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Le quotidien du droit en ligne

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« Un associé moral, ça n’existe pas »

Comme son cousin Mounir, qui débarque complètement : « Je ne sais rien du tout de la société, je ne connais rien du tout à comment c’est géré, moi je travaille sur les chantiers toute la journée », résume l’interprète. Mounir ne parle pas un mot de français, a simplement signé tout un tas de chèques en blanc, et accessoirement pris 1 000 € par mois pour ne surtout s’occuper de rien. Même principe avec Jawad, le petit frère. Mais pas pour Abdel, un beau-frère qui pensait naïvement être vraiment gérant, et n’a donc pas eu un centime. D’autres défilent encore.

« Moi je travaille sur les chantiers toute la journée »

La 11e chambre est aussi un haut lieu des procédures à trous. Notamment parce que cette fameuse notion de bande organisée, qui est d’ailleurs une circonstance réelle et non personnelle, conduit à juger ceux qui ne sont pas renvoyés au travers de ceux qui le sont. Le mécanisme est invariable, et parfaitement logique : le ministère public charge les présents ; les présents chargent les absents. Illustration avec le dossier suivant, pour lequel ils sont sept à faire face au tribunal. Initialement prévu sur cinq demi-journées, il sera finalement expédié en trois.

« Ils tuent des animaux pour en faire des sacs à main »

Esclandre sur les bancs de la défense : les avocats ne sont d’accord sur rien, et surtout pas sur leur ordre de passage. Le doyen lance au benjamin : « L’ancienneté décroissante, c’est une règle qui existait avant votre naissance ! ». Suspension. À la reprise, on comprend que c’est parce que leurs clients ne sont pas prévenus des mêmes chefs, évidemment, mais aussi parce qu’une écrasante majorité de pénalistes pur sucre n’a aucune envie de se lancer, comme la veille, dans une exégèse du code de la propriété intellectuelle.

« La défense soutient tout et son contraire »

Dans la soirée du deuxième jour, plaidoiries des deux parties civiles : la société elle-même, et la holding titulaire des droits. L’un des avocats est un spécialiste de la propriété intellectuelle, qui s’attache à démontrer l’originalité de « ce sac iconique ». Comme le reste de la salle, on décroche rapidement : il est tard et l’avocat se sent obligé de dérouler son argumentation technique à toute blinde.

« Ils m’appelaient le vieux con »

En même temps que les rôles des uns et des autres, le magistrat résume un certain nombre de conversations interceptées entre eux, et associe donc à chacun le surnom donné par les autres : « le beauf », « la petite », « le vieux »… On se croirait dans un film de Georges Lautner (ou un titre de Sergio Leone). Sur son banc, « le vieux », qui a parcouru le dossier, rectifie : « Ils m’appelaient le vieux con ».