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Interview

Lutte contre les violences sexistes et sexuelles : « faire plus et mieux »

Alors que le mois de mars est placé sous le signe de la mobilisation en faveur des droits des femmes, le groupe de réflexion Le Sens du Service public, qui réunit des agents des trois versants de la fonction publique, appelle, dans une contribution, à faire preuve de davantage de volontarisme pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans les services publics. Rencontre avec Émilie Agnoux, co-fondatrice du think tank.

le 21 mars 2023

La rédaction : La loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 et le décret n° 2020-256 du 13 mars 2020 ont mis en place un dispositif de signalement des actes de violence, de discrimination, de harcèlements et d’agissements sexistes au bénéfice des agents victimes. Comment avez-vous appréhendé ce dispositif sur le terrain ?

Émilie Agnoux : Au sein du think tank, où nous sommes plusieurs à avoir une « casquette » RH, nous avons en effet pu expérimenter ce dispositif. Depuis plusieurs années, notamment sous l’effet du mouvement #MeToo, on a tendance à dire que la parole des femmes s’est libérée. C’est le cas pour l’ensemble des victimes d’une manière générale. Rappelons qu’il n’y a pas que les femmes qui subissent des violences sexistes et sexuelles ; les hommes aussi. Le fait est que la parole était déjà libérée avant ce mouvement ; elle n’était toutefois pas toujours entendue. De surcroît, il n’existait pas vraiment de dispositif pour la traiter. Avec cette procédure de signalement, nous bénéficions désormais d’un cadre, incluant des garanties pour chacune des parties (respect du principe du contradictoire, garanties de protection de la victime présumée, information de la personne mise en cause…).

Nous avons aussi constaté que des faits qui n’étaient pas remontés et n’avaient pas été traités jusque-là, ont pu l’être, correctement, grâce à cette procédure. La parole s’est alors d’autant plus libérée que ces premières expériences avaient eu des suites. Dans notre collectivité, nous nous sommes fait accompagner dans cette démarche par un acteur extérieur spécialisé sur ces questions et avons pu externaliser certaines procédures, notamment lorsqu’elles étaient lourdes ou particulièrement sensibles.

On peut toutefois craindre que, dans un certain nombre d’organisations, ce combat ne soit pas encore forcément une priorité. Malheureusement, les démarches reposent encore bien souvent, en dépit des directives, notes internes, législations, etc., sur les convictions, les priorités de certains décideurs ou agents, de leur personnalité ou sensibilité personnelle. In fine, c’est une affaire d’hommes et de femmes – souvent de femmes d’ailleurs, même si, bien heureusement, des hommes aussi portent cette cause.

La rédaction : En matière de violences sexistes et sexuelles, « il y a lieu de « faire plus et mieux », écrit le collectif. Quelles sont les améliorations possibles ?

Émilie Agnoux : S’il existe effectivement de multiples dispositifs légaux et réglementaires, il nous semble important, au sein des administrations, d’aller plus loin afin que cette cause devienne, vraiment, l’affaire de tous. La question du recueil de la parole des victimes est fondamentale. Cela ne s’improvise pas. Il faut y être formé. Quand une personne se livre, il faut pouvoir l’écouter et la...

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Émilie Agnoux

Émilie Agnoux est co-fondatrice du think tank.