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Compétence du juge de l’exécution saisie comme juridiction de renvoi

Le juge qui se déclare incompétent au profit d’une juridiction autre que répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, désigne la juridiction qu’il estime compétente et cette désignation s’impose aux parties et au juge de renvoi. N’excède donc pas ses pouvoirs, le juge de l’exécution saisi par renvoi d’une autre juridiction pour connaître de difficultés liées à l’exécution d’un titre.

par Mehdi Kebirle 26 juillet 2016

C’est un arrêt riche qui a été rendu par la deuxième chambre civile le 23 juin 2016 au sujet d’un commandement de payer valant saisie immobilière dont un juge de l’exécution avait été saisi. Il a trait, notamment, à une question délicate relative à la distinction qui est apparue en jurisprudence entre les notions de compétence et de pouvoir au sujet du juge de l’exécution.

En l’espèce, un emprunt immobilier avait été souscrit auprès d’une banque. Invoquant la déchéance du terme, la banque a fait signifier à l’emprunter un commandement de payer valant saisie immobilière. Un juge de l’exécution a annulé ce commandement et ordonné la mainlevée de la saisie immobilière. Une cour d’appel a condamné au paiement d’une somme à titre de dommages-intérêts. Elle avait pour cela considéré que le juge de l’exécution avait été saisi d’une telle action par renvoi d’une autre juridiction. Dans son moyen de cassation, le demandeur arguait que le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire. Or, il n’existait selon lui aucun lien entre les demandes de dommages-intérêts présentées et les difficultés liées à l’exécution en cause, si bien que la cour d’appel aurait excédé ses pouvoirs et violé l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire.

La Cour de cassation rejette le grief. Elle affirme que selon le second alinéa de l’article 96 du code de procédure civile, le juge qui se déclare incompétent au profit d’une juridiction autre que répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, désigne la juridiction qu’il estime compétente et que cette désignation s’impose aux parties et au juge de renvoi. En l’occurrence, la cour d’appel était saisie comme juridiction de renvoi, de sorte qu’elle était tenue de statuer sur les demandes qui lui étaient transmises et n’a pas excédé ses pouvoirs.

La solution adoptée paraît à première vue provenir d’une stricte application des dispositions de l’article 96 précité qui, comme le rappelle l’arrêt, oblige dans certains cas le juge qui se déclare incompétent à renvoyer l’affaire à une juridiction qu’il désigne lui-même. Le cas échéant, la juridiction de renvoi n’aura d’autre choix que de connaître de l’affaire, même si elle s’estime elle-même incompétente (Civ. 2e, 7 janv. 1998, n° 95-19.549, Bull. civ. II, n° 2). Cependant, à l’analyse, cette décision n’est pas si anodine que cela. La Cour de cassation ne fait pas...

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