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Le juge et les opérations de police judiciaire

Le Conseil d’État considère que l’action fondée sur la responsabilité même sans faute de l’État en raison du préjudice résultant d’une opération de police judiciaire relève de la compétence de la juridiction judiciaire.

Jusqu’ici, le Tribunal des conflits et le Conseil d’État avaient élaboré un partage de compétence entre les deux ordres de juridiction, en fonction du régime sur lequel repose l’action en réparation à la suite d’un préjudice subi du fait de l’activité judiciaire. Conformément à cette construction prétorienne, la juridiction administrative était compétente pour connaître des actions fondées sur la responsabilité sans faute de l’État, laquelle est fondée soit sur un risque subi par les administrés, soit sur une rupture d’égalité devant les charges publiques, tandis que la juridiction judiciaire se retrouve compétente pour connaître des actions mettant en cause la responsabilité pour faute (T. confl., 3 juill. 2000, n° 3198, Garde des Sceaux, ministre de la Justice c/ Consorts Primau et Fosset, Lebon ; AJDA 2000. 961 ; D. 2000. 215, et les obs. ; CE, 15 févr. 2006, n° 271022, Maurel-Audry, Lebon ; AJDA 2006. 398 ; D. 2006. 676 ; AJ pénal 2006. 226, obs. E. Péchillon ; RFDA 2006. 615, concl. M. Guyomar ; ibid. 619, note F. Lemaire ; RSC 2007. 350, chron. P. Poncela ).

Cette répartition historique se concevait facilement, à la lumière, notamment, du principe d’indépendance du pouvoir judiciaire, qui fait logiquement obstacle à ce que le juge administratif se prononce sur l’activité et le fonctionnement de la justice judiciaire, et notamment sur la régularité des actes liés à une procédure pénale. Cette clé de répartition s’appliquait également, par extension, aux préjudices résultant des mesures d’opération de police judiciaire qui sont rattachables à l’activité du service public judiciaire (CE 12 avr. 1995, n° 125153, Mme Knudsen, Lebon ; 9 nov. 2018, n° 421302, Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Lebon ; AJDA 2019. 262 ).

La simplification opérée par le Tribunal des conflits

Pourtant, le Conseil d’État a initié une réflexion sur le bien-fondé de sa jurisprudence. En effet, bien que l’arrêt de 2006 soit une fidèle illustration du principe de la liaison de la compétence et du fond, en ce que « l’application d’un régime de responsabilité relevant du droit administratif implique la compétence du juge administratif », le rapporteur public Guillaume Odinet évoque, lors d’une affaire en 2020, deux considérations principales qui doivent, selon lui, conduire à une modification du principe de la compétence de la juridiction administrative en matière de responsabilité sans faute. D’une part, l’intérêt tiré d’une bonne administration de la justice commanderait de simplifier la mise en jeu de la responsabilité de l’État, en permettant tout simplement au...

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