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Droit au respect des biens et distinction entre action en bornage et action en revendication

La distinction française entre l’action en bornage et l’action en revendication de propriété n’est pas critiquable sur le terrain du droit au respect des biens.

par G. Forestle 9 mars 2012

Dans l’arrêt rapporté, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait à se prononcer sur la conventionnalité de la distinction française entre l’action en bornage et l’action en revendication de propriété.

Les faits étaient complexes. À l’origine du litige, des travaux exécutés sur une parcelle, débordant, selon son propriétaire, sur le fonds voisin. S’ensuit une action en interdiction de continuation des travaux et la commission d’un expert pour vérifier si ceux-ci empiétaient ou non sur la parcelle voisine. Puis les parties concluent une transaction, laquelle s’accompagne d’un procès-verbal de bornage. Mais l’une des parties – celle qui se plaignait de l’empiètement – se ravise et refuse de réitérer la transaction devant notaire. Un litige s’élève alors, qui se solde par la condamnation sous astreinte de cette partie à réitérer la transaction comportant le procès-verbal de bornage.

Sauf qu’entre temps, la partie qui se refusait à signer le procès-verbal de bornage avait introduit une action en revendication de propriété, doublée d’une action en démolition des constructions érigées sur la parcelle revendiquée. Cette action était jugée irrecevable par son adversaire, qui se prévalait de l’autorité de la chose jugée de la transaction. Mais les juges appliquèrent ici le principe traditionnel d’indépendance de l’action en bornage et de l’action en revendication de propriété. Ils reconnurent la propriété de la demanderesse sur le terrain et condamnèrent à la démolition des constructions empiétant sur celui-ci. La solution fut confirmée en appel mais sur le fondement de l’article 555 du code civil. Le pourvoi en cassation introduit contre cette décision fut rejeté.

La partie condamnée à démolir se tourna alors vers la CEDH. Son argumentation était principalement articulée autour du droit au respect des biens garanti par l’article 1er du 1er protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme (Convention EDH). Deux griefs étaient principalement élevés à cette occasion.
• D’une part, la requérante soutenait que l’action en revendication de propriété n’aurait pas dû être recevable, puisque l’accord sur le procès-verbal de bornage – qui lui était favorable – portait sur la propriété. Par suite, elle considérait qu’elle avait subi une privation de propriété qui n’était ni légale ni légitime. Ce grief concernait directement la règle française selon laquelle le bornage ne préjuge pas de la propriété.
• D’autre part, elle considérait que, propriétaire...

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