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Parution de la loi pour la rénovation de l’habitat dégradé

La nouvelle loi modifie plusieurs dispositions de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété en vue de lutter contre la dégradation des immeubles et de redresser les copropriétés en difficulté. Elle crée notamment un nouvel emprunt collectif au profit des syndicats de copropriétaires.

La loi visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement du 9 avril 2024 (Loi n° 2024-322, 9 avr. 2024, JO 10 avr.) actionne différents leviers pour prévenir la dégradation de l’habitat, accélérer sa réhabilitation lorsqu’il est déjà détérioré et lutter contre les marchands de sommeil.

Elle fera l’objet d’un Bulletin spécial du dictionnaire permanent gestion immobilière (éditions législatives) détaillant les mesures concernant le domaine de la gestion immobilière.

Elle fera également l’objet d’un dossier dans l’AJDI 6/2024, lequel couvrira également les autres aspects de la loi (expropriation, urbanisme, permis de louer, …).

Les opérations publiques sont touchées par la réforme, mais les acteurs privés de la gestion immobilière le sont aussi particulièrement. Les syndics sont ainsi mis à contribution pour le rôle qu’ils ont à jouer dans cette rénovation. La loi du 10 juillet 1965 est à nouveau modifiée afin de repérer les syndicats de copropriétaires fragiles, prévenir la dégradation des immeubles et redresser les copropriétés en difficultés. L’une des innovations majeures de la nouvelle loi consiste dans la création d’un prêt global et collectif au profit des syndicats des copropriétaires, préconisé par un rapport de la Banque des territoires d’octobre 2023. Encore faudra-t-il que les banques s’emparent du dispositif et rendent ce mode de financement effectif…

La prévention de la dégradation de l’état des immeubles passe aussi par la lutte contre les marchands de sommeil qui colonisent parfois tout un bâtiment, voire tout un quartier, contribuant ainsi à leur délabrement.

Par ailleurs, la loi de rénovation de l’habitat dégradé ratifie plusieurs ordonnances dont celle du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété et des immeubles bâtis qui avait été prise conformément à l’habilitation donnée au gouvernement par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) du 23 novembre 2018. Bien que le projet de loi de ratification de l’ordonnance « copropriété » ait été déposé à temps sur le bureau du Sénat, lui permettant de bénéficier de la protection offerte par le Conseil constitutionnel (Cons. const. 28 mai 2020, n° 2020-843 QPC) et le Conseil d’État (CE 16 déc. 2020, n° 440258) qui confèrent à de telles ordonnances une valeur législative, la sécurité juridique est renforcée par la ratification opérée.

Enfin, à la marge, la nouvelle loi opère plusieurs rectifications d’erreurs matérielles touchant divers articles de la loi du 10 juillet 1965. Il s’agit :

  • de l’article 18-2 relatif à l’obligation de transmission de documents et informations entre l’ancien et le nouveau syndic et faisant référence aux documents dématérialisés en ligne sur un extranet (erreur d’alinéa) ;
  • des articles 20 et 26-7 visant le privilège du syndicat transformé en hypothèque légale spéciale par l’ordonnance de réforme du droit des sûretés du 15 septembre 2021.

Dans des secteurs à risque, un diagnostic structurel de l’immeuble

Le contrôle technique de l’état de l’immeuble pourra, s’agissant des immeubles en copropriété, être remplacé par le projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT).

Pour améliorer la connaissance de l’état du parc immobilier par les pouvoirs publics, la loi pour la rénovation de l’habitat dégradé met en place un diagnostic structurel de l’immeuble qui pourra être déployé, à l’initiative des communes, dans certains secteurs.

Pour entrer pleinement en vigueur, le dispositif devra faire l’objet d’un décret d’application (CCH, art. L. 126-6-1, al. 11, créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°).

Un diagnostic technique des structures des immeubles collectifs à usage d’habitation

Le maire pourra définir des secteurs à risque (proportion importante d’habitat dégradé, d’immeubles anciens), dans lesquels la réalisation d’un diagnostic structurel sera rendue obligatoire pour les immeubles collectifs d’habitation de plus de quinze ans et au moins une fois tous les dix ans.

Le diagnostic inclura une description des désordres observés portant atteinte à la solidité des immeubles, et une évaluation des risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle des tiers (Rapp. AN, n° 2066 ; CCH, art. L. 126-6-1, al. 1, créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°).

Les périmètres des secteurs concernés seront indiqués sur les documents graphiques annexés au plan local d’urbanisme (PLU), au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale (CCH, art. L. 126-6-1, al. 2 s., créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°).

Dans les zones définies, seront donc concernés tous les bâtiments collectifs à usage de logement, qu’ils appartiennent à un seul propriétaire, à plusieurs, qu’ils soient ou non soumis au statut de la copropriété. Sans précision, il est probable que les immeubles à usage partiel de logement seront aussi concernés.

