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Obligation de témoigner contre son concubin : conformité à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme

Ne porte pas atteinte à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (Conv. EDH) la législation étrangère érigeant en infraction le refus d’une personne de témoigner dans le cadre d’une instruction pénale ouverte à l’encontre de son concubin de longue date, alors que cette même législation prévoit une dispense de témoignage au bénéfice du conjoint, de l’ex-conjoint, du partenaire ou de l’ex-partenaire enregistré d’un suspect.

par M. Bombledle 16 avril 2012

La loi pénale néerlandaise impose aux témoins cités dans le cadre d’une instruction pénale de déposer dès lors qu’ils ont prêté serment. Seuls les ascendants et les descendants par le sang ou par alliance, les collatéraux par le sang ou par alliance jusqu’au troisième degré de parenté inclus, ainsi que le conjoint, l’ex-conjoint, le partenaire enregistré ou l’ex-partenaire enregistré d’un suspect ou d’un co-suspect sont dispensés de l’obligation de témoigner, en vertu de l’article 217 du code de procédure pénale en vigueur aux Pays-Bas. Pour leur part, les simples concubins sont exclus d’une telle dispense, quels que soit la durée de la vie commune ou le nombre d’enfants issus de l’union de fait. C’est cette exclusion qui a été portée à la connaissance de la grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), laquelle a rendu son arrêt le 3 avril 2012.

En l’espèce, une femme est citée à comparaître dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour homicide volontaire à l’égard de son concubin, avec qui elle vit depuis dix-huit ans et avec lequel elle a eu deux enfants. Elle refuse de témoigner, se prévalant des dispositions de l’article 217 du code de procédure pénale néerlandais. Cependant, estimant qu’elle n’a ni contracté mariage ni conclu de partenariat civil enregistré, le tribunal d’arrondissement décide de la placer en détention pour refus d’obtempérer à un ordre de la justice, conformément à l’article 221 du même code. Finalement, elle demeure en détention durant treize jours, avant d’être remise en liberté, sans pour autant avoir témoigné. S’estimant victime d’une violation de l’article 8 de la Convention européenne, protégeant le droit au respect de la vie privée et familiale, ainsi que de l’article 14 combiné avec l’article 8, et « se plaignant que l’on eût tenté de la contraindre, dans le cadre d’une procédure pénale, à témoigner contre son compagnon de longue date, avec qui elle menait une vie familiale stable », la requérante saisit alors la Cour européenne des droits de l’homme.

Pour autant, la Cour ne l’entend pas ainsi et décide au contraire, par dix voix contre sept, qu’aucune violation de l’article 8 de la Convention européenne ne peut être constatée et que la violation alléguée de l’article 14 n’a pas à être examinée. Les juges estiment que « le devoir de témoigner en matière pénale qui incombe aux particuliers...

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