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Précisions sur l’étendue de la garantie décennale

La réparation intégrale des dommages matériels comprend l’intégralité des sommes nécessaires à la réfection de l’ouvrage, y compris le coût des déménagements des matériels existants lorsqu’ils sont indispensables à la réalisation des travaux de réfection.

par G. Rabule 5 novembre 2010

En raison des précisions que cet arrêt, promis à la publication, apporte sur l’étendue de la garantie décennale en matière d’assurance construction, il convient de procéder à une présentation intégrale des motifs ayant justifié, selon la Cour de cassation, une cassation partielle. En l’espèce, une société ayant subi le préjudice d’un incendie de ses bâtiments d’exploitation a entrepris la reconstruction de ses locaux. La maîtrise d’œuvre a été confiée à une entreprise, ayant souscrit une assurance de responsabilité obligatoire, qui a eu recours à une troisième entreprise pour le lot dallages, également assurée au titre de cette obligation légale. Après expertise et réception sans réserves de l’ouvrage, des fissures du dallage sont apparues. Consécutivement au dépôt du rapport de l’expert désigné par voie d’ordonnance, la société victime a assigné les intervenants à la réfection de l’ouvrage en indemnisation de ses préjudices. Contestant l’arrêt infirmatif rendu par la cour d’appel de Paris le 1er avril 2009, les parties au litige ont formé deux pourvois en cassation joints par la haute juridiction.

Un des enjeux principaux de l’affaire réside dans l’application du principe de réparation intégrale des dommages matériels. La présomption de responsabilité de plein droit du constructeur d’ouvrage découlant de l’article 1792 du Code civil porte sur un domaine précis qui détermine l’étendue de la couverture de l’assurance de responsabilité imposée par l’article L. 241-1 du Code des assurances. Seuls sont couverts au titre de cette assurance les dommages compromettant la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Le principe de réparation intégrale exige que l’assuré répare les seuls dommages matériels mais tous les dommages matériels, dans les limites de son secteur d’activité professionnelle déclarée (Civ. 3e, 27 janv. 2010, n° 09-10.484, inédit). Si les frais engagés pour les déménagements des matériels existants étaient qualifiés de dommages immatériels, ils seraient exclus du champ de couverture. Les dommages consécutifs aux désordres de l’ouvrage ne relèvent en effet pas de l’assurance responsabilité obligatoire (Civ. 1re, 25 févr. 1992, D. 1992. Jur. 469 , note P. Dubois ; RDI 1992. 231, obs. G. Leguay et P. Dubois ; ibid. 349, obs. G. Leguay et P. Dubois ), mais d’une autre assurance dont la souscription demeure facultative (Civ. 1re, 12 mai 1993, RGAT 1993. 834). Cette dichotomie a récemment été affinée puisque la qualification de dommage matériel ne suffit pas : encore faut-il que les frais engagés soient indispensables et non pas seulement nécessaires à la réfection de l’ouvrage (Civ. 3e, 13 janv. 2010, à propos de bâtiments provisoires, D. 2010. AJ 324, obs. H. Berrah ; ibid. Chron. 1103, obs. A.-C. Monge et F. Nési ; RDI 2010. 167, obs. G. Leguay  ; Constr.-Urb. 2010, comm. 45, note M.-L. Pagès-de Varenne). La Cour de cassation reprend cette exigence et confirme l’arrêt de la cour d’appel en ce qu’il indique que les dépenses « manutention racks » et « manutention process » relatives à la reprise du matériel étaient bien...

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