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Portrait

Robin Binsard et Guillaume Martine, ces avocats qui ferraillent contre la procédure Encrochat

par Gabriel Thierry, Journalistele 19 janvier 2024

L’infiltration numérique du réseau téléphonique Encrochat, initié par la gendarmerie française, a été un succès judiciaire spectaculaire. Une procédure questionnée par deux pénalistes parisiens, Robin Binsard et Guillaume Martine. Portrait.

 

Ce quinquagénaire albanais poursuivi pour trafic de drogue « a joué ». Mais il « a perdu », de son propre aveu. À la mi-décembre, la justice belge a donné au Justitia, l’ancien quartier général de l’OTAN transformé en tribunal pour juger les attentats de Bruxelles, le top départ du méga procès « Encro », prévu pour durer cinq mois. Un terme qui fait référence aux téléphones chiffrés Encrochat, ces smartphones très sécurisés dont l’infiltration au printemps 2020 par la gendarmerie française a permis une myriade d’arrestations.

Quelques années plus tôt, des gendarmes tombent lors d’une enquête sur l’un de ces téléphones, de véritables coffres-forts numériques vendu un millier d’euros. Les gendarmes s’arrachent les cheveux pour les faire parler. Avant de trouver la faille : les serveurs du réseau de télécommunications loués auprès d’OVH. Les autorités judiciaires – l’affaire est suivie par la juridiction interrégionale spécialisée de Lille – vont réussir à faire installer sur tous les téléphones du réseau un cheval de Troie, un logiciel espion dissimulé dans une fausse mise à jour envoyée par le serveur central.

À l’époque, les polices tâtonnent pour discerner l’ampleur des trafics du crime organisé. L’infiltration des téléphones Encrochat – suivie notamment de la messagerie Sky ECC, l’autre volet des interceptions menées dans le méga-procès bruxellois – va constituer une mine d’or. « C’est comme si nous étions à la table des criminels », signalait Catherine De Bolle, la directrice d’Europol, l’agence en charge de la coordination de cette opération internationale dont les modalités techniques restent floues, protégées par le secret de la défense nationale.

« Procès spectacle »

Ils ne sont pas directement des parties du méga-procès bruxellois. Mais deux avocats français, Robin Binsard et Guillaume Martine – vingt-neuf ans pour le premier, trente-quatre ans pour le second, quatorze ans de barre à eux deux – suivent attentivement les débats. « On a le sentiment que le ministère public s’offre un procès spectacle, une sorte d’opération de communication pour couvrir le fait que le trafic de drogues a encore plus explosé en Belgique après que les messageries Encrochat et Sky ECC ont été fermées », signale Guillaume Martine.

Ces deux juristes parisiens se passionnent depuis plus de trois ans pour l’opération Encrochat. « Il y a peut être un effet générationnel : nous utilisons tous WhatsApp ou Signal, et nous avons grandi avec un téléphone portable », indique également Robin Binsard. Pour les deux juristes, des anciens du cabinet Vigo fondé par Christine Carpentier, Emmanuel Daoud et Julie Ferrari, tout commence à l’automne 2020. Les deux avocats viennent alors à peine de lancer leur cabinet. Mais ils peuvent déjà se prévaloir...

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Robin Binsard et Guillaume Martine

Robin Binsard et Guillaume Martine sont avocats associés au sein du cabinet Binsard Martine. Ils exercent en droit pénal général, droit pénal des affaires, droit de la presse et droit pénal international.