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TIG : un rapport préconise l’ouverture « aux entreprises privées marchandes »

Le 6 mars 2018, dans le prolongement des mesures annoncées la veille par le président de la République, un rapport chargé d’analyser les « leviers permettant de dynamiser le travail d’intérêt général » a été remis à la Chancellerie. 

par Thomas Coustetle 9 mars 2018

« Le travail d’intérêt général est une manière tout à fait positive pour éviter la récidive dans un nombre important de cas », avait vanté Nicole Belloubet, ministre de la justice, lors du lancement le 20 décembre 2017 d’« une mission de réflexion » pour la création d’une agence chargée de développer et encadrer les travaux d’intérêt général (TIG).

Le rapport qui en résulte a été rendu hier, sous la responsabilité de Didier Paris, député vice-président de la commission des lois, et David Layani, chef d’entreprise du groupe onepoint, spécialisé en transformation numérique.

Institués en 1983, les TIG ne sont pas très populaires. Réservée aux courtes peines, la mesure permet d’éviter une incarcération grâce à un travail non rémunéré au bénéfice d’une association, d’une entreprise publique, d’une commune. Sa durée peut varier de vingt à deux cent quatre-vingts heures.

Seuls 3 500 jeunes, soit à peine « 6 % des peines », font l’objet d’une telle mesure, expliquait Emmanuel Macron mercredi devant les élèves de l’École nationale d’administration pénitentiaire (v. Dalloz actualité, 7 mars 2018, art T. Coustet isset(node/189516) ? node/189516 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>189516). Avec la réforme à venir, l’exécutif souhaite promouvoir le dispositif. Le chef de l’État a salué hier « un bon rapport. Il sera donc appliqué ».

Que préconisent les coauteurs pour relancer l’application ? Parmi un panel de mesures, les plus significatives sont : 

  • une durée du TIG revalorisée à 500 heures ;
  • de favoriser son prononcé en véritable peine principale ;
  • de rendre possible la mise en œuvre si le mineur a 16 ans au jour de la condamnation ;
  • de prévoir un délai raccourci d’un an pour exécuter la peine ;
  • de prévoir qu’un chargé de mission au sein de l’agence sera spécifiquement affecté à la prise en charge des mineurs ;
  • la création de postes spécifiques à destination des mineurs au sein des services régaliens ;
  • de prévoir la possibilité de remettre une lettre de bonne conduite ainsi qu’un effacement du casier judiciaire.

L’objectif de l’agence nationale du TIG, dont la création est corrélée à celle de la plateforme numérique est censé faciliter l’adaptation de la personne condamnée et assurer le « recensement des offres ». Pour en élargir le spectre, le rapport propose ainsi de « dynamiser l’offre de postes »…

Une ouverture au secteur privé marchand

… et notamment de l’ouvrir au secteur privé « marchand ». Il en parle à ce titre comme d’un « levier puissant de dynamisation ». Cette ouverture est limitée à la double condition que l’entreprise d’accueil soit « au moins délégataire d’une mission de service public » et que le contrôle de « l’utilité sociale » soit réalisé par le juge de l’application des peines.

Pour ce faire, le champ des entreprises chargées d’une mission de service public, que sont déjà les banques et les cliniques privées, « doit être élargi aux structures qui sont délégataires pour le compte des collectivités territoriales ». De même, les conditions d’exécution d’un marché public ou d’une délégation peuvent prévoir une « clause d’insertion du TIG ». Autre façon d’exprimer ce que le chef de l’État a énoncé hier, en expliquant que « chacun devait prendre sa part ». 

Une « part » qui n’est pas clairement évaluée sur le plan financier dans le texte. En l’état, le rapport propose comme unique recette d’inscrire le TIG comme critère d’éligibilité au « fonds interministériel de prévention de la délinquance », auquel chaque collectivité pourrait postuler, mais sans s’épancher sur les mesures incitatives à l’ouverture aux structures privées.

Les conseillers d’insertion et de probation au cœur du dispositif

Le rôle joué par les conseillers d’insertion et de probation est à cet égard déterminant puisque c’est le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) qui devra ainsi « assurer la prospection et les demandes d’habilitation ainsi que la prise en charge à tous les niveaux de la mise en œuvre de la mesure ». Il reviendrait ainsi aux directeurs des SPIP d’habiliter « directement les structures d’accueil ».

Les contraintes en termes de temps et surtout financières qui sont attachées au bon déploiement de ces nouveautés risquent de constituer un frein. Les conseillers revendiquent une revalorisation de leur statut qui n’est pas, pour l’heure, entendue par la chancellerie (v. Dalloz actualité, 2 févr. 2018, art. T. Coustet isset(node/188968) ? node/188968 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>188968). Pas sûr que la création de 1 500 postes de conseillers promis hier par le chef de l’État suffise à calmer les doléances du milieu carcéral.