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Atteinte à la vie privée résultant de l’enregistrement d’une garde à vue

L’enregistrement de l’exécution d’une garde à vue par un tiers, auquel le suspect n’est pas en mesure de s’opposer, constitue une atteinte à l’intimité de la vie privée sanctionnée par l’article 226-1 du code pénal.

par Méryl Recotilletle 4 juin 2020

En l’espèce, un reportage retraçait les investigations menées sur les réseaux de prostitution asiatique dans le sud de Paris et notamment la surveillance de l’hôtel où les prostituées effectuaient leurs prestations. Les réalisateurs avaient pris soin d’anonymiser les lieux et les personnes. Toutefois, le reportage présentait la garde à vue de la propriétaire de l’hôtel, intervenue à la suite de son interpellation pour des faits de proxénétisme aggravé. Celle-ci aurait alors été reconnue par des tiers, notamment par sa voix, à la suite de la diffusion du film. La plainte des propriétaires de l’hôtel auprès du procureur de la République des chefs de violation du secret professionnel et du secret de l’instruction ayant été classée sans suite, ceux-ci se sont constitués partie civile auprès du juge d’instruction. Ce dernier a rendu une ordonnance de non-lieu. Les parties civiles ont interjeté appel de cette décision.

La cour d’appel a confirmé l’ordonnance de non-lieu et écarté l’argumentation de la victime qui soutenait que le délit incriminé à l’article 226-1 du code pénal était constitué. La chambre de l’instruction a retenu que les images et paroles d’une personne interpellée par les services de police puis interrogée au cours de sa garde à vue ne relèvent pas de l’intimité de la vie privée au sens de ce texte et qu’au surplus, aucun élément du dossier n’indiquait que les conditions de la garde à vue de la propriétaire de l’hôtel, qui a nécessairement vu la caméra, lui ôtaient la possibilité de faire valoir son opposition à l’enregistrement.

Dans quelle mesure l’enregistrement d’une garde à vue par un journaliste constitue-t-il une atteinte à la vie privée ? Au visa de l’article 226-1 du code pénal, la chambre criminelle casse l’arrêt de la cour d’appel et vient apporter d’importantes précisions quant aux atteintes à la vie privée résultant de la captation et de la diffusion d’un acte d’enquête par les médias.

En principe, les investigations sont supposées être secrètes. « Le secret tient essentiellement à la non-divulgation, de quelque manière que ce soit, des éléments de la procédure à des tiers » (Rep. pén.,  Juge d’instruction, par L. Belfanti, n° 244). Par exception, il peut être porté atteinte au secret de l’instruction, notamment par la presse, lorsque c’est dans l’intérêt public (v. not. Dalloz actualité, 18 déc. 2019, art....

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