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Droit au silence des magistrats de l’ordre judiciaire : le Conseil constitutionnel saisi

Le Conseil d’État, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité posée à l’occasion d’une procédure intentée devant le Conseil supérieur de la magistrature, a renvoyé l’examen des dispositions des articles 52 et 56 du statut de la magistrature à l’examen du Conseil constitutionnel. Cette décision est particulièrement intéressante car elle survient à peine quelques mois après l’entrée en vigueur de la dernière réforme du statut de la magistrature et dans la mesure ou elle tire les conséquences de l’extension du « droit au silence » devant les instances disciplinaires du notariat.

Il y a moins d’un an le Conseil d’État a refusé la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le droit au silence des magistrats de l’ordre judiciaire (CE 23 juin 2023, n° 473249, AJDA 2024. 74 ; AJFP 2024. 55, obs. C. Biget ; E. Poinas, Fin de partie pour le droit au silence des magistrats de l’ordre judiciaire dans une procédure disciplinaire ?, Dalloz actualité, 28 juin 2023).

La motivation retenue par la Haute juridiction administrative à l’époque était que le « droit au silence » était applicable à la procédure pénale, mais que le principe d’indépendance des contentieux entre les poursuites pénales et disciplinaires ne justifiait pas son extension à une instance engagée devant le Conseil supérieur de la magistrature.

Le retour du droit de se taire sur le devant de la scène disciplinaire

Quel est l’élément qui a justifié une nouvelle interprétation des dispositions de la procédure disciplinaire, laquelle entre-temps n’avait pas changé ?

La réponse tient en une décision du Conseil constitutionnel du 8 décembre 2023 laquelle a statué sur une procédure relative à la discipline des notaires (Cons. const. 8 déc. 2023, n° 2023-1074 QPC, D. 2023. 2196, et les obs. ). À l’occasion de cette décision le Conseil constitutionnel a considéré que la procédure devant l’instance disciplinaire compétence pour apprécier le comportement des notaires relevait du pouvoir réglementaire et non du pouvoir législatif. Elle a rejeté la question au fond.

Mais dans sa motivation elle a considéré que : « Aux termes de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : "Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi". Il en résulte le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition. Elles impliquent que le professionnel faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont...

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