à cette demande, les légataires de Mme R. opposaient à titre principal la théorie de l’apparence et, de façon subsidiaire, le bénéfice de l’article 2272 du code civil.

Il est effectivement admis que le tiers de bonne foi qui a agi sous l’empire de l’erreur commune ne tient son droit ni du propriétaire apparent ni du propriétaire véritable. Il en est investi par le seul effet de...

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