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Suicide carcéral : condamnation de la France

À la suite du suicide, au quartier disciplinaire, d’un détenu dont les troubles psychotiques étaient avérés, la France est condamnée pour n’avoir pris les mesures nécessaires à la protection de la vie de cette personne et pour lui avoir fait subir un traitement et une peine inhumains et dégradants, en s’abstenant de l’hospitaliser, de surveiller sa prise quotidienne de médicaments, et en lui infligeant une sanction de quarante-cinq jours d’isolement disciplinaire, incompatible avec le niveau de traitement exigé à l’égard d’un malade mental.

par M. Lénale 23 octobre 2008

L’actualité dénote parfois de coïncidences sinistres. À l’heure où la ministre de la justice annonçait certaines mesures destinées à améliorer la prévention du suicide des mineurs en prison (obligation pour les mineurs devant être mis sous écrou de rencontrer un magistrat du parquet), l’État français était condamné par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à la suite du suicide, au quartier disciplinaire de la maison d’arrêt de Bois d’Arcy en 2000, d’un détenu souffrant de graves troubles mentaux. Le dispositif de soins en psychiatrie dans les prisons françaises fait pourtant figure de modèle à l’étranger. La loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 a, en effet, confié au service public hospitalier la mission de dispenser les soins aux détenus en milieu pénitentiaire, et si nécessaire en milieu hospitalier, tout en généralisant le bénéfice de la protection sociale à tous les détenus. Concernant les soins psychiatriques, ils sont en principe assurés par les services médicaux-psychologiques régionaux (SMPR) – mais, en réalité, puisqu’il n’en existe que vingt-six sur tout le territoire, ce sont la plupart du temps les secteurs de psychiatrie des hôpitaux régionaux qui en ont la charge – tandis que des Unités de soins spécialement aménagées (UHSA) doivent prochainement voir le jour. Les limites du système résident essentiellement dans les carences en personnels psychiatriques faisant que ces services ne peuvent toujours assumer correctement leur mission (J.-L. Senon et C. Manzarena, Troubles mentaux et prison, AJ pénal 2007. 155 ). C’est bien l’existence et le mode de fonctionnement de ce dispositif qui, en l’espèce, ont conduit la CEDH a reconnaître que les autorités avaient fait « des efforts indéniables » pour prévenir le suicide du détenu (§ 91).

Malgré cela, la...

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