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Partage de la valeur (I) : réforme des dispositifs existants

La loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise a été publiée au Journal officiel du 30 novembre. Décryptage de la réforme des dispositifs existants.

Sur les nouveaux dispositifs, v. Y. Pagnerre, Partage de la valeur (II) : nouveaux dispositifs, Dalloz actualité, à paraître.

 

Favoriser le partage de la valeur – À la suite de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, loi PACTE, qui a notamment simplifié la mise en place d’accords d’intéressement et de participation dans les petites et moyennes entreprises et de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ayant poursuivi cette ambition et en instaurant la fameuse prime de partage de la valeur, le gouvernement a souhaité aller plus loin sur la partage de la valeur, facteur essentiel de compétitivité des entreprises, de valorisation du travail et de cohésion nationale.

Les partenaires sociaux ont alors été conviés en septembre 2022 à engager une négociation nationale interprofessionnelle. Sur la base de ces orientations, un accord national interprofessionnel (ANI) a été conclu, le 10 février 2023, avec comme paradigme le fait que « le partage de la valeur matérialise l’affectation de la valeur ajoutée ». Conformément à l’engagement du gouvernement, la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 transpose fidèlement l’ANI, avec quelques ajustements préconisés par le Conseil d’État dans son avis du 17 mai 2023. Dans les dix-neuf articles qui composent le texte final, tous n’ont pas la même portée. Une première catégorie d’entre eux vise à réformer les règles applicables et à adopter des dispositifs expérimentaux, qui sont l’objet de la présente étude. La seconde catégorie consacre deux nouveaux dispositifs. Il reste un chantier important de mise en cohérence de l’ensemble des dispositifs à l’égard des évolutions juridiques et économiques que peuvent subir les entreprises, spécialement en matière de restructuration.

Entreprises de onze à quarante-neuf salariés

Généralisation des dispositifs de partage de la valeur (art. 5 et 6) – Afin de favoriser le développement des outils de partage de la valeur dans les petites et moyennes entreprises, plusieurs mesures de simplification et d’incitation sont entrées en vigueur ces dernières années avec l’exonération du forfait social pour les entreprises de moins de 50 salariés sur les sommes réparties au titre de la participation et pour les entreprises de moins de 250 salariés sur les sommes versées au titre de l’intéressement. Concernant la participation, la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) a notamment permis aux entreprises de moins de 50 salariés d’appliquer un accord de participation conclu au niveau de la branche professionnelle, si cet accord le prévoit. Elle a prévu les mêmes modalités pour l’adhésion des entreprises de moins de 50 salariés à un plan d’épargne d’entreprise ou interentreprises en application d’un accord de branche. En matière d’intéressement, la loi du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire a permis à l’employeur d’une entreprise de moins de onze salariés dépourvue de délégué syndical ou de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique de mettre en place, par décision unilatérale, un régime d’intéressement pour une durée comprise entre un et trois ans, à la condition qu’aucun accord d’intéressement ne soit applicable ni n’ait été conclu dans l’entreprise depuis au moins cinq ans avant la date d’effet de sa décision. Puis, la loi du 16 août 2022 pour la protection du pouvoir d’achat a prévu que lorsque l’entreprise de moins de cinquante salariés n’est pas couverte par un accord de branche agréé, l’employeur peut mettre en place un accord d’intéressement par décision unilatérale si l’entreprise est dépourvue de délégué syndical et de comité social et économique ou si, au terme d’une négociation conduite avec les représentants du personnel, aucun accord n’a été conclu. Malgré ces mesures incitatives, les outils de partage de la valeur peinent à se diffuser dans les petites et moyennes entreprises, en particulier celles de moins de 50 salariés au motif qu’ils seraient complexes pour des entreprises non dotées de services financiers et de ressources humaines. C’est la raison pour laquelle la prime de partage de la valeur, dont la mise en place est plus simple, est plus largement diffusée dans les entreprises de moins de 50 salariés1.

Afin de développer les outils de partage de la valeur au sein des très petites entreprises (TPE), les signataires de l’ANI ont souhaité expérimenter l’obligation, pour les entreprises de onze à quarante-neuf salariés, de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur lorsqu’elles réalisent un bénéfice net fiscal d’au moins 1 % de leur chiffre d’affaires pendant trois années consécutives. L’article 5 de la loi du 29 novembre 2023 l’organise donc à titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de sa promulgation. Ces entreprises doivent, à compter du 1er janvier 20252 et au titre de l’exercice comptable suivant, soit mettre en place un régime de participation volontaire ou un régime d’intéressement, soit prévoir le versement de la prime de partage de la valeur (PPV), soit assurer un abondement à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, PER). L’obligation...

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