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Responsabilité pénale des personnes morales : la chambre criminelle confirme sa position

Sans mieux rechercher si des manquements résultent de l’abstention d’un des organes ou représentants de sociétés prévenues et s’ils avaient été commis pour le compte de ces sociétés au sens de l’article 121-2 du code pénal, une cour d’appel ne justifie pas sa décision.

par Lucile Priou-Alibertle 9 novembre 2012

Les faits de l’espèce sont relativement simples : à l’occasion de travaux d’aménagement d’une école, deux employés d’une société, travaillant à la mise en place d’une charpente, sont blessés par l’écroulement d’un mur de façade et de la charpente elle-même. La société chargée de la maçonnerie et celle en charge de la charpente ont, toutes deux, été renvoyées devant le tribunal correctionnel. Les juges du fond sont entrés en voie de condamnation à l’égard de ces deux personnes morales et, se prononçant sur les intérêts civils, ont opéré un partage de responsabilité entre les deux sociétés.

Les auteurs du pourvoi invoquent trois moyens dont deux prospèrent. Le second moyen, dont la solution est mise en exergue dans le présent commentaire, était tiré de l’irrespect de l’article 121-2 du code pénal, fondant la responsabilité pénale des personnes morales. Les auteurs du pourvoi indiquaient au terme d’un moyen particulièrement étoffé que les juges du fond avaient violé l’article 121-2 précité en ne mentionnant pas quels organes ou représentants avait commis une faute susceptible d’engager la responsabilité pénale des personnes morales. La motivation de la cour d’appel était la suivante : « le manque de rigueur auquel a présidé le déroulement du chantier, sans que les deux entreprises concernées y remédient, en se conformant autant aux dispositions légales qu’aux prescriptions contractuelles a constitué un manquement fautif, qui a été en relation de causalité directe immédiate avec l’accident du travail dont ont été victimes les deux employés ».

La Cour de casstion casse, estimant qu’en ne recherchant pas si les manquements étaient l’œuvre d’un organe ou représentant de la société et s’ils avaient été commis pour leur compte, la cour d’appel n’avait pas justifié sa décision. Chacun garde en mémoire les errements jurisprudentiels en matière d’engagement de la responsabilité des personnes morales, initiés par un arrêt du 20 juin 2006. Une partie importante de la doctrine s’était légitimement émue contre une jurisprudence qui semblait permettre aux juges du fond de condamner une personne morale sans préciser l’identité de l’auteur des manquements « dès lors que l’infraction n’a[vait] pu être commise, pour le compte de la société, que par ses organes ou représentants » (Crim. 20 juin 2006, n° 05-85.255, Bull. crim. n° 188 ; D. 2007. Jur. 61, note J.-C. Saint-Pau ; ibid. Pan. 399, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé et S. Mirabail ; ibid. Pan. 1624, obs. C. Mascala ; AJ pénal 2006. 405, obs. P. Remillieux ; Rev. sociétés 2006. 895, note B. Bouloc ; RSC 2006. 825, obs. Y. Mayaud ; RTD com. 2007. 248, obs. B. Bouloc ; JCP...

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