Remplacement du diagnostic structurel par le PPPT dans les copropriétés

Pour les immeubles soumis au statut de la copropriété, l’établissement de ce diagnostic structurel pourra être remplacé par la production du projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT) lorsqu’il a été élaboré. Il faudra toutefois que le PPPT ait été réalisé par une personne ayant les mêmes compétences que celles requises de l’auteur du diagnostic structurel (CCH, art. L. 126-6-1, al. 7, créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°).

Actuellement, les compétences des personnes habilitées à réaliser un PPPT sont fixées par un décret du 25 avril 2022 (Décr n° 2022-663, 25 avr. 2022).

La loi climat et résilience du 22 août 2021 a réformé le plan pluriannuel de travaux (PPT) et impose aux syndicats des copropriétaires l’établissement d’un projet de PPT pour les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation de plus de quinze ans (Loi n° 65-557 du 10 juill. 1965, art. 14-2, I, mod. par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, art. 171). Cette modification s’applique aux immeubles de plus de cinquante lots. Elle concernera les immeubles de cinquante lots et moins à compter du 1er janvier 2025 (Loi n° 2021-1104, 22 août 2021, art. 171, VI).

Rien n’est dit sur le cas où le PPPT n’aura pas été établi en raison de l’existence d’un diagnostic technique global (DTG) ne faisant apparaître aucun besoin de travaux dans les dix années suivant son élaboration (Loi n° 65-557 du 10 juill. 1965, art. 14-2, I, al. 7, mod. par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, art. 171, I, 2°). Le DTG pourrait-il alors faire office de diagnostic structurel ?

Remarque : la loi pour la rénovation de l’habitat dégradé modifie le contenu du DTG en prévoyant qu’il comprendra un diagnostic technique des équipements communs (CCH, art. L. 731-1, 2°, mod. par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 2°). En effet, dans les grandes copropriétés, le coût de réparation des chaufferies ou d’autres équipements majeurs (ascenseurs ou autres) peut peser très lourdement sur les finances du syndicat (Amendement AN, 1re lecture, n° CE 184).

Transmission du diagnostic à la commune

Le syndic, ou le propriétaire de l’immeuble lorsque celui-ci n’est pas soumis au statut de la copropriété, devra transmettre à la commune le diagnostic structurel de l’immeuble ou le PPPT si celui-ci en tient lieu (CCH, art. L. 126-6-1, al. 8, créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°).

À défaut, le maire notifiera une demande de production du document qui, restée sans effet pendant un mois, lui permettra de faire réaliser d’office le diagnostic en lieu et place du syndicat des copropriétaires, ou du propriétaire, et à ses frais (CCH, art. L. 126-6-1, al. 10, créé par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 27, 1°). Ce dispositif, autorisant la réalisation d’office du document, existe également pour le PPPT (Loi n° 65-557 du 10 juill. 1965, art. 14-2, III, créé par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, art. 171, I, 2°) ou le DTG (CCH, art. L. 731-5, II).

Bientôt un Registre national d’immatriculation des copropriétés plus complet

Les informations qui devront figurer au Registre national des copropriétés seront dorénavant fixées par décret. Parmi elles, les données essentielles des diagnostics de performance énergétique (DPE).

Conçu dès l’origine comme un outil de connaissance du parc immobilier à usage total ou partiel d’habitation soumis au statut de la copropriété, le Registre national d’immatriculation des copropriétés est à nouveau mis à contribution pour collecter des données permettant une analyse de plus en plus fine de l’état matériel des bâtiments collectifs.

Les données devant figurer au Registre étaient jusque-là détaillées à l’article L. 711-2, III du code de la construction et de l’habitation. Elles étaient donc de nature législative et ne pouvaient être modifiées que par la loi, ce qui impliquait une certaine lourdeur. La loi pour la rénovation de l’habitat dégradé réécrit le texte pour ne retenir que de grandes rubriques dont il est prévu qu’elles seront détaillées par un futur décret (CCH, art. L. 711-2, III, mod. par la loi n° 2024-322 du 9 avr. 2024, art. 25). La liste des informations à fournir, ainsi délégalisée, sera plus facilement adaptée au gré des nécessités.

Selon le nouveau texte, figureront au Registre « les principales données » devant permettre :

  • de connaître la situation financière de la copropriété ;
  • de connaître les caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, notamment celles prévues dans les diagnostics obligatoires ;
  • aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté ;
  • d’informer de l’existence d’un dépôt de plainte ou d’une condamnation pour infraction dans le cadre des textes visant à réprimer les marchands de sommeil sur le fondement de l’article 225-24 du code pénal ou de l’article 3-4 nouveau de la loi du 6 juillet 1989, si le syndic en a connaissance ;
  • d’informer d’un refus d’autorisation préalable de mise en location d’un logement, si le syndic en a connaissance.

Première nouveauté : le futur enrichissement du Registre par l’intégration des données...

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