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Contrat de sécurisation professionnelle : première décision

L’adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle constituant une modalité du licenciement pour motif économique, le salarié a, par conséquent, le droit d’invoquer les irrégularités de la procédure de licenciement et l’employeur l’obligation d’énoncer le motif économique de la rupture dans un document remis ou adressé au salarié.

par Bertrand Inesle 2 avril 2015

Depuis sa création par la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011, le contrat de sécurisation professionnelle a, certes, fait l’objet d’un certain nombre de décisions de juges du fond (V. not. Versailles, 13 mars 2014, RG n° 13/01283, Dalloz jurisprudence ; Orléans, 5 juin 2014, RG n° 13/03220, Dalloz jurisprudence), mais n’avait jusqu’à présent pas encore fait l’honneur d’un arrêt de la Cour de cassation. La position de cette dernière était d’autant plus attendue que, ce dispositif opérant fusion de la convention de reclassement personnalisé et du contrat de transition professionnelle (V. D. Baugard, Le contrat de sécurisation professionnelle, RDT 2011. 570 ), se posait la question de savoir dans quelle mesure les solutions acquises auparavant au titre de ces anciens mécanismes et de la convention de conversion qui les a précédés seraient maintenues.

Pour la première fois, la chambre sociale lève aujourd’hui une partie du voile qui reposait sur le régime applicable au contrat de sécurisation professionnelle.

En l’espèce, l’employeur prétendait que l’adhésion du salarié à un contrat de sécurisation professionnelle le privait de la possibilité de contester la régularité de la procédure de licenciement. La Cour de cassation considère, au contraire, que cette adhésion constitue une modalité du licenciement pour motif économique et ne prive pas le salarié du droit d’obtenir l’indemnisation du préjudice que lui a causé l’irrégularité de la lettre de convocation à l’entretien préalable. Elle décide, plus particulièrement, que, l’employeur n’ayant pas mis en place les délégués du personnel alors qu’il était assujetti à cette obligation et sans qu’aucun procès-verbal de carence n’ait été établi, le préjudice résultant de cette irrégularité subi par le salarié devait être réparé.

L’emprunt à la jurisprudence antérieure est ici double.

D’abord, la Cour fixe la nature du contrat de sécurisation professionnelle qui, comme l’étaient avant lui la convention de conversion (V. Soc. 11 juill. 2000, n° 98-41.169, Bull. civ. V, n° 273 ; Dr. soc. 2000. 1033, obs. J. Savatier ; 17 sept. 2003, n° 01-11.449, Bull. civ. V, n° 233 ; RDSS 2004. 224, note C. Willmann ) et la convention de reclassement personnalisé (V. Soc. 16 mai 2013, n° 11-28.494, Bull. civ. V, n° 126 ; Dalloz actualité, 24 juin 2013, obs. B. Ines ), n’efface pas le fait que l’employeur a, d’ores et déjà, envisagé le licenciement du salarié auquel ce dernier n’échappera pas malgré son refus d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle, excepté si son reclassement s’avère possible et qu’il en accepte les conditions. Ce contrat est, avant tout, un moyen d’accéder à un sous-régime de licenciement pour motif économique (à propos de la convention de reclassement personnalisé V. RDT 2014. 685, obs. B. Ines ).

Ensuite, la Cour de cassation reprend, mot pour mot, la motivation qu’elle avait retenue pour octroyer au salarié, ayant conclu une convention de reclassement personnalisé, le droit de contester l’irrégularité affectant la lettre de convocation à l’entretien préalable (Soc. 16 mai 2013, préc.). Le présent arrêt introduit néanmoins une nouveauté. Alors que, dans sa précédente décision, l’irrégularité invoquée résultait de l’absence de mention, dans la lettre de convocation, de la mairie où la liste des conseillers peut être consultée par le salarié, l’irrégularité ici pointée du doigt se trouve dans le défaut de mise en place des délégués du personnel dans une entreprise qui remplissait pourtant les conditions pour ce faire. La formule utilisée par la chambre sociale était suffisamment large pour accueillir d’autres irrégularités (V. Dalloz actualité, 24 juin 2013, obs. B. Ines ; JCP S 2008. 1617, note L. Fin-Langer). Elle estime également, au visa de l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles L. 2323-1 et L. 2324-5 du code du travail, 1382 du code civil et...

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