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Interview

« Le Conseil d’État et la juridiction administrative sont de plus en plus au contact du citoyen »

À l’occasion de la séance de rentrée, le vice-président Didier-Roland Tabuteau a présenté l’action du Conseil d’État et l’étude annuelle sur le dernier kilomètre de l’action publique. S’exprimant pour la première fois dans nos colonnes depuis sa prise de fonction en janvier 2022, il revient sur l’importance des quatre fonctions de l’institution, sur l’évolution de celle-ci et de l’ensemble de la juridiction administrative au plus près du citoyen. Il se montre également déterminé et ferme pour dénoncer les attaques que subissent les juges administratifs.

le 19 septembre 2023

La rédaction : Sur le volet consultatif, la publication des avis du Conseil d’État sur la plupart des projets de loi suscite un intérêt grandissant. Avec le recul de l’expérience, ne faudrait-il pas prévoir un texte législatif pour graver dans le marbre ce qui demeure une pratique ?

Didier-Roland Tabuteau : Je repartirais d’abord de l’office du conseil. Il exerce des fonctions contentieuses, des fonctions consultatives, la fonction d’étude et la fonction de gestion de la juridiction administrative. Deux missions constitutionnelles et deux missions générales. Il faut bien voir l’ensemble. La publication des avis depuis 2015 est une décision très importante du Président François Hollande car cette fonction était sous le régime du secret des délibérations du gouvernement. Le pouvoir exécutif a décidé qu’il fallait changer les choses. C’est une évolution d’ampleur, c’est vrai, mais c’est une évolution naturelle qui permet de faire connaître notre analyse juridique et administrative des textes. C’est pour nous un changement considérable qui va vers plus de transparence et demande une pédagogie essentielle. Est-ce qu’il faut un texte de plus pour consacrer cette évolution ? Je crois que ce qui repose sur une coutume, qui est bien ancrée aujourd’hui, suffit sans qu’il soit nécessaire de le graver dans le marbre. Je constate depuis ma prise de fonctions que la publication des avis est très appréciée, très regardée par la société civile, par les corps intermédiaires. C’est une mesure simple et limpide.

La rédaction : Votre prédécesseur s’était inquiété de l’angle mort constitué par l’absence de consultation du Conseil d’État sur les amendements, spécialement gouvernementaux. Ce qui aboutissait parfois à ce que le Conseil d’État soit « court-circuité ». Cela vous paraît-il toujours d’actualité ?

Didier-Roland Tabuteau : Notre souhait est de pouvoir, conformément à notre mission, examiner les textes essentiels et les articles majeurs. Quand des articles de principe affectent différentes législations et impliquent un travail de cohérence juridique, nous avons le souhait de pouvoir être associés à ce travail pour apporter notre contribution à la qualité du droit. C’est variable d’un texte à l’autre : pour certains, les dispositions essentielles nous sont soumises, pour d’autres, c’est déséquilibré et si des dispositions substantielles ne nous sont pas transmises, nous regrettons nécessairement de ne pas avoir pu apporter notre pierre à l’édifice. Mais aujourd’hui, sur la très grande majorité des textes, le « cœur du réacteur » est soumis au Conseil d’État.

En ce qui concerne la consultation du Conseil d’État sur les propositions de lois, rendue possible à la suite de la révision constitutionnelle de 2008, elle demeure très variable selon les années.

Or, nous sommes très demandeurs de pouvoir être associés. C’est toujours très fructueux pour le Conseil, et je l’espère pour le Parlement. Le travail est passionnant, en particulier du fait des échanges approfondis avec les parlementaires auteurs des textes.

La rédaction : Les rapports publics du Conseil d’État s’inscrivent dans une tradition initiée par René Cassin. Il s’agissait alors de s’adresser à un public composé essentiellement de juristes spécialisés. L’objectif est aujourd’hui d’atteindre un public beaucoup plus large. Diriez-vous que vous y êtes parvenus ?

Didier-Roland Tabuteau : Le rapport d’activité...

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Didier-Roland Tabuteau

Didier-Roland Tabuteau est vice-président du Conseil d'État