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Abus de droit : l’Assemblée étend le champ mais renforce les garanties

Plusieurs dispositions de procédures fiscales ont été intégrées à la loi de finances, adoptée mercredi par les députés en première lecture, notamment sur l’abus de droit.

par Pierre Januelle 23 novembre 2018

Actuellement, dans le cadre de la procédure d’abus de droit, le contribuable en désaccord avec les rectifications notifiées par l’administration peut soumettre son dossier au comité de l’abus de droit fiscal. Si l’avis du comité est favorable au contribuable devant le juge, la preuve incombe alors à l’administration. Dans le cas contraire, il y a un renversement de la charge de la preuve, qui pèse sur le contribuable. Pour le rapporteur général Joël Giraud, ce renversement est paradoxal : le comité de l’abus de droit fiscal, conçu comme une garantie au profit du contribuable, se retourne contre lui.

C’est pourquoi un amendement va assurer la neutralité de l’avis du comité de l’abus de droit fiscal (et social), l’administration devant supporter la charge de la preuve, quel que soit l’avis rendu par le comité.

L’article 48 de la loi de finances transpose la directive ATAD, en introduisant une clause antiabus générale, mais sur le seul impôt sur les sociétés. Les députés ont souhaité aller plus loin en élargissant la notion d’abus de droit, applicable à tous les impôts. À compter de 2021, l’administration pourra écarter « les actes qui, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ont pour motif principal d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ».

L’amendement introduit donc un abus de droit « à deux étages », pour permettre le rejet des opérations à motivation fiscale principale (et non plus seulement exclusive). Contrairement à l’abus de droit à la motivation fiscale exclusive, ce nouvel abus de droit assoupli ne sera pas sanctionné de pénalité (afin, notamment, d’éviter une nouvelle censure constitutionnelle). C’est une proposition issue du récent rapport Peyrol-Parigi sur l’évasion fiscale internationale.

Amende et saisie administratives

Les députés ont remédié à l’inconstitutionnalité prononcée le mois dernier par le Conseil constitutionnel sur la sanction par l’administration de la délivrance irrégulière de documents permettant à un contribuable d’obtenir un avantage fiscal (Cons. const., 12 oct. 2018, n° 2018-739 QPC, D. 2018. 1971 ). L’amendement du rapporteur général prévoit que la sanction sera dorénavant conditionnée à un critère d’intentionnalité et que l’amende administrative sera égale au montant de l’avantage fiscal indûment obtenu.

Enfin, les députés ont modifié la saisie administrative à tiers détenteur qui sera créée au 1er janvier 2019 (v. Dalloz actualité, 29 janv. 2018, obs. G. Payan isset(node/188848) ? node/188848 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>188848). Ils ont réintroduit un dispositif dérogatoire de cantonnement qui existe actuellement mais n’avait pas été repris. Pour les petites sommes, il sera possible limiter les sommes indisponibles sur le compte du débiteur à hauteur du montant de la saisie.