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Non-représentation d’enfant : compétence territoriale et atteinte à l’ordre public international

L’infraction de non-représentation d’enfant est caractérisée lorsque les décisions étrangères attribuant au prévenu la garde exclusive de l’enfant et excluant sa représentation à l’autre parent ont été obtenues par fraude, en méconnaissance de l’ordre public international procédural français.

par Méryl Recotilletle 5 juillet 2023

Dans l’arrêt du 21 juin 2023, la chambre criminelle est revenue sur la compétence du juge français en matière de non-représentation internationale d’enfant ainsi que sur la caractérisation d’une telle infraction en cas d’atteinte à l’ordre public international.

En l’espèce, deux individus de nationalité syrienne se sont mariés à Damas et ont eu trois enfants. Par la suite, l’époux a fixé sa résidence à Moscou et son épouse et les enfants se sont installés à Paris. Le 2 avril 2015, l’épouse a déposé une requête en divorce au greffe du Tribunal de grande instance de Paris. Le 18 mai 2015, l’époux a introduit une demande en divorce devant une juridiction siégeant à Damas. Puis, le 21 juin 2015, il a présenté une requête afin de constater que leur fils cadet avait atteint la limite d’âge légal de placement sous la garde de sa mère. Le 22 septembre 2015, le juge de Damas, a, par voie d’ordonnance, prononcé l’expiration de la garde de la mère et la remise du mineur au père. En octobre 2015, pendant que son épouse et son fils étaient en vacances aux Émirats arabes unis, l’époux a sollicité d’un juge de Dubaï, au regard de la décision du juge de Damas, une interdiction de voyage à l’égard de son fils. Par ordonnance du 22 octobre 2015, cette demande a été accueillie. Par conséquent, le mineur a été remis à son père le 11 novembre 2015. Entre-temps, le 30 octobre 2015, le juge aux affaires familiales de Paris a, dans son ordonnance de non-conciliation, fixé la résidence du mineur au domicile de la mère et organisé au bénéfice du père un droit de visite et d’hébergement, sans indiquer le lieu où devait s’effectuer la remise de l’enfant. Par jugement du 16 août 2016, le tribunal d’un district de la ville de Moscou, saisi par l’époux, a fixé la résidence de l’enfant mineur chez son père.

Par jugement du 15 novembre 2017, le tribunal correctionnel a rejeté l’exception d’incompétence présentée pour le compte de l’époux et l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis pour non-représentation d’enfant. Le mis en cause a interjeté appel de cette décision. La Cour d’appel de Paris, le 27 février 2019, a confirmé sa culpabilité et l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis et 10 000 € d’amende.

Toutefois, la décision de la Cour d’appel de Paris a été cassée le 17 mars 2021 (Crim. 17 mars 2021, n° 19-84.296, AJ fam. 2021. 302 ; RSC 2023. 207, obs. A. Giudicelli ). Pour la chambre criminelle, « en écartant l’application de la décision civile rendue en Syrie, qui était invoquée devant elle, au motif inopérant que son autorité devait s’effacer devant celle d’une décision prononcée par une juridiction française saisie avant la juridiction syrienne, la cour d’appel, qui n’a pas vérifié la régularité ni la conformité à l’ordre public interne de la décision rendue à l’étranger, n’a pas justifié sa décision ».

L’affaire a alors été renvoyée devant la chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de Paris différemment composée qui s’est prononcée le 20 octobre 2022. Dans un premier temps, pour considérer la juridiction française compétente, la juridiction du second degré a énoncé que, dès lors que l’enfant mineur résidait en France et que la décision fixant le droit de visite et d’hébergement du père ne précisait pas expressément que ce droit devait s’exercer à l’étranger, le tribunal compétent pour connaître du délit de...

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