Marcus Tullius Cicero

À Arpinum, petit village peuplé d’irréductibles romains descendants de la tribu des Volsques, le troisième jour de janvier de l’an 106 avant Jésus-Christ, les citoyens de la République ne tiraient pas encore les rois mais chez les Cicéron, non loin d’une étable, Helvia donnait naissance à un premier garçon qui hérita du nom de son grand-père : Marcus Tullius.

Cicéron n’était pas promis à un destin glorieux. À cette époque, loin d’être traquées par quelque Haute autorité, les discriminations assuraient une reproduction des élites qui laissait peu d’espoir aux rejetons de la petite bourgeoisie de province. Or, le père de Marcus, qui, comme son grand-père, s’appelait aussi Marcus (ce qui ne facilitait pas la distribution du courrier) appartenait à la Rome qui se lève tôt. Il fallait surveiller les esclaves, à qui on avait fait croire qu’en travaillant plus ils seraient fouettés moins. Ces racines, un brin rurales, étaient implantées jusque dans le cognome des Cicéron. Cicer signifiait littéralement « pois chiche » alors même que le petit romain n’avait aucune relation directe avec cette plante légumineuse, si ce n’est, selon Plutarque * , qu’un de ses lointains ancêtres eut peut-être porté « au bout du nez une petite fente qui ressemblait au sillon » du fabacée. À ce double handicap, social et patronymique, Cicéron cumulait une santé fragile : il eut été incapable de souffler dans le spiromètre. Pour cette raison, la même qui provoquera l’évincement de Michel Platini à la présélection du FC Metz en 1972, beaucoup enjoignaient le jeune futur Consul à abandonner son rêve de devenir un grand orateur.

En vrai Arpinate, Marcus était un enfant pugnace et doué. À peine âgé de dix ans, défiant les lois de la géométrie, Cicéron maîtrise le vers « carré », rythme très populaire en latin....