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L’ouverture des droits sociaux des personnes détenues : un appui majeur à la préparation de sortie de la détention

L’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 relative aux droits sociaux des personnes détenues permet d’achever la réforme du travail pénitentiaire initiée par la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire.

Attendue comme l’aboutissement de la réforme du travail pénitentiaire débutée avec la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021, l’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 relative aux droits sociaux des personnes détenues affiche clairement la volonté de rapprocher le régime applicable aux personnes détenues de celui des travailleurs en milieu libre. Elle se traduit notamment par une pénétration renforcée du code de la sécurité sociale et du code du travail en détention avec pour fil conducteur la lutte contre la commission de nouvelles infractions et la préparation à la sortie de détention.

Pour rappel, la réforme du travail pénitentiaire a débuté avec la loi du 22 décembre 2021, qui est venue substituer aux anciens actes d’engagement le contrat d’emploi pénitentiaire (CEP). La qualification de contrat de droit public sui generis pouvait faire craindre une réforme quelque peu timorée, faisant la part belle au régime exorbitant du droit commun. Toutefois, le décret du 25 avril 2022 relatif au travail des personnes détenues a finalement donné une réelle consistance au CEP en encadrant la durée maximale du temps de travail, le barème de rémunération ou encore les motifs légitimes de suspension ou de résiliation du contrat. Si le décret a considérablement enrichi le deuxième chapitre du livre IV de la partie réglementaire du code pénitentiaire, le régime juridique relatif aux prestations sociales liées au travail carcéral était renvoyé à la compétence du gouvernement qui avait obtenu l’habilitation de légiférer par voie d’ordonnance aux termes de l’article 22 de la loi du 22 décembre 2021. C’est précisément ce vide juridique qu’entend combler l’ordonnance du 19 octobre.

Le premier constat qui s’impose est l’ampleur de la réforme. Ce ne sont pas moins de quatre branches du droit qui sont mobilisées. Le texte vient en effet modifier le code de la sécurité sociale, le code du travail et dans une moindre mesure, le code de l’action sociale et des familles et le code de la commande publique. Surtout, il abonde le chapitre IV du titre II du livre III de la partie législative du code pénitentiaire relatif à la protection sociale, jusqu’alors vierge de toute disposition. Il enrichit également considérablement le chapitre II du livre IV de la partie législative du même code relative au travail.

Le second constat est celui du caractère exhaustif de l’ordonnance. L’ensemble des problématiques relatives à la protection sociale sont envisagées, allant même jusqu’à organiser un régime de protection en matière de lutte contre les discriminations et le harcèlement dans le cadre de l’activité professionnelle. À noter qu’une disposition qui aurait potentiellement pu être qualifiée de cavalier législatif modifie l’article L. 411-3 du code pénitentiaire en faisant passer la mixité des activités en détention de simple faculté à une véritable obligation pour le chef d’établissement.

Nous noterons enfin que conformément aux choix arrêtés par les rédacteurs du code pénitentiaire, les modifications apportées à ce dernier opèrent essentiellement par renvoi dans les domaines où l’administration pénitentiaire n’intervient pas à titre principal. Le travail pénitentiaire est par conséquent un régime juridique qui se situe au croisement de plusieurs codes et si sa lecture n’en est pas facilitée, on assiste cependant à un réel rapprochement du droit commun. Concrètement, l’ordonnance aborde, pour l’essentiel, le régime...

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