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Affaire Lafarge : annulation de sa mise en examen pour délit de mise en danger délibéré de la vie d’autrui en l’absence d’obligation légale ou réglementaire de droit français
Affaire Lafarge : annulation de sa mise en examen pour délit de mise en danger délibéré de la vie d’autrui en l’absence d’obligation légale ou réglementaire de droit français
Par arrêt du 16 janvier 2024, la Cour de cassation précise, dans le cadre de l’affaire mettant en cause la société Lafarge, qu’il n’est possible de mettre en examen la personne morale que s’il existe, au préalable, une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par une disposition légale ou réglementaire de droit français, dont la méconnaissance pourra lui être reprochée. Il en résulte que cette obligation ne peut résider en une obligation de sécurité au travail de droit étranger, tel que de droit syrien, dans le cas où les dispositions du code du travail français ne sont pas applicables aux faits.

Le délit de risque causé à autrui prévu à l’article 223-1 du code pénal n’en finit pas d’occuper la jurisprudence de la Cour de cassation. Comme le relève d’ailleurs un auteur, « les arrêts qu[e cette dernière] a récemment rendus en la matière sont assez détaillés et ont été publiés au Bulletin. Ceci atteste d’une part de l’intérêt porté par la Cour de cassation à ce type de comportement et d’autre part de sa volonté de clarifier le contenu d’une incrimination au sujet de laquelle un certain nombre de questions restaient en suspens » (B. Lapérou-Scheneider, Petit vademecum actualisé de la caractérisation du délit de risque causé à autrui dans le cadre du travail, JCP S 2022. 1154, spéc. § 2). Force est de constater que l’arrêt qu’elle a rendu le 16 janvier 2024 s’inscrit dans le droit fil de cette volonté de clarification.
Cette décision a été rendue s’agissant de la société française Lafarge, laquelle s’était fait connaître au travers de quatre précédentes décisions très largement diffusées et médiatisées en raison de la particularité des faits de l’espèce (Crim. 7 sept. 2021, nos 19-87.031, 19-87.036, 19-87,040, 19-87.367, 19-87.376 et 19-87.662, Dalloz actualité, 13 sept. 2021, obs. E. Daoud ; D. 2022. 45 , note L. Saenko
; ibid. 1487, obs. J.-B. Perrier
; JA 2021, n° 648, p. 11, obs. X. Delpech
; AJ pénal 2021. 469, note J. Lasserre Capdeville
; RSC 2022. 87, obs. R. Parizot
).
Pour rappel, la société Lafarge a construit à Jalabiya, dans le nord de la Syrie, une cimenterie, pour un coût de plusieurs centaines de millions d’euros. Mise en service en 2010, et exploitée par une société de droit syrien, la société Lafarge Cement Syria (LCS), sous-filiale de la société Lafarge, détenue à plus de 98 % par cette dernière, la cimenterie est, entre 2012 et 2015 alors que le pays sombre dans la guerre civile, l’objet de combats et d’occupations par différents groupes armés. Si l’encadrement de nationalité étrangère est évacué, dès 2012, vers l’Égypte, d’où est dirigée l’activité de l’usine, les salariés syriens ont poursuivi leur travail, permettant ainsi le fonctionnement de l’usine. Afin toutefois de limiter les risques auprès de ces salariés, notamment d’extorsion et d’enlèvement par ces factions armées dont l’organisation salafiste djihadiste groupe État islamique, dit « EI », lesquelles contrôlaient la région et étaient en mesure de compromettre l’activité de la cimenterie, la société LCS aurait versé à ces dernières des sommes d’argent pour un montant entre 4,8 et 10 millions d’euros, et ce par l’intermédiaire de diverses personnes. En septembre 2014, le site est finalement évacué en urgence, avant que l’EI, faisant son entrée dans le conflit, donnant au demeurant une autre dimension à celui-ci, ne s’en empare.
En novembre 2016, plusieurs associations ainsi que des salariés syriens travaillant pour le cimentier français ont porté plainte et se sont constitués parties civiles auprès du juge d’instruction des chefs, outre des infractions de financement d’entreprise terroriste, de complicité de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, d’exploitation abusive du travail d’autrui, du délit de mise en danger de la vie d’autrui. Plus exactement, les salariés syriens qui assuraient la continuité de l’exploitation de l’usine considéraient, en raison du conflit civil, avoir été exposés à un risque de mort ou de blessures, notamment faute d’avoir reçu de formation adéquate en cas d’attaque. En juin 2018, la cimenterie est mise en examen des chefs, notamment, de complicité de crimes contre l’humanité et de mise en danger de la vie d’autrui. S’en suit le contentieux qui nous concerne, la société Lafarge ayant déposé une requête en annulation de sa mise en examen pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui, rejetée par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris par arrêt du 18 mai 2022, avant que celui-ci ne soit censuré par la Cour de cassation.
Pour rappel, l’article 223-1 du code pénal réprime « […] le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ».
L’enjeu ici était de celui de savoir si la société poursuivie avait violé une telle obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement à l’égard des salariés syriens, obligation dont l’existence est exigée dès la mise en examen.
La confirmation de l’existence d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement
Même si la mise en examen suppose seulement qu’il existe à l’encontre d’une personne des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elle ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission du délit de mise en danger de la vie d’autrui dont le juge d’instruction est saisi (C. pr. pén., art. 80-1), et non la démonstration de la caractérisation de ce délit, l’existence d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement doit en effet être démontrée par le magistrat instructeur.
Par un arrêt du 20 janvier...
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